OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 ACTA: quatre lettres qui pourraient changer la face du monde http://owni.fr/2010/09/14/acta-quatre-lettres-qui-pourraient-changer-la-face-du-monde/ http://owni.fr/2010/09/14/acta-quatre-lettres-qui-pourraient-changer-la-face-du-monde/#comments Tue, 14 Sep 2010 10:48:08 +0000 Sandrine Bélier http://owni.fr/?p=28038 A une semaine du prochain round des négociations ACTA qui reprendront à Tokyo le 23 septembre, l’eurodéputée écologiste Sandrine Bélier rappelle, en dépit des propos rassurants tenus par la Commission européenne, l’urgence qu’il y a à se mobiliser contre un texte qu’elle juge, tant sur la forme que sur le fond, inacceptable en l’état. Contournement des processus démocratiques en vigueur, mise en danger des libertés publiques, entrave à l’accès aux savoirs et aux médicaments, brevetabilité du vivant, fragilisation des activités économiques en ligne… La liste, particulièrement préoccupante, est non exhaustive…

Peut-on imaginer en 2010, qu’un petit groupe d’États décide, en dehors de tout cadre institutionnel et au mépris des règles démocratiques les plus élémentaires, de restreindre nos libertés numériques, notre accès à l’information, aux savoirs, aux médicaments? Peut-on imaginer qu’un petit groupe d’États légifère de telle sorte que le devenir de ces droits ne dépende demain plus – ou presque – que du bon vouloir de grandes firmes internationales?

La chose paraît raisonnablement improbable et impossible, à quatre lettres près : A.C.T.A (Anti-Counterfeiting Trade Agreement). ACTA, le traité négocié depuis plus de deux ans dans le plus grand secret par les États-Unis, l’Union européenne (Conseil et Commission sans le Parlement, exclu des négociations), l’Australie, le Canada, la Corée, le Japon, le Maroc, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, Singapour et la Suisse.

La motivation affichée par les négociateurs: harmoniser et renforcer la lutte internationale contre la contrefaçon. Mais le contenu du texte qui a «malencontreusement» commencé à «fuiter» dès le 22 mai 2008, grâce au désormais célèbre Wikileaks, révèle une tout autre réalité et explique la chape de plomb qui pèse sur les négociations et contre laquelle se mobilise depuis, associations de protection des libertés civiles, parlements nationaux et européen.

Le traité secret des grands de ce monde

Les négociations ACTA se poursuivent dans le plus grand secret, sans aucun contrôle parlementaire ou consultation de la société civile et ont volontairement cours en dehors de toute institution internationale compétente, comme pourraient l’être l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) ou l’OMPI (Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle). Le Parlement européen, désormais partie prenante aux engagements internationaux de l’Union européenne, est lui aussi soumis au secret, malgré ses demandes répétées de transparence.

Outre de rares débriefings oraux, obtenus sous pression parlementaire, Luc Devigne, négociateur pour l’Union européenne et Karel de Gucht, commissaire européen au Commerce s’obstinent à fuir l’obligation de transparence envers le Parlement que leur impose pourtant le Traité de Lisbonne et qui leur a encore été rappelée par les eurodéputés lors de l’adoption, la semaine dernière, de la Déclaration 12. On nous objecte que les membres de la commission parlementaire INTA (Commerce International) ont reçu les deux dernières versions du texte, en juillet et en août.

Mais nos collègues sont soumis à l’obligation de confidentialité. Et chacun des exemplaires distribués est personnalisé et numéroté, page après page, dans toute sa hauteur, afin de palier tout risque de (photo)copie et à des fins d’identification de tout parlementaire contrevenant… Excluant de fait, les membres des commissions parlementaires LIBE (Libertés publiques), JURI (juridiques) et ENVI (Environnement et Santé) de l’accès à l’information et du droit d’expression, au risque de mettre en porte-à-faux leurs collègues d’INTA.

En d’autres termes, à ce jour officiellement, ne siégeant pas dans la Commission INTA, malgré mon statut de députée européenne, représentante des citoyens européens, appelée dans l’avenir à voter sur cet accord touchant à des sujets sur lesquels je suis particulièrement engagée, je ne suis donc pas censée connaître et m’exprimer sur la dernière version de la négociation dont l’accès ne m’est pas autorisé… c’est sans compter sur la pugnacité de la société civile organisée.

Le traité qui pourrait bien changer la face du monde

Fuites après fuites, obtenues grâce à la persévérance d’associations comme la Quadrature du Net ou la Knowledge Ecology International, il apparait que la négociation visant à lutter contre la contrefaçon prend une dimension qui dépasse largement la simple protection des marques sur des biens matériels – contrairement aux engagements de la Commission européenne. La définition et le champ d’application de la contrefaçon est largement revisité.

Par lutte contre la contrefaçon, les négociateurs américains cherchent avant tout à renforcer la protection du copyright, des droits d’auteur et du droit des marques. La Commission européenne et les États membres de l’Union, via le Conseil, souhaitent quant à eux aller encore au-delà en y adjoignant les indications géographiques (visant la protection des AOC) et les brevets dans les domaines de l’informatique, pharmaceutique ou alimentaire.

Cela implique que tout produit couvert d’un droit de propriété intellectuelle pourrait, sur seule présomption de contrefaçon, être saisi, voire détruit en douane. Pourraient être saisis et détruits les produits d’exportation agricoles suspectés de contenir un gène breveté – même issu d’une production conventionnelle ou biologique, végétale ou animale, victime d’une contamination OGM. Le risque est le même pour les produits pharmaceutiques et particulièrement pour les médicaments génériques.

