OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Lui, président, implantera-t-il des fab labs ? http://owni.fr/2012/12/06/lui-president-implantera-t-il-des-fab-labs/ http://owni.fr/2012/12/06/lui-president-implantera-t-il-des-fab-labs/#comments Thu, 06 Dec 2012 16:35:13 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=127016

Jean, nouvel utilisateur du Fac Lab, le fab lab de l'Université de Cergy basé à Gennevilliers, fabrique une sculpture en bois (inspiré d'une oeuvre de George W Hart) avec la découpe laser . Le 6 décembre 2012. (cc) Ophelia Noor

Enfin ! Les fab labs et autres lieux dédiés à la fabrication numérique personnelle, sont arrivés aux oreilles du gouvernement français. Ce matin, une table ronde était organisée au cabinet de Fleur Pellerin sous la houlette d’Aymeril Hoang, conseiller innovation et économie numérique de la ministre déléguée aux PME, à l’Innovation et à l’Économie numérique.

Les fab labs en route vers le Grand Soir

Les fab labs en route vers le Grand Soir

Le Parti communiste français met le nez dans les fab labs. Avec comme une vieille envie de se remuer un peu le logiciel. Et ...

Intitulé “Développement des fab labs en France”, le séminaire avait surtout pour but de présenter deux visions de la fabrication personnelle, entre gros sous et visées moins directement lucratives. La quarantaine de participants étaient issus du ministère, de l’industrie comme PSA ou SEB et du microcosme numérique start-upers incontournable tel FaberNovel.

Fabien Eychenne de la Fing a d’abord présenté les fab labs, puis Emmanuelle Roux et Laurent Ricard ont exposé un cas concret avec leur FacLab, premier fab lab porté en France par une université. Enfin, Mark Hatch, le DG de TechShop, une chaine d’ateliers géants pour bricoleurs très pointus, est revenu sur sa société. La rencontre était d’ailleurs motivée par la venue de Mark Hatch, il ne s’agissait pas d’une initiative du cabinet.

L’entrepreneur a dévoilé ses plans de déploiement, en présence de Paul Duggan, en charge du développement en Europe : Paris, Londres, Milan… sont en ligne de mire, entre autres.

TechShop, s’il met en avant son côté communautaire – mais quelle société qui ne vit pas sur la planète Mars ne le fait pas ? – est une entreprise classique, déjà forte de six ateliers, tous aux États-Unis. Elle vise maintenant le vieux continent, forte de l’engouement pour la fabrication personnelle, dont les possibilités ont été décuplées par les machines-outils assistées par ordinateur et la force de partage et d’entraide propre à Internet. Elle se décrit ainsi :

Studio de prototypage et de fabrication, hackerspace, centre d’apprentissage, TechShop offre l’accès à de l’équipement et des logiciels d’une valeur d’un million de dollar.

Son appétit de déploiement rappelle celui des pionniers du PC dans les années 70-80. On va changer le monde, en se faisant des dollars au passage, pour votre bien et celui de l’économie en général puisque les TechShops sont des endroits idéaux pour faire du prototypage rapide et donc incuber son entreprise, entre autres. Le premier a d’ailleurs ouvert en 2006 à Menlo Park, au cœur de la Silicon Valley, où les hackers-futurs entrepreneurs tripatouillaient les machines au Homebrew computer Club. Google y serait aussi né, dans un garage bien sûr.

Success story

Devant les petits frenchies, Mark Hatch a fait la démonstration de son gros potentiel avec une présentation bien calibrée illustrée d’exemples propres à faire rêver. Une rafale de chiffres à faire pâlir en cette période de crise. Les participants ont pu voir la photo d’Obama au bureau oval tapotant sur son iPad avec une coque DODOcase. Le prototype du DODOcase a été conçu pour moins de 500 dollars et faisait cinq mois après son lancement 1 million de dollars de CA. Sans le TechShop, son idée serait restée au placard puisque sa réalisation requiert une machine qui coûte 25 000 dollars. Il a juste dû payer des frais d’entrée, 125 dollars par mois ou 1 395 dollars par an. Même parcours étincelant pour Square, un lecteur de carte de crédit que l’on branche sur son mobile ou sa tablette. Deux millions d’Américains l’utilisent maintenant, en versant au passage à chaque transaction une commission de 2,75%.

L’entreprise incarne l’état d’esprit maker, si cher aux Américains : une foi en la capacité créatrice qui a fait le succès du modèle américain, cette idée d’une nation qui se forge elle-même. Son slogan en témoigne :

Build your dream here. What do you want to make ?

En face, pour représenter les fab labs, nous avions donc Emmanuelle Roux et Laurent Ricard. Une tout autre vision, même si les deux types de lieux permettent de faire du prototypage rapide et de faciliter de façon générale l’innovation ascendante et la créativité. Déjà, c’est moins l’usine : les machines y sont plus modestes et la dimension reste humaine alors qu’un TechShop fait 1 500 m2.

Gros sous vs charte

Surtout, les fab labs s’appuient sur une charte où les valeurs de partage, d’ouverture, d’entraide et d’éducation sont fondamentaux. On y privilégie les formats ouverts, qu’il s’agisse du logiciel ou du matériel. Ce qui ne veut pas dire pour autant qu’on ne puisse pas y faire développer un produit pour développer derrière une activité, mais ce n’est pas le but final :

Secret : les concepts et les processus développés dans les fab labs doivent demeurer utilisables à titre individuel. En revanche, vous pouvez les protéger de la manière qui vous choisirez.

Business : des activités commerciales peuvent être incubées dans les fab labs, mais elles ne doivent pas faire obstacle à l’accès ouvert. Elles doivent se développer au-delà du lab plutôt qu’en son sein et de bénéficier à leur tour aux inventeurs, aux labs et aux réseaux qui ont contribué à leur succès.

En théorie, les fab labs sont ouverts et gratuits, dans la réalité, c’est parfois un mix des deux, car il faut bien financer l’endroit. Au Fac Lab, c’est totalement gratuit, mais trois formations autour des fab labs vont être proposées pour assurer des revenus en ces temps de disette de fonds publics.

Les différentes étapes de la fabrication de la sculpture en bois (inspiré d'une oeuvre de George W Hart) avec la découpe laser , en passant par le logiciel de modélisation 3D et la découpe de bois. Le 6 décembre 2012 au Fac Lab de Gennevilliers. (cc) Ophelia Noor

Nos deux intervenants ont souligné ces dimensions propres aux fab labs, explique Emmanuelle Roux, en particulier l’aspect éducatif :

J’ai insisté sur l’importance de permettre aux plus jeunes d’accéder à ce genre de lieu. Et il faut mailler tout le territoire, ne pas se cantonner à Paris.

Avis à Vincent Peillon, notre ministre de l’Education qui souhaite refonder l’école, chapitre 42. Aux États-Unis, une association comme School Factory essaye déjà depuis quelques années d’amener ce type de lieu dans l’école, pour favoriser l’apprentissage par le faire, en mode projet et dans une optique de partage des connaissances. Bref l’envers du système français actuel.

S’appuyer sur les EPN

Emmanuelle Roux a attiré l’attention sur les nombreuses structures publique déjà existantes, mairies, écoles et surtout EPN (espace public numérique), qui pourrait accompagner ce développement. Incubateur de fab lab, voilà une belle reconversion potentielle pour les EPN.

Apparemment, le message est passé : “Aymeril Hoang m’a dit qu’il en parlerait à la ministre, il a évoqué la possibilité de visiter le FacLab. Il souhaite aussi avancer la réflexion sur les EPN.” Owni est ravi, qui a sollicité le cabinet de Fleur Pellerin pour une table ronde sur le sujet le mois dernier, ainsi que celui de Montebourg, sans succès.

L’impression 3D vend son âme

L’impression 3D vend son âme

Le fabricant d'imprimante 3D grand public MakerBot incarnait la possibilité d'un business model basé sur l'open ...

Les préoccupations des industriels n’étaient pas forcément sur la même longueur d’onde. Non pas que ces représentants aient découvert le sujet : travaillant sur la R&D, ils étaient déjà bien sensibilisés. En revanche, les questions de propriété intellectuelle les préoccupent davantage. “Seb était inquiet à l’idée de se faire copier, je leur ai expliqué qu’ils ne pourront pas l’empêcher”.