En matière informatique, l’avenir du logiciel libre serait particulièrement menacé par l’article 2.18§6, le seul développement d’un lecteur de DVD sous Linux nécessitant, pour exemple, le contournement des Digital Rights Management.

Côté web, tout Internaute également soupçonné de piratage pourrait être poursuivi. La responsabilité de son fournisseur d’accès Internet (FAI) ou de tout autre intermédiaire être engagée. Outre une coopération renforcée avec les ayants droit demandée aux intermédiaires, l’article 2.5 prévoit en effet, «dans certaines conditions» (bien évidemment non précisées…), qu’il peut leur être demandé de participer directement à la prévention de «toute infraction imminente aux droits de la propriété intellectuelle»…

Nouvelle gouvernance et remise en cause des acquis démocratiques, privatisation des savoirs et du vivant, fragilisation de l’accès aux médicaments, grandes oreilles, filtrage et blocage du Net, voilà un aperçu du nouveau monde selon ACTA, si nous ne nous y opposons pas !

Illustration CC par Geoffrey Dorne

Lire nos articles sur le même sujet:

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MEP Sandrine Bélier: A Wave of Internet Censorship Threatens Europe http://owni.fr/2010/02/17/mep-sandrine-belier-acta-hadopi-loppsi-internet-censorship-europe/ http://owni.fr/2010/02/17/mep-sandrine-belier-acta-hadopi-loppsi-internet-censorship-europe/#comments Wed, 17 Feb 2010 18:34:02 +0000 Sandrine Bélier http://owni.fr/?p=8439 libertyok2

[MAJ] 20/02/2010 > Our colleagues from 2-ufer translated the article in german : danke /-)

Italy, Germany, Great-Britain, Spain, Bulgary … Internet control and censorship is getting organised. In France, the government says we wouldn’t have to worry – Are we sure about that ? asks Sandrine Bélier, the 36 years-old Green Member of the European Parliament.


When I expressed my fears about the potential abuses in terms of surveillance and their effects on civil liberties and individual freedom, Nathalie Kosciusko-Morizet, currently in charge of digital economy in Sarkozy’s government, wanted to give me reassurances : “France is not China”.

FRANCE : from HADOPI to LOPPSI

In fact, French government tries to reinforce its control of the web. The HADOPI law, adopted few months ago, attempts to control and regulate Internet access as a means to encourage compliance with copyright laws. “HADOPI” is the government agency created by the eponymous law. This agency will be in charge of setting up the so-called three-strike sanction, or graduated response, which sees consumers disconnected after a number of notification letters warning that they are violating copyright.

Despite a strong mobilisation from bloggers, journalists and web activists, the law passed, and we are now waiting for it to come into effect … Right now, the LOPPSI bill is triggering additional reactions. LOPPSI is a bundle of repressive measures concerning video surveillance cameras, traffic control or intelligence services.This bill allows French Home Office to blacklist illegal websites i.e. providing child pornography. Internet service providers will then have to block those sites.

The European Parliament strikes back

“France and Europe are not China”. One question then : how should we explain the conflict about the amendment 138 to the Telecom Package, also known as the “anti-Hadopi amendment” in the European Parliament ?

This amendment was finally adopted and says that “measures taken regarding end-users’ access to or use of services and applications through electronic communications networks shall respect the fundamental rights and freedoms of natural persons, including in relation to privacy, freedom of expression and access to information and the right to a judgement by an independent and impartial tribunal…” However, at the end of 2009, the Council of the European Union (under France’s pressure) made some considerable efforts to erase from the 138th amendment the expressions “exceptional circumstances” presumption of innocence” and ” impartial procedure”. It also added multiple exceptions to civil liberties. Why? Some said that the Council aimed at forcing an anti web-control Parliament to compromise. I see it as a bad omen that shows a will to restrain free use of the web, with no warranties to secure Internet users’ rights. I see it as a serious threat to freedom of information, to freedom of expression and to personal data confidentiality.

Demonstrations in Sofia

If France has HADOPI and LOPPSI, Bulgaria has its burden too. Hundreds of citizens demonstrated in Sofia, shouting “Bulgaria is not Big Brother, 2009 is not 1984!”. The AFP says that this demonstration gathered people from 38 NGOs protesting against the adoption of a bill that “authorizes the surveillance of Internet and mobile communications for people that are suspected of an offense or a crime punishable by at least two years’ emprisonment. The police will be able to do so without asking the permission to a judge. Supposed to strengthen the fight on crime, this proceeding is made to speed up all the process of putting someone under surveillance”.

Mobilization in Spain

In Spain, citizens are protesting against the Government since a bill on “sustainable economy” plans the creation of an “intellectual property commission”. This commission would have the power to block websites that allow to download music, movies and videogames. The citizen response was immediate : bloggers, journalists, artists and people working on the Internet gathered around a “Manifesto for the defense of online fundamental rights”. The text was published on more than 58.000 blogs in a few hours !

The signatories agreed that “copyright cannot be placed above citizens’ fundamental rights like privacy rights and freedom of expression. These rights cannot be suspended outside justice”.

Italy : threats to video broadcasting

In Italy, Berlusconi’s governement initially proposed to extend to the Internet the same restricting rules applying to television. Those rules are strict: to broadcast something, you have to get the authorization of the communication ministry! The targets? Online broadcast platforms like Youtube or Dailymotion and all the independent webTVs… Officially, it is not censorship, just a way of balancing rights and obligations… [The proposal has been watered down in current days after wide protests among activists and the Communication authority itself].

ACTA : secret negotiations

“Europe is not China”… But what shall we then again think about the ACTA (Anti-Counterfeiting Trade Agreement) top secret negotiations ? European countries are part of the negotiations, but not China. Leaks from some confidential documents clearly states that one of this treaty’s goals is to lead the states to adopt repression measures against file sharing like the three-strike sanction or Internet filtering.

The European Parliament, in its 11th march 2009 resolution, asked for more transparency on this negotiations. We haven’t been heard yet. This lack of transparency is particularly worrying if not intolerable and against the European Union democratic values.

Europe and France are not China. But we need to guarantee our citizens and web users the protection against all potential abuses and detrimental to civil liberties and individual freedom. Citizens have to be protected against technologies and public or private organisations that can monitor their online activities.

I agree with Tim Berners Lee, inventor of the World Wide Web, when he states :
“I want to know if I look up a whole lot of books about some form of cancer that that’s not going to get to my insurance company and I’m going to find my insurance premium is going to go up by 5% because they’ve figured I’m looking at those books”

It would have been fairer and more reassuring to secure web users’ rights first. This is not our governments perspective. And at the time when French Parliament debate on LOPPSI, we created an Internet Core Group at the European Parliament. Its goal is to put forward an “Internet Bill of Rights” to the European Commission.

It would have been better to start by this move. But – and it’s not some unrealistic thought – I fear that our governments’ purpose is not to secure those rights today.

» The original article (in French) : Hadopi, Loppsi : les censeurs du net s’organisent

» Translation by Guillaume Ledit (and a litte bit by Adriano Farano) /-)

» Illustration by Loguy

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http://owni.fr/2010/02/17/mep-sandrine-belier-acta-hadopi-loppsi-internet-censorship-europe/feed/ 1
“ACTA: Une contrefaçon de démocratie” http://owni.fr/2010/01/31/acta-une-contrefacon-de-democratie/ http://owni.fr/2010/01/31/acta-une-contrefacon-de-democratie/#comments Sun, 31 Jan 2010 15:11:41 +0000 Sandrine Bélier http://owni.fr/?p=7451 Sandrine Bélier, députée européenne Europe Ecologie, et Marie Bové, tête de liste Europe Ecologie en Gironde pour les régionales, reviennent sur l’accord commercial anti-contrefaçon ACTA et tirent la sonnette d’alarme :

“Du 26 au 29 janvier, un 7ème round de négociations pour un accord commercial anti-contrefaçon a réuni à Mexico le Japon, les pays européens, la Corée, le Canada… Objectif : en finir avec les internautes diffusant librement autant d’œuvres culturelles que de savoirs scientifiques à l’instar des brevets industriels ou des droits d’auteur. Une méthode : le secret défense.

Qui a entendu parler de l’accord commercial anti-contrefaçon ACTA? Pas grand monde… Pas étonnant, car cet accord multilatéral qui n’est adossé à aucune institution internationale est négocié depuis deux ans dans le plus grand secret. Il regroupe l’Union européenne, les Etats-Unis et une dizaine d’autres pays, principalement membres de l’OCDE et quelques Etats du Sud qui servent de caution.
Lorsqu’avec cet accord les pays riches se seront entendus, ils feront pression sur les pays en développement, sans que ceux-ci n’aient eu leur mot à dire, pour qu’ils s’y rallient, contraints par des accords bilatéraux. Quelques entreprises espèrent par l’ACTA, au nom d’une «propriété intellectuelle» toute puissante, restreindre l’accès aux médicaments génériques et à la connaissance des citoyens du monde entier. Nous devons les en empêcher !

L’ACTA concerne de nombreux aspects de nos vies, de celles de nos concitoyens, et au sens large des habitants du monde entier. A l’origine de cet accord, il y a la volonté des firmes pharmaceutiques d’utiliser l’épouvantail de la contrefaçon et, en favorisant un l’amalgame avec les génériques, de limiter par tous moyens la circulation et le recours à ces médicaments moins chers qui échappent au contrôle des détenteurs de brevets. Il y a la volonté de s’assurer, en somme, que les pauvres ne puissent être soignés sans payer le prix fort aux multinationales du médicament.

Mais ce n’est pas tout. Les mêmes industries du divertissement qui ont dicté les lois HADOPI, DADVSI, et promeuvent partout dans le monde une vision extrémiste d’un droit d’auteur tourné contre le public, tiennent la plume. Plutôt que d’adapter leurs modèles économiques, ils utilisent l’ACTA pour tenter, à l’échelle globale, de contrôler Internet.

Aux dires mêmes des négociateurs de la Commission européenne [1], l’ACTA prévoit d’instaurer la responsabilité des acteurs de l’Internet (hébergeurs, fournisseurs d’accès) pour le contenu soumis au droit d’auteur qui transiterait par leurs services. Une telle épée de Damoclès transformerait inévitablement les intermédiaires techniques en policiers privés du Net, ouvrant ainsi la voie au filtrage des contenus et autres dérives anti-démocratiques.

Nous nous opposons à cet accord dangereux, dont le secret des négociations est révélateur d’intentions contraires à l’intérêt général. Il est le symbole du comportement prédateur et malsain de ces entreprises s’appropriant un nombre croissant de ressources informationnelles  au mépris de la liberté, de la démocratie et du développement de nos sociétés en réseau. Il est tout ce que nous détestons, et doit à tout prix être abandonné pour laisser place à une vaste concertation sur l’avenir de la «propriété intellectuelle» et d’Internet dans laquelle les citoyens auront leur mot à dire. Internet, la production de savoir et l’accès à la connaissance sont bien trop importants pour être ainsi sacrifiés.”