L’exemple de MakerBot, qui a mis de l’eau propriétaire dans son vin open source, parce que des fonds ont mis gros dessus, n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd : pour faire du cash, il faut fermer les modèles ont compris certains dans un raccourci erroné. Les nouveaux outils ne servent à rien si les schémas mentaux et économiques sont toujours ceux du 20e siècle.

Si la Chine ou la Russie se sont déjà engagées dans des plans de subventions à ce type de lieux, tout reste à faire en France. Plus que les sommes mises sur le tapis, l’orientation qui sera choisie sera décisive, création d’euros ou de valeur sociale.

On attend avec impatience le positionnement d’Arnaud Montebourg, qui vantait la troisième révolution industrielle que les fabs labs sont censés porter. Qui sait, François Hollande annoncera peut-être lors de son grand rendez-vous avec la presse :

Moi, président, j’implanterai des fab labs sur toute la France.


Photos par Ophelia Noor. Réalisées au Fac Lab, le fab lab de l’Université de Cergy basé à Gennevilliers, le mercredi 5 décembre 2012.

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Vers une fiscalité des données http://owni.fr/2012/11/28/vers-une-fiscalite-des-donnees/ http://owni.fr/2012/11/28/vers-une-fiscalite-des-donnees/#comments Wed, 28 Nov 2012 18:48:53 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=126758

“Les données personnelles sont le nouveau pétrole de l’internet”. Et pourquoi pas aussi le levier d’une nouvelle fiscalité en France ? Selon nos informations, la mission chargée de réfléchir à une “fiscalité du numérique” et baptisée “Colin et Collin” du nom de ses deux auteurs, s’oriente vers une imposition déterminée par la politique des entreprises en matière de données personnelles. Qui dépasse donc largement le seul secteur numérique.

Coup de tonnerre pour tous ceux qui se frottaient déjà les mains à l’idée de prélever les seuls “GAFA” (Google, Amazon, Facebook et Apple), championnes de l’optimisation fiscale : le projet des deux rapporteurs impliquerait en effet toutes les firmes qui disposent d’informations sur leurs utilisateurs. Au-delà des géants du web, EDF, GDF, La Poste mais aussi les banques, les assurance ou les groupes de distribution alimentaire… bref ! toute activité suivant de près les faits et gestes de sa clientèle.

Une idée originale dans le débat plus connu sous le sobriquet réducteur mais significatif de “Taxe Google” et sur lequel nombre se sont déjà cassés les dents. Et qui ouvre autant de perspectives que d’interrogations, en matière de compétitivité comme de protection des données.

Fiscalité des données

Le principe est simple : plus l’entreprise met à disposition les données qu’elle récolte, moins elle est taxée.

Le tout, sous contrôle de l’utilisateur. Qui pourrait ainsi accéder librement et par lui-même aux nombreuses informations laissées aux services auquel il souscrit. Cartes de fidélité, comptes bancaires, relevés de consommation électriques ou de gaz : les exemples ne manquent pas. Et alimentent déjà de nombreuses réflexions. “Smart Disclosure” aux États-Unis, “MiData” outre-Manche ou “Mes Infos” en France : tous ces mouvement visent à instaurer le partage des données personnelles. La FING, qui pilote le projet par chez nous, le résume en ces termes :

Si j’ai une information sur vous, vous l’avez aussi. Et vous en faites ce que vous voulez.

Le “customer empowerment” (donner davantage de pouvoir au consommateur) a donc déjà fait son petit bonhomme de chemin, sans jamais servir néanmoins de terreau fiscal. C’est là que la mission Colin et Collin intervient.

Car son intérêt n’est pas là – même si elle pourra toujours s’appuyer, dans l’avenir, sur cet argument séduisant d’un open data citoyen et personnalisé. Son objectif est d’abord de repérer de la valeur. Et de l’imposer. C’est le deuxième volet de la démarche : l’espoir que cette ouverture des données génère de l’innovation. Que des entreprises se saisissent de l’opportunité pour créer de nouveaux services. De la même manière qu’on installe une application tierce utilisant Facebook, l’utilisateur pourrait par exemple autoriser que des boîtes exploitent le volume de leur consommation de gaz ou la composition de leur caddy après passage en grande surface. L’objectif d’une telle imposition serait donc incitatif, à l’instar des taxes liées à l’environnement.

Un terrain à creuser, pour y trouver un véritable filon. Pour beaucoup, la manne serait gigantesque : “28 milliards de dollars (22 milliards d’euros) [selon] le cabinet Gartner pour 2012, et 36 milliards pour 2013″ souligne Julie Battilana, professeure associée à la Harvard Business School, dans un article paru il y a peu dans Le Monde et qui se penchait précisément sur la “mine d’or du Big Data”. Même son de cloche du côté du cabinet McKinsey, souvent cité en la matière, qui y voit “la prochaine frontière pour l’innovation, la compétition et la productivité”.

e-TVA

Un modèle qui aurait en plus l’avantage de s’étendre : si Facebook, Twitter, Google et consorts en font d’ores et déjà leurs fonds de commerce, l’ensemble des secteurs économiques exploitent aussi d’immenses bases de données, issues de leur clientèle.

Autant dire que si elle se concrétise, la piste privilégiée par la mission fiscalité numérique frappera un grand coup. A la manière de la TVA, dont se réclamait récemment l’un de ses rapporteurs, Nicolas Colin, dans les pages de Telerama :

Dans les années 1950, face à la complexification des échelles de production, on a créé la TVA, un impôt complètement nouveau. Aujourd’hui, c’est celui qui rapporte le plus d’argent à l’Etat. Il nous faut quelque chose d’aussi structurant.

Contacté par Owni, l’énarque refuse de communiquer avant toute publication du rapport. Mais le sujet ne lui est pas étranger. Bien au contraire.

Dans L’Âge de la multitude, co-écrit avec l’entrepreneur Henri Verdier, Nicolas Colin tentait déjà de trouver “la définition d’une fiscalité propre à l’économie de la multitude”. Autrement dit de cette masse d’individus connectés dont les créations et les interactions sont présentées comme générateurs de la précieuse “la valeur” :

[...] un État est fondé à imposer les revenus issus de l’activité en ligne de la multitude qui réside sur son territoire. Il s’agit d’une sorte d’impôt sur la multitude : un impôt sur la valeur créée par les résidents sur le territoire mais captée par une entreprise privée.

Pas gagné

CQFD. En ce qui concerne l’idée. En pratique, la suggestion d’une fiscalité des données risque d’être consciencieusement bousculée si elle se confirme lors du dépôt des conclusions de la mission, en décembre prochain.

Les détails de sa mise en œuvre, en particulier, risquent de compliquer la tâche. “L’esprit de la démarche est ambitieux et pertinent mais l’application me semble très complexe”, confiait un proche du dossier à Owni. Comment mesurer l’ouverture des entreprises ? La taxe va-t-elle être calculée en fonction de cette ouverture ou en fonction du nombre d’utilisateurs du service ? Les interrogations pratiques sont légion.

L’impact, au-delà des frontières du web, risque aussi de faire des vagues. Pas sûr que les entreprises françaises apprécient d’être enrôlées dans une réflexion lancée pour tacler en priorité les Yankees du Net. Surtout qu’il s’agit ici d’ouvrir le porte-monnaie. Et que le climat actuel est plus propice à une guerre de territoires et d’influence, chaque secteur cherchant à reporter sur le voisin la charge de son financement. C’est particulièrement vrai pour la culture ou les fournisseurs d’accès à Internet (FAI), mais ça l’est aussi pour la presse, qui cherche à ponctionner une partie du trésor de Google.

Reste aussi à savoir ce qu’en pense l’une des principales concernées par le sujet, à savoir la Cnil. Car qui dit “données personnelles” dit supervision de la gardienne de la vie privée. Gardienne qui, toujours selon nos informations, n’auraient pas encore eu la possibilité d’échanger avec la mission fiscalité numérique sur des pistes qui la concernent pourtant au premier plan. Et qui nécessiteraient, si elles sont appliquées, une sérieuse révision de ses moyens. Contactée par Owni, la Cnil n’a pas donné suite à nos sollicitations.