[1] L’analyse «fuitée» de la Commission Européenne est disponible ici

» Cet article a également été publié sur LibéBordeaux

» Illustration de la page d’accueil par Raïssa Bandou sur Flickr

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http://owni.fr/2010/01/31/acta-une-contrefacon-de-democratie/feed/ 18
La taxe carbone victime de la démagogie fiscale http://owni.fr/2009/10/01/la-taxe-carbone-victime-de-la-demagogie-fiscale/ http://owni.fr/2009/10/01/la-taxe-carbone-victime-de-la-demagogie-fiscale/#comments Thu, 01 Oct 2009 10:48:18 +0000 Sandrine Bélier http://owni.fr/?p=4074 L’injustice n’est pas la fiscalité environnementale, l’injustice serait de ne rien faire.

Jusqu’à ce week-end, je ne voyais pas l’intérêt de m’immiscer dans le débat sur la taxe carbone tant il a coulé d’encre sur le sujet ces dernières semaines. Qu’écrire qui n’ait pas été écrit? Comment le dire pour rétablir la justesse et la vérité sur ce que constitue ou devait constituer la contribution climat énergie?

Et puis, samedi 27 septembre au matin à Thionville au lancement de la votation citoyenne pour le maintien de la poste en service public, ce n’est pas sur la notion de service public que le journaliste de l’Huma m’a interrogée, ce n’est pas sur nos valeurs de solidarité territoriale qu’un passant m’a interpellée en ces termes «vous les écolos vous voulez qu’on paie, vous vous en foutez des pauvres!».

Comment a-t-on pu en arriver là ? Comment d’une situation où tout le monde (ou presque) considère que les changements climatiques représentent une menace sérieuse, admet qu’il est urgent de limiter nos consommations énergétiques émettrices de CO2 et reconnaît qu’il faut une incitation financière directe et spécifique (sous condition que simultanément soient mises en œuvre des solutions alternatives), nous soyons arrivés à une opposition globale à toute idée de taxation énergétique ? Que s’est-il passé pour que cette bonne idée soit ainsi gâchée, déformée, atténuée … ? Que s’est-il passé pour que nous (les écologistes) soyons ainsi alpagués dans la rue, recevions des mails d’insultes, soyons taxés d’«anti-sociaux» ? Que s’est-il passé pour que la mesure soit jugée injuste aujourd’hui, alors que la vraie injustice pour les plus démunis serait justement de ne pas prendre cette mesure. Parce que ce sont bien ces derniers qui seront les premiers touchés par l’augmentation du coût énergétique laissé à la loi du marché; ce sont bien eux qui seront les premiers touchés par les effets du dérèglement climatique !

Nous devons cette situation à une magnifique démonstration de démagogie politique de la part de ceux qui ne veulent pas du changement et qui ont royalement réussi à «carboniser» un choix d’avenir progressif et réaliste. Quelques vrais mensonges et approximations pour des positions plus électoralistes qu’écologistes, pour une classe politique déterminée à faire passer les élections régionales avant la défense de la planète et de ses habitants.

J’avoue que je n’ai pas pris garde aux alertes comme celles de France Nature Environnement : «Entre le flou gouvernemental et polémiques socialistes, la FNE craint que la montée du «populisme fiscal» ne nuise à la réforme. Si on décrédibilise l’instrument, les écologistes passeront pour ceux qui veulent une écologie punitive et taxative», craint Arnaud Gossement, son porte parole».

Je n’y ai pas pris garde, car je nous – militants, citoyens, consommateurs – faisais confiance pour ne pas nous laisser abuser. Mais j’ai sous-estimé la manœuvre politicienne de nos bons gros partis traditionnels qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez et qui calculent leurs positionnements non plus dans la poursuite de l’intérêt général mais au regard d’intérêts électoralistes : ne reculer devant aucune démagogie pourvu que cela serve leur image et leur projet de carrières politiques. Je suis écœurée mais pas abattue!

A charge, maintenant, pour les détracteurs de la taxe carbone de se montrer audacieux et force de proposition lors des débats parlementaires à venir à l’occasion de la loi de finance 2010 pour réinstaurer une contribution climat énergie équitable écologiquement et socialement!

Contribution Climat Energie: Agir maintenant pour ne pas subir demain

Reposons simplement les termes du débat et revenons aux fondements de ce que devait constituer la Contribution Climat Energie, telle que proposée et soutenue par les écologistes (portée par toutes les ONG pendant le Grenelle).

La taxe carbone n’est pas la contribution climat énergie. Ce n’est pas qu’une question de sémantique: le choix des mots n’est pas innocent et n’est pas sans effet. Le mécanisme retenu par le gouvernement exclut la production électrique dans l’assiette de la taxe. En d’autres termes, l’exonération de l’électricité invite à intensifier le recours au chauffage électrique (promotion engagée dès le Grenelle! avec l’amendement Ollier). C’est une aberration écologique puisque nos centrales électriques fonctionnent au gaz et au charbon pour répondre aux pointes de la demande électrique avec un bilan carbone désastreux. Une aberration sociale et contre-productive par rapport à l’objet même de la contribution climat énergie qui vise la réduction de notre consommation énergétique.

Ceci étant dit, si nous sommes tous d’accord sur le fait que face aux bouleversements climatiques qui menacent, il convient d’agir dès maintenant. Personne ne peut honnêtement nier que la contribution climat-énergie constitue indubitablement un des outils de cette action pour induire le changement qui doit intervenir dans nos modes de production et de consommation.