Il y a quelques jours, la Présidente de l’institution, Isabelle Falque-Pierrotin déclarait néanmoins dans une table ronde organisée par Google : “les données, c’est le carburant de l’économie numérique”. Signe que la Cnil prend en compte le potentiel compétitif des données. Et que la porte n’est donc pas complètement fermée aux propositions de la mission Colin et Collin.


Illustration Pixel Fantasy [CC-byncnd]

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http://owni.fr/2012/11/28/vers-une-fiscalite-des-donnees/feed/ 32
La “négation de la démocratie” du sénateur Marini http://owni.fr/2012/11/13/la-negation-de-la-democratie-du-senateur-marini/ http://owni.fr/2012/11/13/la-negation-de-la-democratie-du-senateur-marini/#comments Tue, 13 Nov 2012 10:17:38 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=125767

Ce lundi soir, Philippe Marini, président de la commission des finances du Sénat, répondait aux questions des internautes sur une bulle vidéo Google+ (ce qui est assez drôle en passant, au vu de ce que Google encaisse en ce moment) et sur YouTube. Modéré (et motivé ?) par Erwann Gaucher, Antoine Bayet, Richard Menneveux et Guillaume Champeau, le sénateur de l’Oise présentait sa “fiscalité numérique neutre et équitable”. Florilège des questions sur la concurrence, l’optimisation fiscale des géants du web et leurs bénéfices records.

Le point de départ

La position de Marini est assez claire (sur le site du Sénat en tout cas) : les profits qu’engrangent les grandes entreprises du Net grâce à la fiscalité est devenue “une véritable question de société”. Il explique :

Les médias ont popularisé le sujet et évoquent de plus en plus les montages fiscaux et les sommes soustraites par ces entreprises, du fait des insuffisances de législation.

Les insuffisances de législation taclées par Marini ne sont autres que la facilité (la dextérité ?) avec laquelle les géants du Net vont chercher de meilleurs taux d’imposition au Luxembourg et en Irlande, et jouent avec la TVA sur les biens immatériels. Stratégies infaillibles. Le cas d’Apple ayant payé 7 millions d’euros d’impôts en France alors qu’il ne déclare “que” 257 millions d’euros de chiffre d’affaires (officiellement, puisqu’officieusement, ses revenus français avoisinent 3,5 milliards), est édifiant. Google l’est tout autant et il y a fort à parier que Microsoft, sous le coup d’un contrôle fiscal – et d’une descente musclée d’officiers de police judiciaire – en juin dernier, fasse les frais d’un redressement du même ordre que celui demandé à Google.

Le point Lex Google

Lex Google pour les nuls

Lex Google pour les nuls

Si les éditeurs de presse français n'ont pas encore déclaré officiellement la guerre à Google, le manège y ressemble. ...

Philippe Marini, interrogé par Antoine Bayet, précise dès le départ : l’origine des travaux émerge de la situation des finances publiques et du souci de “voir les assiettes fiscales les plus modernes (sic) échapper à une taxation”. La poursuite de cette mission a été le jeu d’auditions des acteurs : Dublin pour Google, Londres et Rome pour rencontrer les parlementaires et Bruxelles au lendemain de la Lex Google allemande pour participer à un forum organisé par des professionnels de grands groupes de services d’information et de culture. Devenu président de la commission des finances, Marini ne chôme pas et il l’assume.

Quelle est la ligne à ne pas franchir pour un parlementaire concernant la Lex Google a été le premier point soulevé par Guillaume Champeau de Numerama : pour justifier une redevance, la Lex Google oblige à créer un droit voisin, supérieur au droit d’auteur pour protéger les oeuvres et ajouter des interdictions. Effectivement, Cédric Manara, juriste spécialiste de la propriété intellectuelle et d’Internet, expliquait sur Owni :

C’est la création d’un droit qui protège les sociétés de presse. Même si elles publient trois ou quatre lignes sur n’importe quelle actualité, elles sont de fait protégées. Non pas pour leur contenu, mais en leur qualité d’organisme de presse. C’est la création d’un droit équivalent au système de l’Ancien régime, la création d’un privilège. Pourquoi protéger un organisme de presse plutôt que d’autres contenus ? C’est un problème. Et si c’est ça la politique actuelle à l’heure du débat sur la propriété intellectuelle à l’heure du numérique, alors ce n’est pas bon signe.

La ligne rouge, expliquée par le sénateur, est surtout la possibilité de faire comme les Allemands en créant un droit à l’indemnité : “si les deux parties, éditeurs et agrégateur ou moteur de recherche, sont d’accord, c’est très bien”. Si les deux parties ne s’entendent pas, les tribunaux pourraient intervenir pour valoriser ce que “l’agrégateur devra reverser à l’éditeur ou l’auteur du contenu, le texte ne se prononce en rien sur la valorisation ou l’évaluation des droits”. Ah.

Mais “si Google réplique ?” demande Erwann Gaucher, et supprime les sites d’informations de son moteur de recherche ? “Quand on écoute Google, et il faut toujours écouter toutes les parties dans un sujet complexe, la réalité apparait elle-même quelque peu nuancée” répond Marini. Nuancée ? Oui, parce que Google dit que son moteur de recherche et Google News ne font pas apparaître d’insertion de publicité de manière directe ou systématique. Mais la réponse de Google ne tient pas compte du fait qu’elle est aussi une société dont la finalité est “la captation du marché publicitaire” précise le sénateur :

L’exploitation des supports publicitaires sur la toile est le coeur du réacteur Google, tout le monde le sait et c’est une évidence et il y a là une réalité qui peut rendre complexes les évaluations des dommages versés à des éditeurs dont les contenus seraient exploités à des fins différentes de celles pour lesquelles ils ont été conçus. La menace de représailles qui émane de Google et qui a un carcatère très antipathique est à l’opposé de l’image que voudrait donner la firme. La menace publique est assez difficile à accepter et je mesure mes mots. Cette réaction assez déplorable a été un peu comme un masque qui tombe, un masque de bonne intention.

Nous n’aurons pas la réponse du cas où Google répliquerait. Dommage.

Le point fiscalité numérique

À la Lex Google succède celui sur la fiscalité numérique, enchaînement limpide : après discussion sur la possibilité de taxer une entreprise telle que Google pour son indexation des sites de presse et les enjeux d’une telle mesure, rien de tel pour continuer que de définir les politiques fiscales. En l’occurrence Philippe Marini attend avant tout de l’exécutif (en félicitant “le pouvoir” de la mission dite Collin et Colin – du nom de leur rapporteurs – et la mission “très ambitieuse” confiée à Pierre Lescure sur l’acte II de l’exception culturelle à la française) qu’il prenne position et agisse sur trois plans distincts : national, européen “qui suppose d’exprimer une volonté et de se placer clairement dans la logique de l’axe franco-allemand” et mondial “pour faire évoluer les concepts de la fiscalité”. Le chantier est bien vaste.

Richard Menneveux a fait parvenir une question sur les pouvoirs de l’État en matière d’action pour développer une fiscalité européenne ou pour appliquer une autre fiscalité. Développer une fiscalité européenne c’est avoir un poids conséquent donc. Appliquer une autre fiscalité c’est utiliser la législation française en prenant garde de ne froisser aucun des acteurs. La diplomatie reste de mise, même quand il s’agit de milliards et pour Philippe Marini, rien ne différencie l’optimisation fiscale et la fiscalité du secteur numérique aux autres secteurs. Seulement :

Il existe des interlocuteurs très puissants avec une claire conscience de leurs intérêts et qui font de l’arbitrage de législation. On ne saurait leur reprocher, peut-être d’un point de vue moral, mais ce n’est pas leur première motivation. D’après ce que nous savons d’un journal satyrique du mercredi, l’administration fiscale française a entrepris une campagne de vérification auprès d’un certain nombre de groupes et pas seulement Google. S’agissant de Google, on évoque un enjeu supérieur au milliard d’euros en droit à redresser. Mais ayant lu l’article je crois que ces informations sont puisées auprès d’une bonne source. [...] Le fisc français est tout à fait dans son rôle lorsqu’il s’efforce de reconstruire la réalité économique au-delà des apparences juridiques et s’appuie sur la notion d’abus de droits.

La question – pour Guillaume Champeau – se pose aussi hors les optimisations fiscales et autres manipulations de trésorerie “scandaleuses” : même en s’attaquant à la fiscalité des grands groupes, “c’est pas plus facile que d’aider les petites entreprises à devenir grandes ?”

La tentation de glisser sur la Google à la française – ou à l’européenne – est bien grande, tentation sur laquelle ne glissera pas le sénateur. Il expliquera quand même que l’Europe “bat sa coulpe” parce que les problèmes économiques et le système ont fait défaut pour concurrencer le géant de la recherche en ligne. Et ce, même si certains régimes fiscaux favorisent l’innovation “comme pour les entreprises innovantes” et que le sénateur reste sceptique sur ces mesures d’une “grande complexité” :

Un écosystème permettant de faire émerger de grands acteurs est-il possible ? C’est une question qui demeure ouverte. On ne peut pas se satisfaire d’une situation où l’on dépend complètement d’un algorithme fait ailleurs ou de clés d’accès pour certains programmes qui peuvent être utilisées et où les conditions peuvent varier de façon arbitraire.

“Négation de la démocratie”

“Google est un contre-pouvoir politique”

“Google est un contre-pouvoir politique”

Le patron de Google, Eric Schmidt, était reçu par le président français avant-hier. Sur la table, un dossier législatif ...

Mais le calendrier de la législation est un calendrier lent, loin de celui du web ; et le sénateur est bien impuissant à expliquer que les discussions avec l’OCDE peuvent prendre 5 à 10 ans avant d’aboutir, quand la directive qui permettra de taxer les entreprises vendant de l’immatériel dans le pays de l’acheteur commencera à entrer en vigueur en 2015 jusqu’en 2019. “Le différentiel entre le taux de TVA français et celui du Luxembourg, c’est une hémorragie” pour la France ajoute le sénateur.

Et de préciser suite à une question Twitter que l’État perd 500 millions en ressources et un peu moins d’un milliard en TVA. Soit pour Philippe Marini, 1,3 milliard d’euros de manque à gagner. Mais le temps numérique encore une fois est un temps rapide et “ces chiffres progressent vite parce que le marché publicitaire sur le net est en forte expansion – 15% par an en ordre de grandeur – donc les enjeux sont extrêmement croissants”.

Conclusion “le sujet est extrêmement difficile [...] mais en même temps c’est un sujet qui concerne l’ensemble des internautes, donc le grand public et c’est même presque un sujet de société car des entreprises, aussi remarquables soient-elles, qui créent et imposent leurs lois sur notre territoire dans une pure logique économique et d’optimisation fiscale, c’est une négation de la démocratie”.

À l’expression négation de la démocratie, il fallait entendre que les bénéfices devraient être également répartis grâce à une régulation et une politique bien à sa place.


Illustration par psd [CC-by]

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La presse prend cher http://owni.fr/2012/10/25/la-presse-prend-cher/ http://owni.fr/2012/10/25/la-presse-prend-cher/#comments Thu, 25 Oct 2012 11:36:47 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=123961

Mercredi matin à l’Assemblée, le député Michel Françaix présentait les conclusions de ses travaux sur les médias et la situation de la presse française, dans le cadre des auditions et votes du projet de loi de finances 2013. L’occasion pour Owni de dévoiler le contenu de son rapport (dont une copie est présente en intégralité au bas de cet article). Critique à l’égard des aides, caustique sur les journaux papiers, il est aussi tourné vers l’avenir, qui pour le député se joue sur le numérique.

Obsolète

Sur les trois sections de la mission, le rapport sur la presse est donc à la fois le plus dense et le plus véhément. Michel Françaix est catégorique :

La mutation vers le numérique s’accélère pour toutes les familles de presse, y compris pour la PQR, qui s’y trouve d’ailleurs concurrencée et dont les recettes sur Internet atteignent désormais 10% du chiffre d’affaires. [...] Dans le contexte de révolution industrielle que vit la presse, le rôle des pouvoirs publics ne doit pas être d’empêcher mais d’accompagner une mutation irréversible.

Pour le député de l’Oise, présent à la troisième journée du la presse en ligne : “l’ancien monde n’arrive pas à mourir quand le nouveau n’arrive pas à naître.” Comprendre à travers cette citation d’Antonio Gramsci (membre fondateur du Parti communiste italien, écrivain et théoricien politique), la presse papier et le régime de coopération sont obsolètes. Pour autant, la presse française est la plus soutenue.

Petite presse en ligne deviendra grande (ou pas)

Petite presse en ligne deviendra grande (ou pas)

Alors que démarre ce matin la 3e journée de la presse en ligne, organisée par le Spiil, Aurélie Filippetti était ...

Seulement, les aides ne permettent pas à un nouveau système viable pour la presse d’émerger et sur les 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires de la presse, 11% provient des aides à la presse. Et dans ce milliard, l’essentiel des ressources est à destination du modèle ancien, “indépendamment de toute réflexion sur leur finalité, leur pertinence et leur viabilité”. L’utilisation de l’argent des contribuables dans ce cadre laisse songeur. Le député cite l’exemple du versement des 50 centimes par exemplaire pour “retarder la mort de France Soir” et aux milliers d’euros dépensés pour permettre au groupe Hersant de garder la tête hors de l’eau.

En somme, les contribuables, par le biais des aides directes versées à la presse (hors TVA à 2,10 % pour la presse écrite, considérée comme aide indirecte), n’ont pas réussi à sauver France Soir et ont dépensé des sommes considérables pour … rien.

Ainsi, selon le parlementaire, les aides à la presse, vaste manne financière pour les journaux, en majorité papier, sont à remettre à plat et à redistribuer. Pour évaluer ce qu’elles représentent de nos jours, voici un aperçu de leur ventilation, le fonds stratégique de modernisation de la presse (FSMD) étant budgété à hauteur de quelques 33,5 millions d’euros pour 2013 :

On apprend également que certains titres bénéficient de l’aide au maintien du pluralisme dont L’humanité (3,08 millions d’euros en 2012), La Croix (2,94 millions) et Libération (2,87 millions) ; un pluralisme qui en 2012 se limiterait donc encore à l’offre du papier. Mais parmi ces aides, il en est une encore plus absurde et mal ciblée que les autres. L’aide au transport postal des journaux de presse écrite. Le député précise que “le coût de ce moratoire représente pour quatre titres de presse télévision deux fois plus que pour la totalité des titres de la presse quotidienne nationale”.

La Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) a répertorié dans un tableau en pages 28 et 29 du rapport ce que chacun touchait (passez le curseur sur les rectangles de couleur pour faire apparaître les montants précis) :

Subventions à la presse (2011)
en euros

Autre constat, les aides directes ne prennent pas en compte le super taux réduit de TVA pour la presse papier à 2,1%. Pour Michel Françaix, la répartition de la contribution publique par “famille de presse” hors aide postale et aide directes, soit les aides fiscales, bénéficient le plus à la presse magazine (35% des bénéficiaires) contre 24% pour la PQR et 15% pour la PQN. L’idée ? Cibler davantage et attribuer un taux de TVA réduit sur “la presse d’information citoyenne”. Autrement dit ni Gala ni Voici ni les magazines de golf, qualifié par le rapporteur de presse de loisirs ou ”presse récréative” et de fait pour lesquels le taux de TVA à 2,1% n’est pas justifié. Le député précise :

Le principe de solidarité qui sous-tend le système coopératif de distribution de la presse trouve déjà sa contrepartie dans l’application de tarifs postaux préférentiels qui bénéficient encore largement à la presse magazine.

Les taux de TVA différentiels appliqués en fonction de l’objet du journal, pourquoi pas. Même Bruxelles ne pourrait avoir à notifier la France d’un infraction au droit communautaire : la Belgique applique déjà un taux à 0% pour les quotidiens d’information générale et 6% sur les autres publications. Ce serait donc possible de taxer Voici à 7% quand Libération resterait à 2,1%.

Mutation

Mais le député ne se contente pas dans son rapport de parler de presse écrite et il souligne l’importance du passage au numérique pour une partie de la presse :

Il faut en avoir conscience, d’ici une dizaine d’année, peut-être moins, la presse quotidienne papier sera distancée par la presse en ligne. L’hypothèse actuellement retenue de diminution de la vente au numéro pour les quatre prochaines années est de 25%.