Aussi paradoxal que cela puisse paraître (j’entends déjà les hurlements poussifs des ultras-libéraux et ultras-démagos), le développement de la fiscalité environnementale doit nous réjouir. Car il s’agit d’un outil financier et fiscal qui viendrait se substituer et non s’ajouter à d’autres outils (la taxation sur le travail) en contribuant à une meilleure efficacité des politiques publiques environnementales (dont le développement d’alternatives comme les transports publics). Les taxes visent à être utilisées pour différencier le coût de produits afin de tenir compte de leur rareté et impact écologique, tandis que les dépenses fiscales et les aides publiques doivent permettre le développement de comportements moins polluant et/ou la consommation d’éco produits.

S’inspirant des expériences en Suède, au Danemark, le principe d’une contribution climat énergie est de faire augmenter progressivement le prix de l’énergie afin d’encourager chacun à réduire ses consommations. Avec cette mesure, qui donne un signal clair, les citoyens vont pouvoir se préparer à la raréfaction annoncée du pétrole, tandis que les entreprises vont être encouragées à innover pour mettre sur le marché et démocratiser des produits plus «écologiques». Elle constitue un levier d’innovation technologique et de changement des comportements plus que jamais indispensables.

La contribution climat énergie constitue une opportunité pour la France de donner un nouveau sens à sa politique fiscale, de faire basculer les régulations pour qu’elles soient moins pénalisantes pour l’emploi tout en sanctionnant les excès de la consommation d’énergie. Et ce n’est pas une augmentation de la fiscalité mais sa réorganisation : elle ne sera pas plus lourde, mais plus écologique. Il n’a jamais été question d’augmenter la pression fiscale. Les écologistes ont toujours accompagné le mécanisme du principe d’une contrepartie pour les ménages et les entreprises. L’objectif de la contribution climat énergie n’est pas de remplir les caisses de l’Etat, mais d’inciter chacun à changer de comportement. Le mécanisme proposé depuis toujours du chèque vert ou chèques «éco-énergie» permet d’encourager financièrement ceux qui réduisent leurs consommations d’énergie: c’est une sorte de bonus malus permanent. Ceux qui économisent le plus d’énergie sont doublement gagnants : ils réduisent leur facture d’énergie, tout en continuant à recevoir un chèque. Et le consommateur devient un acteur actif de la transformation de la production dès lors que l’achat d’appareils « efficaces » (électroménager, éclairage…) ou encore de panneaux solaires ou chaudières bois permet de faire une double économie : à l’achat et sur la facture énergétique chaque mois. Ex : Dès lors que les frigos basse consommation seront moins chers à l’achat qu’un frigo classique, ces derniers ne devraient plus se vendre et les producteurs ne devraient donc plus les produire… La réorientation de la demande sur de nouveaux produits conduira les entreprises à s’inscrire elles aussi dans un nouveau cercle de production et s’inscrire dans la transformation de l’économie par l’écologie.

Ultimatum Climat: Le changement n’est plus négociable!

La fiscalité écologique en France est aujourd’hui «loin d’être exemplaire en Europe» comme le souligne l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). «Elle ne représentait que 2,3% du PIB en 2006 (21ème rang sur 27) alors que certains pays européens sont déjà parvenus, grâce notamment à une taxation plus lourde des énergies fossiles, à des niveaux sensiblement plus élevés : 6% du PIB au Danemark, 4,1% aux Pays-Bas, et 2,7% en moyenne dans l’Union européenne». La France a perdu son rôle de pionnier et leadership, elle qui instituait dès 1964 les redevances sur l’eau ou encore en 1985 une taxe sur la pollution atmosphérique.

Avec le système d’affectation que les écologistes proposent, fiscalement neutre pour les entreprises et redistributif pour les ménages, la France a les moyens de mettre en place unilatéralement un instrument puissant de décarbonisation de l’économie, et de prendre ce faisant de l’avance dans la course ouverte de l’après-pétrole. Transport et bâtiments sont deux secteurs clé et ne sont pas ou peu couverts par le champ des politiques européennes. La contribution climat énergie complète le système européen des quotas d’émissions pour ces secteurs d’émissions diffuses. Et il sera essentiel de porter cette mesure au niveau européen : le signal-prix sur le carbone doit toucher l’ensemble des acteurs de l’Union européenne, car c’est une échelle importante pour répondre au défi du changement climatique.

A la fin de l’année, le monde a rendez-vous à Copenhague, pour trouver un accord international sur la question climatique. Vous vous souvenez de la mythique phrase de G.W Bush : «le mode de vie américain n’est pas négociable». Aujourd’hui, la donne a changé et soyons clairs : si nous devons changer nos modes de vie aujourd’hui, c’est parce que la planète et le climat nous indiquent qu’il en va de la survie de l’humanité et que la réduction de nos émissions de CO2 n’est simplement plus négociable.

Sandrine Bélier

Lire également: Taxe carbone; trop tard pour pinailler, Taxe carbone: Ségolène a raison et La taxe carbone remet le duel Sarkozy-Royal au goût du jour.

> Première publication sur Slate France, le 30 septembre 2009

Image de une via pfala, sur Flickr

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L’Europe mérite mieux que Barroso http://owni.fr/2009/09/10/leurope-merite-mieux-que-barroso/ http://owni.fr/2009/09/10/leurope-merite-mieux-que-barroso/#comments Thu, 10 Sep 2009 10:53:15 +0000 Sandrine Bélier http://owni.fr/?p=3452

1 – «Stop Barroso»: plus qu’un slogan de campagne


Juan Manuel Durao Barroso: de mémoire, jamais un président sortant de la Commission européenne n’avait tenu une telle place dans une campagne française pour les élections européennes. En faisant de l’ancien Premier Ministre portugais l’un des symboles, dès mi-mars, de notre campagne, j’ai le sentiment que nous avons réussi, avec Europe Ecologie, à réveiller l’intérêt dans l’Hexagone, sur les questions d’apparence complexes liées aux institutions, politiques et pratiques européennes.