L’optimisme de Françaix pour le numérique fait chaud au coeur et il continue sur sa lancée d’une ode à la presse en ligne, en taclant au passage la presse papier : ”Trop occupé à tenter de préserver l’existant, le secteur oublie d’innover et de consentir les nécessaires investissements d’avenir”. Dommage pour les pros du secteur mais il est possible d’enfoncer le clou un peu plus loin en expliquant que les aides à l’investissement sont ”trop souvent des aides déguisées au fonctionnement”. 20 millions d’euros sur presque 1,2 milliards d’aides pour l’aide au développement de la presse en ligne. Un tout petit rien.

Parmi les obstacles restant, la TVA à 19,6 pour la presse en ligne est l’un des points qui vaut l’ire de Michel Françaix. Le même contenu sur un support différent devrait être taxé de la même manière, par souci de ”neutralité technologique”, explique le député.

Le fonds stratégique, grand lésé

Considéré par le rapporteur comme étant l’élément clé de la réforme des aides à la presse, le fonds stratégique n’est que que la fusion de “de trois fonds au sein d’un fonds, qui comporte trois sections correspondant aux fonds fusionnés”. Effectivement, pour une réforme de grande ampleur, soulignée en juin 2009 par le rapport Cardoso à la suite des États généraux de la presse, la fusion manque d’envergure.

Le fonds d’aide au développement de la presse en ligne fait partie des plus lésés du projet de loi de finances 2013 mais, si le bilan est mitigé, le ciblage des aides est ”très discutable”. Manque de transparence dans les critères d’attribution de l’aide selon le rapporteur sur le projet de loi de finances 2011 et ouverture du fonds SPEL en 2009 avec une enveloppe de 20 millions d’euros ”sans aucune réflexion préalable, ni sur son montant, ni sur son ciblage”. De quoi calmer les ardeurs des défenseurs des subventions sous perfusion, puisque le député assassine clairement le fonds et son fonctionnement :

Il en est résulté un guichet supplémentaire et un saupoudrage inéluctable des crédits. Surtout [...] les dépenses éligibles comprenaient des dépenses de fonctionnement, en particulier les salaires bruts des journalistes affectés au numérique. Ont ainsi été inclus dans le champ des dépenses éligibles des salaires de rédactions entières “réaffectées” du “papier” vers le “web”, ce qui a donné lieu à un important effet d’aubaine et gâchis d’argent public.

Avec son rapport, on dirait bien que Françaix compte mettre un coup de pied dans la fourmilière. Reste à voir si la portée des constats est à la hauteur des attentes du député. Et d’une partie de la presse.


Plf 2013


Photo du kiosque par Raph V. [CC-byncsa] remixée par Ophelia Noor pour Owni /-)

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Touche pas au grisbi du CNC http://owni.fr/2012/10/24/touche-pas-au-grisbi-du-cnc/ http://owni.fr/2012/10/24/touche-pas-au-grisbi-du-cnc/#comments Wed, 24 Oct 2012 15:09:57 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=123653

Créée en 2008 pour inclure la télévision numérique à l’effort national de soutien à la création, la TSTD est une évolution naturelle de la taxe historique sur les services de télévision (TST). En principe : ce qui est prélevé à chaque diffuseur pour permettre de financer le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC).

Tout allait bien jusqu’à ce que Free, “qui a tout compris”, ne dissocie ses offres “télévision” et “Internet” pour réduire drastiquement sa voilure à l’effort, celle-ci étant indexée au prix de l’abonnement contenant l’accès à la télévision. En séparant ses offres et en faisant reposer l’essentiel du prix de l’abonnement à l’accès Internet – collant un prix d’accès ridicule au service télé – le FAI n’est plus un acteur comme les autres du financement de la création française. Il en devient un acteur à la marge.

Pour compenser, l’État français décide donc de pondre une notification d’ajustement à sa taxe, afin d’englober également les services “Internet” des fournisseurs d’accès. Initiative très largement soutenue par le CNC, on s’en doute, pour qui “la télé, c’est Internet maitenant” et qui affiche des positions laissant peu de place à l’ambiguïté, d’abord par la voix d’Éric Garandeau, son président, ayant annoncé que 20 agences nationales du cinéma européen soutenaient la France :

On nous dit qu’il faut tout sacrifier aux télécoms car c’est l’avenir, alors que même de grands groupes se disent en ce moment que la richesse n’est plus dans les tuyaux, mais dans les contenus.

Mais aussi par la voix de Mathilde Dessane, chargée des médias :

Au même titre que pour un exploitant de salle, une personne qui bénéficie d’un service est censée être taxée pour que tout ça soit redistribué, le principe est vertueux. Il n’y a aucune raison d’exclure Internet de ce type de taxe. La cohérence du fonds de soutien est au cœur du modèle français de soutien au cinéma et à l’audiovisuel, dont l’un des traits originaux est bien la contribution de tous les acteurs de la chaîne (y compris les fournisseurs d’accès) au financement de la création française et européenne.

Un premier texte a donc été déposé par la France en novembre 2011.

On a un problème, Houston

“Halte là” signale Bruxelles, qui a estimé, sans se presser, par la voix de la Commission européenne, que le texte – dans cette version – n’est pas en accord avec la législation de l’Union. En octobre, la Cour des comptes se demandait également, prudemment mais sûrement, si la taxe était justifiée au regard de la règlementation européenne. Et de renvoyer Paris à ses études et à la rédaction d’une nouvelle notification prenant compte du caractère sacré d’Internet.

La ministre de l’économie numérique, Fleur Pellerin, affirmait déjà fin septembre que le texte allait être ré-écrit. La ministre de la culture, Aurélie Filippetti, a confirmé cette décision de retirer le texte datant de fin 2011. Les négociations étaient censées être terminées ce 21 octobre. Pour Filippetti, il est plus simple de notifier un nouveau texte avec lequel Bruxelles sera d’accord, différent dans la forme, beaucoup moins dans le fond, plutôt que d’aller batailler dans de plus longues procédures avec la Commission.

En tout état de cause, c’est pendant que la Commission européenne planchait sur les futures règles applicables au soutien au secteur cinématographique – mise en service prévue en janvier 2013 – que se sont déroulées les 22e rencontres cinématographiques à Dijon. Du 18 au 20 octobre dernier, les pros du secteur épaulés par la société civile des Auteurs-Réalisateurs-Producteurs (ARP), ont surtout milité pour accélérer la validation bruxelloise de cette TSTD version 1. Venue spécialement à Dijon, la ministre de la culture en a profité pour annoncer être déjà passée à la version 2, et de “notifier dans les jours prochains un nouveau texte”, inclus dans la loi de finance rectificative : une taxe en lien avec le chiffre d’affaires des diffuseurs.

On peut respecter les grands principes du compte de soutien et donc toute son efficacité au service du cinéma et de la création cinématographique et audiovisuelle. C’est cette position-là qui sera défendue à Bruxelles ces prochains jours avec cette nouvelle notification.

L’assiette concernée pour les fournisseurs d’accès : Internet haut débit, fixe et mobile, “assortie d’un abattement pour tenir compte de la densité audiovisuelle du web” (sic). Nous avons naturellement voulu en savoir plus sur cette densité, mais n’avons à cette heure obtenu aucune précision supplémentaire de la Rue de Valois.

Tu diffuses ? Tu finances !

Au centre des interrogations des cinéastes à Dijon, Michel Hazanavicius en tête, les négociations d’Aurélie Filippetti auprès de la Commission européenne sur cette TSTD, version 1 ou version 2. Leur ligne de défense, précisée dans leur communiqué de presse [pdf], repose notamment sur le “socle du modèle français”, c’est-à-dire (on l’aura compris) sur le financement par le diffuseur – les chaînes de télé numérique et les fournisseurs d’accès – d’un pourcentage des oeuvres.

Mais alors que les principes de neutralité fiscale et de neutralité technologique avancées par l’Europe devraient ou pourraient en tout cas s’appliquer, Florence Gastaud, déléguée générale de l’ARP, y voit un sacré paradoxe :

A l’origine, l’exception culturelle a été inventée pour résister à l’hégémonie de la culture américaine, le paradoxe actuel c’est qu’il faille se battre à l’intérieur des frontières européennes, contre les dirigeants bruxellois.