La présidence de la Commission Européenne est bien l’un des principaux enjeux de la rentrée parlementaire européenne. Au-delà du slogan «Stop Barroso», c’est un débat qui s’est engagé dès juillet contre une Europe ultra libérale et attentiste sous contrôle des gouvernements réunis au sein du Conseil, contre une Europe paralysée par la prévalence des intérêts nationaux au détriment de la possibilité d’une politique ambitieuse commune de sortie de crise.

En obtenant, à Strasbourg, lors de la session parlementaire de juillet le report de la présentation par le Conseil du candidat Barroso au vote du parlement européen, les Verts européens alliés pour l’occasion aux socialistes et à une partie des libéraux, ont remporté la première manche de ce qui, bien plus qu’un simple épiphénomène médiatique, pourrait devenir l’un des plus importants bras de fer démocratique entre les chefs d’Etats et de gouvernements d’un côté et les représentants directs des citoyens de l’autre.

Soyons clairs, ce qui se joue n’est pas le sort d’un homme soutenu par le Conseil, mais un choix de société. Un tournant politique appelé de leurs vœux par nombre de citoyens européens qui, de plus en plus nombreux, disent stop aux vieilles politiques d’hier, sans cesse remises au goût du jour, et qui nous conduisent chaque jour qui passe un peu plus dans le mur. Stop, aussi, aux faux engagements politiques relayés médiatiquement.

Prenez la crise financière qui a plongé, en Europe et au-delà, des centaines de milliers de familles dans la plus grande détresse. Sarkozy, Merkel, Brown & Cie leur avait juré leur grand dieu qu’on ne les reprendrait plus, qu’ils allaient moraliser la finance… Résultat des courses, l’affaire des bonus. La fin des quotas laitiers et la crise qui s’ensuit pour les producteurs européens est bien à mettre au passif des Etats – dont la France – et de leur candidat Barroso. Que dire aussi de l’entêtement de l’ancien Premier ministre portugais à vouloir imposer les semences OGM sur le sol européen? Petit rappel des faits: le 22 juillet dernier, dans une indifférence quasi générale, la Commission européenne a réitéré son soutien à la commercialisation sur le marché des semences de maïs de la multinationale américaine Monsanto. Fin octobre, cette proposition devrait être soumise aux 27 ministres de l’Environnement. Divisés sur la question, ceux-ci pourraient le rester. En ce cas, la décision d’autoriser la commercialisation de ces trois semences appartiendrait à la Commission et à son président qui gère personnellement ce dossier…

Un BILAN sans perspective


Aujourd’hui je souhaite / nous souhaitons nous prononcer et débattre sur la base d’un programme. Quels sont les axes programmatiques que le futur Président de la Commission européenne entend défendre pour les 5 prochaines années? Quel est le programme de travail et les orientations que Mr Barroso s’engage à soutenir et à poursuivre? Aujourd’hui, je n’en sais rien parce que rien de tel ne nous a été présenté. Je ne peux qu’imaginer ce qu’il nous réserve sur la base du bilan de son mandat sur les 5 dernières années. Et ce bilan, ce n’est pas l’Europe que je défends. Et pour couper l’herbe sous le pied aux polémiqueurs tentés de me taxer de faire un procès d’attention, je soumets à votre réflexion les éléments qui me conduisent à considérer que le bilan de la commission Barroso est loin d’être à la hauteur des enjeux d’une sortie de crise par le haut:

- Economie et réponse à la crise financière

La Commission Barroso a systématiquement ignoré les inquiétudes exprimées face à l’absence de réglementation du secteur financier. Elle a tardé à proposer des mesures visant à atténuer les effets de la crise financière. Elle a fait preuve d’une passivité sans commune mesure à l’égard des paradis fiscaux et de la poursuite de la libéralisation des services financiers, rendant d’autant plus difficile toute régulation future du secteur financier dans l’UE.

- Social

Que dire et penser d’une politique sociale subordonnée à une vision économique à court terme? Politique de libéralisation, privatisation et déréglementation qui a mis en péril les services publics. Que dire et que penser de l’échec de la Commission sur la révision de la directive relative aux travailleurs détachés? Que dire et que penser des propositions qui ont suivi (de la directive services à la réglementation sur la durée du travail dans les transports routiers) qui n’ont eu que pour effet d’ouvrir la porte au dumping social?

- Environnement

L’environnement est devenu le parent pauvre de la politique communautaire. Sous la présidence de Mr Barroso, les gains économiques à court terme de l’industrie ont prévalu systématiquement sur les objectifs environnementaux à long terme. Sous l’impulsion de M. Barroso, la Commission a retardé et affaibli des propositions législatives majeures dans le domaine de la lutte contre les changements climatiques, telles que la limitation des émissions de CO2 des véhicules. M. Barroso promeut ouvertement l’énergie nucléaire, mettant fin à la tradition de neutralité de la commission vis-à-vis de cette technologie en affaiblissant les orientations de développement en faveur des énergies renouvelables. Je ne peux pas accepter une commission qui outrepasse ses attributions en cherchant à plusieurs reprises à faire autoriser la culture de variétés génétiquement modifiées contre la volonté même de plusieurs Etats membres et de nombreux consommateurs. Je ne veux pas d’une commission qui a retardé et affaibli la législation européenne sur la pollution atmosphérique et le traitement des déchets et n’a pris aucune mesure quant aux dispositions du règlement Reach visant à substituer les substances chimiques pour lesquelles des alternatives sures existent.