Sur le principe, le CNC n’est pas opposé à une nouvelle notification puisque “l’idée est de réécrire le texte mais sans changement radical, pour mieux faire passer le message auprès de la commission”.

Mais pourquoi se battent-ils autant ?

Pour l’argent. On comprend mieux pourquoi la bataille est rude quand on voit que les ressources du CNC ont explosé depuis deux ans. Les Echos apportaient quelques explications, aiguillés par le rapport de la Cour des comptes sur le financement du CNC :

Une telle explosion s’explique par le rendement de la taxe sur les services de télévision (TST), payée par les distributeurs de chaînes (CanalSat, Numericable et les fournisseurs d’accès Internet), qui a atteint 322 millions d’euros en 2011, soit près de quatre fois plus qu’en 2008.

Au total ce sont 786 millions de recettes pour le CNC en 2011. Contre 500 millions en 2007. Pourtant, La Tribune précise que l’État a été piocher 20 millions d’euros “suite à une demande du sénateur UMP Philippe Marini” et Free a presque cessé de payer les taxes – alors qu’il en payait 20 millions auparavant.

Lors de la présentation au Sénat des résultats de la Cour des comptes, Patrick Lefas, président de la 3e chambre précisait même que “les ressources du CNC sont ainsi passées de 528 millions d’euros en 2007 à 867 millions d’euros en 2011, soit une augmentation, inédite au sein des quelques 80 autres opérateurs du ministère de la culture et de la communication, de 46,3 %.”. Avec 93% des ressources provenant de taxes, passant de 442 millions en 2001 à 806 millions en 2011 :

La création, en 2007, de la Taxe sur les Services de Télévision “distributeurs” (TSTD) a joué un rôle majeur dans l’augmentation des ressources de l’établissement, le produit de cette taxe passant de 94 millions d’euros en 2008 à 322 millions d’euros en 2011, au point de représenter près de 40 % des recettes du CNC.

Les députés viennent de voter ce lundi un prélèvement pour le budget 2013 de 150 millions d’euros dans le cadre de la participation du CNC au redressement des comptes publics. Justifié par Jérôme Cahuzac, ministre du Budget, par le fait que “l’autonomie ne doit pas aller jusqu’à utiliser les fonds publics de manière déraisonnable”.

Le calcul est assez rapide : 150 millions prélevés sur un peu plus de 800 millions de trésorerie et 786 millions en recettes fin 2011, la ponction ne semble pas être trop gênante. À gauche ou à droite les députés étaient plutôt divisés : 22 députés de droite avaient déposé un amendement pour annuler la ponction dans les comptes du CNC. Autre motif de discorde, le plafonnement de la taxe affectée aux grands opérateurs de l’État, dont un premier amendement déposé par Gilles Carrez et Hervé Mariton a été rejeté.

Peu importe, ils en ont déposé un autre.


Photo par M4tik [CC-bync] remixée par O.Noor pour Owni.

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La TVA du livre numérique froisse Bruxelles http://owni.fr/2012/10/23/la-tva-du-livre-numerique-froisse-bruxelles/ http://owni.fr/2012/10/23/la-tva-du-livre-numerique-froisse-bruxelles/#comments Tue, 23 Oct 2012 09:35:58 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=123802 Bruxelles avait notifié à la France et au Luxembourg en novembre 2011 que le rapprochement de la TVA du livre numérique à 7% sur celle du livre papier (5,5%) était contraire au droit.

Petite presse en ligne deviendra grande (ou pas)

Petite presse en ligne deviendra grande (ou pas)

Alors que démarre ce matin la 3e journée de la presse en ligne, organisée par le Spiil, Aurélie Filippetti était ...

Début juillet 2012, la Commission ouvrait une procédure pour infraction au droit communautaire. Ce dernier précisant que la TVA devait être supérieure à 15% dans tous les pays, hormis quelques exceptions dont le livre papier et les journaux papiers à 2,10%.

Quelques trublions de la presse – comme les pure players – et l’ensemble des éditeurs ont aligné la TVA du numérique sur le papier, appliquant un principe de neutralité fiscale et de neutralité technologique : le même contenu ne peut pas être taxé différemment en fonction du support.

Bruxelles aurait bien voulu que la TVA sur le livre numérique soit à 19,6% et estime que le différentiel “est un problème, mais, dans une Union de droit, on ne règle pas les problèmes en allant contre la loi.

Selon Actualitté, la France et le Luxembourg recevront, demain 24 septembre, un avis de la Commission européenne. Et auront un mois pour se mettre à la page de la TVA.


Photo par OwniPics [CC-by-nc-sa]

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Mega enjeu http://owni.fr/2012/10/22/mega-enjeu/ http://owni.fr/2012/10/22/mega-enjeu/#comments Mon, 22 Oct 2012 05:42:14 +0000 Guillaume Dasquié http://owni.fr/?p=123439

Sûr de ses talents de communicant, Kim Schmitz (alias Dotcom) faisait mine vendredi dernier de confier à Wired le nom de son nouveau site de partage de fichiers.

Sans dévoiler l’adresse du nom de domaine, il laissait supposer qu’il s’intitulerait “Mega”. En lieu et place de MegaUpload, fermé à la suite d’une retentissante opération judiciaire menée par le FBI sur plainte de plusieurs majors américaines.

Mais les responsables qui travaillent sur le projet, et avec lesquels nous nous sommes entretenus, se montrent plus nuancés. Tel Emmanuel Gadaix, l’un des cerveaux de la nouvelle (et de l’ancienne) infrastructure, précisant que “Mega” se retrouvera bien dans la nouvelle marque mais attaché à d’autres mots.

Il nous assure que l’offre existera avant “la fin de l’année”, avec des ambitions considérables pour le marché de la musique et du cinéma en ligne :

Nous mettons en place des nouvelles mesures de sécurité. En particulier, un “client-side cryptosystem” qui chiffrera, de manière transparente pour l’utilisateur, toutes les données transmises sur le cloud. Lors du lancement, d’ici la fin de l’année 2012, nous dévoilerons nos API qui permettront aux développeurs de créer une multitude d’applications innovantes, qui utiliseront la puissance et la sécurité de cloud Mega [...] Nous allons respecter les règles du DMCA qui protègent les hébergeurs contre les actions de leurs utilisateurs.

Dans le secret de MegaUpload

Dans le secret de MegaUpload

Comptes offshore, sociétés à Hong Kong ou à Auckland, porte-parole mystère et pactole considérable dans des paradis ...

Services secrets

Si la trajectoire de Kim Dotcom dresse le portrait d’un bonimenteur 2.0 pas toujours de très bon goût, comme le montre une enquête fouillée du site Ars Technica, celle d’Emmanuel Gadaix, plus discrète, présente le profil d’un visionnaire de la sécurité des réseaux.

Entre 1993 et 1998, ses talents l’amenèrent à être régulièrement sollicité par la DST (les services secrets de sécurité intérieure français, devenus la DCRI) pour organiser diverses opérations et en particulier des tests d’intrusion.

Une tranche de vie qui se trouve résumée dans une décision de relaxe prise par la 13ème Chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de Paris, le 2 novembre 2000, pour une visite à l’intérieur d’un serveur du groupe pétrolier Exxon, réalisée à la demande des services français. Et donc pardonnée. Il était alors âgé de 33 ans.

Depuis, établi entre la Thaïlande et Hong Kong, Emmanuel Gadaix participe comme consultant à d’importants chantiers en sécurité des systèmes, loin des institutions. En marge de ses projets avec Kim Schmitz, il collabore à des travaux de recherche avec la société française P1 Security, dirigée par Philippe Langlois, l’un des papes en sécurité des systèmes d’information – le 8 octobre dernier, ce dernier présentait quelques résultats pointus en compagnie de Gadaix, lors de la dernière Hack in the box Conference de Kuala Lumpur.

Abusive

Grâce à Gadaix, sur le nouveau Mega, les administrateurs du site ne pourront pas déchiffrer les données et les opérations des personnes qui utilisent leurs services – contrairement aux responsables de Google ou de Dropbox. Avec un gros objectif à court terme : concurrencer iTunes, ni plus ni moins, grâce à une base juridique et technique sans équivalent.

Les serveurs seront dans de multiples juridictions y compris en Europe. Comme toutes les données stockées sur le serveur ne pourront être décryptées, nous pourrions même en héberger aux Etats-Unis. Nous ne le ferons pas, à titre de sanction économique tout d’abord, mais aussi par respect pour nos millions d’utilisateurs dont les données sont toujours otages du gouvernement américain.

Internet après la fin de Megaupload

Internet après la fin de Megaupload

La coupure de Megaupload a provoqué un torrent de réactions. Le problème n'est pas la disparition du site en lui-même. Il ...

Car l’homme, ainsi qu’une partie de l’entourage de Kim Schmitz, considère que l’opération judiciaire du FBI de l’hiver dernier a servi de manière abusive les majors de la musique et du cinéma. Intervenue le 19 janvier, elle précédait de deux jours le lancement de Megabox, prévu le 21 janvier.

À ce moment-là, dans un entretien accordé par Emmanuel Gadaix au site CitizenKane.fr, Megabox était présenté comme un futur iTunes sans intermédiaire, permettant aux artistes d’être directement rémunérés par leur public.

Coïncidences

Le 26 septembre dernier, Kim Schmitz s’en amusait sur sa chaîne YouTube, en diffusant une bande-annonce de Megabox qui semble avoir été produite pour le lancement initialement prévu le 21 janvier, avant d’être annulé.

Gadaix sourit. Dit qu’il ne croit pas aux coïncidences. Peu de temps avant l’arrestation de ses partenaires, il s’était rendu le 11 janvier à une invitation du Sénat français pour discuter droits d’auteur et libertés numériques – les internautes français, à eux seuls, apportaient 12% du chiffre d’affaires global de MegaUpload.

À cette occasion, il avait – nous assure-t-il – pris des premiers contacts avec les responsables d’Hadopi, en coulisses, pour préparer des négociations futures, envisagées début février. Du côté de l’Hadopi, a priori personne ne semble s’en souvenir.

Selon Emmanuel Gadaix, “pour Mega, l’objet de la discussion était de trouver des moyens de travailler ensemble pour réduire la piraterie sur le Net et pour étudier des méthodes de rémunération des auteurs grâce aux nouveaux services de Mega”, avec notamment la possibilité de domicilier en France une partie des revenus dans l’attente de définir la meilleure clé de répartition.

Pas sûr que la renaissance de MegaUpload ne ressuscite les mêmes intentions.


Illustration et couverture par Cédric Audinot pour Owni /-)

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http://owni.fr/2012/10/22/mega-enjeu/feed/ 0
Petite presse en ligne deviendra grande (ou pas) http://owni.fr/2012/10/19/petite-presse-en-ligne-deviendra-grande-ou-pas/ http://owni.fr/2012/10/19/petite-presse-en-ligne-deviendra-grande-ou-pas/#comments Fri, 19 Oct 2012 06:00:37 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=122994

La journée de la presse en ligne du Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (Spiil) commence tout juste ce matin et compte bien mettre sur la table l’inutilité des aides et subventions à la presse, notamment à travers un manifeste pour un nouvel écosystème de la presse numérique. Aurélie Filippetti, ministre de la Culture, était quant à elle auditionnée mercredi sur le projet de loi de finances 2013 (PLF 2013) à la Commission des affaires culturelles. Et si beaucoup des questions et des réponses ont tourné autour de l’avenir de France Télévisions ou du budget rogné de la Hadopi, seul Michel Françaix, le rapporteur de la mission Médias, Livre et industrie culturelle, option rapport sur les médias, glissait quelques mots sur “le problème de la presse en ligne”. Et expliquait que la presse (en général) rencontrait des difficultés depuis 30 à 35 ans, quand les aides, elles, augmentaient de plus en plus. “On a jamais donné autant d’argent par rapport au nombre de journaux vendus cette année”, expliquait le rapporteur.

Petite presse en ligne dans le PLF 2013

L’idée pour Michel Françaix : recentrer les aides vers ceux qui en ont besoin et redéfinir le taux de TVA selon les types de presse, qu’elle soit citoyenne ou qu’elle soit “autre”. Avant que le rapporteur ne livre ses conclusions la semaine prochaine, nous avons épluché le volet “aides à la presse” du projet de loi de finance 2013. Le principe des aides à la presse, en ligne ou papier, repose sur une volonté du gouvernement précisée dans le projet de loi de finances 2013 :

S’agissant du secteur de la presse, la stratégie de l’État poursuit deux objectifs fondamentaux : le développement de la diffusion de la presse et la préservation de son pluralisme et de sa diversité.

[App] Subventions à la presse: le Juste pris

[App] Subventions à la presse: le Juste pris

Retour ludique sur les subventions accordées par le Fonds d'aide à la modernisation de la presse à travers une application ...

Aider la presse à coups de versements d’aides et de crédits de quelques millions d’euros pourrait être l’intention la plus louable possible. Seulement comme Vincent Truffy (journaliste pour Mediapart) le montrait sur Owni en décembre 2010 dans l’application “Le juste pris”, deux ans après les états généraux de la presse écrite, des députés constatent que les éditeurs de journaux se sont, le plus souvent, contentés d’aller à la pêche aux subventions sans remettre en question leur fonctionnement.

Faire l’économie d’une remise en question du fonctionnement est sans doute plus simple pour les éditeurs de presse. La presse, qu’elle soit papier ou numérique, est notamment aidée par les injections de milliers d’euros du fonds stratégique de développement de la presse, le FSDP.

En 2013, ce sont donc 516 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement qui sont budgétés, les aides directes étant 22% plus élevées après les États généraux de la presse de 2011.

Dans le détail, l’AFP recevra 119,6 millions d’euros (en hausse de 2 millions par rapport à 2012). S’ajoutent 19,7 millions pour accompagner la modernisation sociale de la fabrication de la presse quotidienne et 4 millions pour la modernisation des diffuseurs. Et encore 18,9 millions pour l’aide à la distribution. Le plus gros poste : 320 millions d’euros pour le plan d’aide au développement du portage, l’aide à la SNCF pour le transport de quotidiens et 12 millions pour le pluralisme des quotidiens nationaux à faibles ressources. Dans ces 320 millions, il faut aussi compter sur les 249 millions pour l’aide au transport postal de la presse dont une compensation du manque à gagner pour La Poste de 32,4 millions.

Les 33,5 millions pour la modernisation et la presse en ligne paraissent bien petits dans les répartitions.

L’ancien fond SPEL, aujourd’hui section II du FSDP, va donc profiter de quelques milliers d’euros pour aider la presse en ligne. Ce qui pour Maurice Botbol, président du Spiil – qui organise aujourd’hui la 3e journée de la presse en ligne – et fondateur du groupe de presse Indigo (publiant entre autres La lettre A) n’est pas le problème de fond. La position du Spiil sur le sujet est claire, il faut supprimer les aides directes (subventions) qui sont, selon lui :

contre-productives, inefficaces et qui n’ont jamais été aussi élevées, comparées au nombre de lecteurs. Le système est à bout de souffle et il faut le réadapter. Inutile de continuer les aides sous perfusion.

Pure players dans la jungle

“Le fonds SPEL, en 2012, c’est un peu moins de 10 millions d’euros, les aides à la presse en ligne ne représentent presque rien, quand l’ensemble avoisine le milliard”, précise le fondateur d’Indigo. Et dans ce même fond, moins de 5% des aides est distribué aux pure players, c’est aussi parce “qu’ils n’ont pas l’habitude de remplir des dossiers d’aides contrairement à la presse traditionnelle”. Le montant maximum des subventions d’un pure player ? 200 000 euros. Contre 1 million à 1,5 million pour la presse papier.

Autre cause de cette moindre attribution, les délais de réponse. “Les délais sont longs par rapport au rythme du numérique. Et les demandes peuvent se dérouler sur 6 à 8 mois parfois”. Dernier frein mais non des moindres, le fonds SPEL refuse de subventionner le développement interne :

Ils exigent que le développement logiciel soit sous-traité. Or ne pas faire appel à un prestataire est rédhibitoire. Sauf que les pure players ne vont pas faire appel à des SSII alors qu’il est possible de le faire en interne !