- Démocratie

Enfin, je suis atterrée par le bilan de cette commission dans ce domaine. Le président Barroso n’a pas tenu son engagement de créer un groupe de travail sur les droits de l’homme composé de commissaires. Il est resté muet sur les restitutions extraordinaires de la CIA en Europe malgré la violation de la réglementation européenne… Je suis consternée de constater que la Commission a renoncé à son rôle de gardienne des traités de l’UE et a évité d’engager des procédures d’infraction contre les états membres contrevenants et récidivistes. Je suis inquiète au regard de l’attitude d’une Commission qui s’est montrée réticente à assurer un plus grand accès à ses documents, même lorsque des décisions de justice l’enjoignaient de le faire; qui face à l’influence des lobbies dans le processus décisionnel, s’est limitée à la création d’un registre volontaire écartant toute initiative visant à plus de transparence…

Ne nous trompons pas de débat, c’est au regard de ce bilan que nous disons aujourd’hui «Stop Barroso» mais plus encore que nous affirmons que l’Europe, notre vision de l’Europe, notre Europe mérite mieux que Barroso! Il n’est pas tant question de stigmatiser un homme que de se s’interroger sur quelle Europe nous voulons pour demain.

Quelle est l’Europe que nous construit, avec le soutien des chefs d’Etats et de gouvernements, l’actuel président de la Commission? Une Europe impuissante face au monde de la finance? Une Europe destructrice d’emplois agricoles? Une Europe OGM que les citoyens refusent très majoritairement l’usage de semences génétiquement modifiées? Cette Europe n’est pas celle d’Europe Ecologie et des Verts européens, pas plus qu’elle n’est aujourd’hui celle des citoyens et d’une majorité de leurs représentants parlementaires. Ce qui se joue en ce moment, entre les couloirs du Berlaymont et ceux du Parlement est une question de choix entre différentes visions de l’Avenir.

Et d’un point de vue institutionnel, n’en déplaise à certains, je suis de ceux qui pensent que l’avenir devra se définir sous le traité de Lisbonne!
2 – Nice ou Lisbonne – La «tactique du tic-tac»


Nous nous sommes réunis dès le 16 juin à Bruxelles, une semaine après les élections, pour nous caler sur nos objectifs: faire obstacle au passage en force du Conseil à une présentation de son candidat à la session de juillet et de septembre sous le traité de Nice pour affirmer la légitimité et le poids du parlement, aujourd’hui seule institution au sein de l’Union Européenne représentant les citoyens européens. Il s’agissait bien de se faire respecter dès les premières minutes.

Ainsi, lors de cette dernière session strasbourgeoise, il est ressorti de la conférence des présidents que l’inscription à l’ordre du jour de la session de rentrée de l’investiture de José Manuel Durao Barroso serait conditionnée à la présentation par ce dernier d’un «programme convaincant». En juillet, la conférence des présidents a décidé de ne pas décider de l’inscription à l’ordre du jour de la présentation du candidat Barroso au parlement. La «tactique du tic-tac» consiste à repousser le vote sur la présidence de la Commission après la ratification, si elle a lieu, du traité de Lisbonne (référendum prévu en Irlande début octobre) pour que le nouveau président soit élu sous l’égide de ce traité qu’il sera amené à appliquer.

Une des raisons tient dans cette disposition du nouveau traité:

«En tenant compte des élections au Parlement européen, et après avoir procédé aux consultations appropriées, le Conseil européen, statuant à la majorité qualifiée, propose au Parlement européen un candidat à la fonction de président de la Commission. Ce candidat est élu par le Parlement européen à la majorité des membres qui le composent. Si ce candidat ne recueille pas la majorité, le Conseil européen, statuant à la majorité qualifiée, propose, dans un délai d’un mois, un nouveau candidat, qui est élu par le Parlement européen selon la même procédure.»

En clair, avec le traité de Lisbonne, Barroso devra recueillir un minimum de 376 voix sur sa personne contre une simple majorité des présents à l’heure actuelle. Autant dire que si le front anti-Barroso devait se renforcer, ses jours à la tête de la Commission seraient en ce cas, sérieusement comptés. Resterait alors au Conseil à proposer le nom d’un autre candidat, dont on pourrait aller jusqu’à imaginer qu’il soit soufflé par le Parlement lui-même… A peu de choses près, l’Union vivrait en ce cas une petite révolution de velours…

Quant à Mr Barroso, si les chefs d’Etats et de gouvernements européens tenaient malgré tout encore à le gratifier du titre du président, le traité de Lisbonne instituant une présidence de l’Union européenne pour un mandat 2 ans et demi, qu’ils lui attribuent celui de président du Conseil européen. Les choses auraient au moins le mérite d’être claires…

(Première publication sur Slate France, le 27 août 2009)

Image de une: Juan Manuel Durao Barroso. Sebastien Pirlet / Reuters


> Article initialement publié sur le blog de Sandrine Bélier

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Pourquoi je signe le Pacte pour les libertés numériques, par Sandrine Bélier (Europe Ecologie) http://owni.fr/2009/05/04/pourquoi-je-signe-le-pacte-pour-les-libertes-numeriques-par-sandrine-belier/ http://owni.fr/2009/05/04/pourquoi-je-signe-le-pacte-pour-les-libertes-numeriques-par-sandrine-belier/#comments Mon, 04 May 2009 12:16:53 +0000 Sandrine Bélier http://owni.fr/2009/05/04/pourquoi-je-signe-le-pacte-pour-les-libertes-numeriques-par-sandrine-belier/ photo-sb01

«If you can run it, you can crack it». Ce slogan, Stéphane, jeune créateur d’entreprise spécialisée dans le développement de jeux vidéos me l’a rappelé, il y a quelques jours de cela, à l’occasion d’une discussion informelle sur Hadopi. «Un slogan de hacker», relevait-il, se qualifiant ainsi lui-même de «pirate». Mais l’activité de téléchargement illégal est pourtant susceptible de fragiliser son activité économique, à l’instar de celles et de ceux que le gouvernement nous dit tenter de protéger… Il me dit que non. Non, car pour Stéphane, comme pour de nombreux autres créateurs, la riposte graduée, la criminalisation des «pirates» est non seulement inefficace, car inapplicable techniquement, mais elle ne défend en rien la création…

Hadopi, pourtant, nous laisse entendre notre ministre française de la Culture, saura supprimer le piratage et donc sauvegarder les droits des auteurs. Mais les «vrais» pirates utilisent déjà depuis un certain temps des crypteurs SSL, qui leur permettent notamment de télécharger/échanger pour 5 euros par mois des fichiers en toute discrétion. On m’a expliqué que ces crypteurs seraient d’une rare efficacité et contrecarrent déjà le plus simplement du monde toute velléité de riposte… Alors, l’application de la loi Hadopi pourrait imposer aux Internautes le téléchargement de logiciels espions sur leur ordinateur au motif de leur protection contre toute erreur «judiciaire». Mais là encore, et au-delà de me poser quelques question en matière de libertés publiques et de respect de la vie privée, je m’interroge techniquement… «If you can run it, you can crack it»…

Une solution bien plus juste et manifestement plus efficace ne serait-elle pas de faire valoir la pertinence de la licence globale ou de mettre financièrement à contribution les FAI dont une très large partie de l’offre repose – justement – sur la diffusion de biens culturels immatériels? La solution est-elle trop évidente et trop raisonnable pour être tout simplement balayée d’un revers de la main ? Qu’est-ce qui peut bien expliquer ce rejet de la culture Internet? Qui est vraiment victime d’Internet ? Qu’on ne me fasse pas croire que ce sont les artistes et les auteurs, quand nous vivons une époque où justement et notamment sur le plan musical, de nouveaux artistes se sont fait connaître parce que leurs titres s’échangeaient sur la Toile avant que des majors ne profitent de leur succès. Alors qui Hadopi veut-elle vraiment protéger? Les auteurs et les citoyens dont les libertés publiques sont chaque jour qui passe un peu plus menacées, ou bien quelques lobbies?

La réflexion qui m’a conduite à m’opposer fermement à ce projet de loi à été nourrie notamment par la démarche de 700 artistes britanniques regroupés autour de la Featured Artist Coalition. Selon eux, le problème ne réside pas tant aujourd’hui dans l’activité de piraterie que dans l’absence de partage équitable des rentrées financières de la création entre artistes et intermédiaires. Ce constat n’est pas non plus étranger à l’industrie cinématographique… Novembre 2006, le réalisateur Ra’Up MacGee ne trouve pas de distributeur pour son film Autumn . Conséquence : il le met en ligne en exclusivité et gratuitement sur GoogleVideo. Le succès est au rendez-vous. Le DVD sort quelques mois après et les intermédiaires traditionnels écartés des recettes des ventes … 21 mars dernier : le troisième film du scénariste et réalisateur Rick Winters, Blank , sort cette fois directement en DVD, mais aussi sur les réseaux P2P, où il est mis gratuitement à la disposition des Internautes. Le parti pris de l’équipe du film: «travailler exclusivement contre un pourcentage des profits réalisés» en vente directe. Résultat : Grands gagnants de l’opération: les créateurs – Grands perdants, les intermédiaires. Dans le cas de Stéphane, si celui-ci s’autoproduisait, vendait en direct via une plateforme de téléchargement de type Steam, ses gains seraient dix fois supérieurs à ce que le système actuel lui permet de toucher. Le tout, en divisant son prix de vente par près de quatre… Concrètement, un jeu vendu 15 euros lui rapporterait 10 euros en droits d’auteurs, contre 1 euros aujourd’hui, au prix de 40 euros!

Tous, nous avons un jour ou l’autre échangé des fichiers numériques (je dis échanger pas pirater!). Plus jeunes (en tout cas pour moi), j’avoue mon délit : j’ai copié des chansons qui passaient à la radio avec mon enregistreur cassette…. Pas vous ? Au regard de Hadopi, je suis, nous sommes tous des pirates. Des délinquants. Va-t-on sauver la culture et les auteurs en supprimant l’accès Internet à tous les délinquants que nous sommes? Bien évidemment non, à moins de croire ou de laisser croire que les ennemis de la culture et de la création sont ceux qui la diffusent et la font vivre.

Signer le Pacte pour les libertés numériques c’est notamment refuser la simplification du débat et refuser d’opposer les auteurs à leur public.

Signer le Pacte pour les libertés numériques, c’est obliger nos responsables politiques à faire l’effort d’un peu d’imagination et surtout, pour une fois, à être un peu artistes politiquement, et pour une fois, à être créateurs de propositions qui constituent de véritables solutions.

En tout état de cause, que notre ministre soit rassurée, pour le moment, il n’y a aucun risque qu’elle se voit pirater ses idées !

Sandrine Bélier, tête de liste Europe Ecologie Région Est

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