Au FSDP, on confirme, “les dépenses internes n’ont jamais été prises en compte”.En plus de ce fossé entre le fonctionnement d’un pure player et l’administration chargée de distribuer les subventions, il reste ce petit détail de l’application de la TVA à 19,6 pour les pure player contre 2,1 pour le papier. Taxer différemment un contenu parce que le support de lecture n’est pas le même, une des meilleures façons d’appuyer ce que pérorent les réfractaires au journalisme web ou comment dire : si c’était vraiment la même chose, sous-entendu “aussi bien”, il n’y aurait aucune différence.

Rappelons qu’Aurélie Filippetti déclarait dans Polka en juillet dernier :

Si la presse abandonne la qualité, il n’y aura plus de différence entre les journaux, les magazines payants et la presse gratuite, notamment sur le Net où rien n’est éditorialisé.

Selon les administrations, ces aides indirectes – un taux très bas pour la presse papier – ne pourraient pas être applicables à la presse en ligne. Nicolas Sarkozy, lors des États Généraux de la presse en janvier 2009, déclarait que la France “allait poursuivre le travail de conviction engagé de ses partenaires européens pour que les taux réduits de TVA soient étendus à la presse en ligne”. Une directive européenne de novembre 2006 [pdf] précise que les taux de TVA ne peuvent être inférieur à 15% au sein de l’Union européenne, à quelques exceptions près notamment le taux de TVA à 2,1% de la presse papier. Ou le livre à 5,5 ou 7%.

En novembre 2011, la Commission européenne attirait la France vers le taux réduit pratiqué sur le livre numérique (le même que pour les livres papiers). Début juillet 2012, la Commission ouvrait une procédure contre la France et le Luxembourg pour infraction au droit communautaire. Taxer différemment un même contenu selon le support sur lequel il est lu semble pour certains éditeurs de presse (Arrêt sur images, Médiapart et Indigo) assez aberrant pour appliquer le taux réduit à 2,1% sur les ventes de leurs productions numériques. Avec pour argument les principes de neutralité fiscale et technologique. Maurice Botbol explique : “deux produits équivalents ne peuvent pas subir deux taux de TVA différents”. Raison pour laquelle il applique le taux de TVA réduit.

Mais visiblement, du côté des députés français, on s’active et un amendement au PLF 2013 [pdf] a été déposé le 4 octobre dernier. Il a notamment pour objet :

de faire bénéficier la presse en ligne du taux “super-réduit” de TVA actuellement appliqué à la presse imprimée. Actuellement, le taux de TVA appliqué à la presse imprimée est de 2,1 %, tandis que les services de presse en ligne se voient appliquer le taux “normal” de 19,6 %. Or, l’égalité de traitement fiscal est nécessaire pour accompagner la migration de la presse imprimée sur les supports numériques ainsi que l’émergence d’une presse exclusivement en ligne.

Un moyen de réduire la fracture entre la presse en ligne et presse papier.


Photo de Visualpun.ch [CC-bysa] et photo d’Aurélie Filippetti par Richard Ying [CC-by-nc-sa] remixées ~~~=:) ONoor

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Les emplois au pifomètre du gaz de schiste http://owni.fr/2012/10/08/les-emplois-au-pifometre-du-gaz-de-schiste/ http://owni.fr/2012/10/08/les-emplois-au-pifometre-du-gaz-de-schiste/#comments Mon, 08 Oct 2012 14:02:09 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=121895

Voici deux mois qu’industriels et éditorialistes défendent le gaz de schiste à l’aide de promesses d’emplois complètement fantaisistes. Le “gisement de 100 000 emplois” que représenterait l’exploitation de ces hydrocarbures profonds est le deuxième argument favori (après l’indépendance énergétique) pour balayer d’un revers de calculatrice les risques environnementaux et sanitaires des méthodes brutales d’extraction qu’elle nécessite (la fracturation hydraulique). Mais si les réserves ont été évaluées à l’aide de méthodes et de données géologiques professionnelles, le potentiel social de cette industrie l’a été avec un outil mathématique de niveau CM2.

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Après avoir révolutionné le marché énergétique américain, les gaz de schistes sont désormais convoités à travers le ...

Prédire l’avenir avec une règle de trois

L’évaluation la plus populaire sous nos climats éditoriaux est l’œuvre d’un rapport livré par la société Sia conseil. Cabinet de consulting en management, Sia compte parmi ses plus gros clients GDF Suez, partenaire de Schuepbach LLC sur deux permis d’exploration pour les gaz de schiste en France et leader du secteur. Son logo apparaît par ailleurs discrètement en pied de page de Gas in focus, “Observatoire du gaz naturel” autoproclamé, coédité par GRT Gaz, filiale à 75% du géant français des bonbonnes de propane.

Pour arriver à un bénéfice de 100 000 emplois directs et indirects grâce aux gaz de schiste, la société part d’un calcul savant portant sur les trois principaux permis du Sud de la France :

Le nombre de forages par concession ne peut pas excéder 30 forages de puits par an. Pour mémoire, aux Etats-Unis, certaines zones comportent plusieurs milliers de puits. Après avoir déterminé le profil de production d’un puits type, nous avons ensuite appliqué les niveaux d’emploi observés aux Etats-Unis sur les deux périodes de vie d’un puits : sur les trois premières années (forage), 13 personnes par puits sont nécessaires ; sur les vingt années suivantes (exploitation), il suffit de 0,18 personnes par puits. Les emplois indirects et induits représentent 1,52 emploi par puits. Nous avons retraité cette moyenne américaine des horaires de travail en France (2 080 heures annuelles aux Etats-Unis contre 1 650 en France, soit un facteur de 1,26).

Conclusion : la totalité des trois concessions représenterait un potentiel de 10 000 emplois à l’horizon 2010. Jusque là, l’analyse est fine et, sinon incontestable, efficacement argumentée.

Quand soudain, peut-être usés par la quantité de statistiques sociales brassées pour savoir combien de foreurs iraient percer le plateau du Larzac, les experts de Sia rangent leurs tableaux Excel et dégainent leur Casio :

Généralisées à la totalité des ressources françaises, ces exploitations créeraient 100 000 emplois d’ici 2020 dont 40 000 emplois industriels directs, dans une hypothèse maintenant les conditions d’exploitation retenues.

Le calcul n’est pas précisé mais nous avons pu reconstituer la formule ayant permis cette conclusion :

10% x Gaz de schiste en France = 10 000 emplois
Gaz de schiste en France = 10 000 emplois x 1/10% = 100 000 emplois

En d’autres termes, les experts de Sia conseil (jugeant que toutes les extractions de gaz de schiste sont les mêmes) se targuent de prédire l’avenir avec une règle de trois.

Fact checking

Si elle peut sembler “de bon sens”, cette idée selon laquelle “un puits est un puits” est techniquement fausse : piégé dans les roches de schiste, le gaz du même nom peut se trouver en fines couches entre 2 000 et 3 500 mètres de profondeur selon les bassins. Difficile d’imaginer qu’avec plusieurs centaines de mètres de différence, il faille autant de temps et de personnel pour forer à ces différents niveaux, selon qu’on soit en Languedoc ou en Lorraine. Et pour cause.

L’argument selon lequel les gisements seraient tous pareils sur le plan de l’emploi ne survit pas longtemps à l’analyse de l’exploitation effective des gaz de schiste aux Etats-Unis. Si la règle de trois employée par Sia conseil était juste et puisqu’elle se base sur les emplois nécessaires pour exploiter les ressources, le nombre d’emplois créés devrait être proportionnel à la production de chaque Etat.

En croisant les chiffres de production de l’Agence d’information sur l’énergie américaine et les calculs d’emplois par Etat de l’institut IHS, il apparaît clairement que les deux chiffres sont totalement décorrélés : avec deux fois moins de production, la Pennsylvanie revendiquait en 2010 près de deux fois plus d’emplois que l’Arkansas. Les deux Etats affichent cependant un bénéfice social combiné inférieur au Colorado… qui a extrait mille fois moins de gaz de schiste qu’eux en 2010 !

Autrement dit, la règle de trois s’avère un outil plutôt difficile à appliquer à une industrie dépendante d’une somme de facteurs aussi large que l’énergie.

Cela n’a cependant pas empêché cette estimation de se répandre comme une traînée de poudre, ni d’autres du même calibre mathématique. Le groupement patronal britannique Institute of Directors a ainsi fait sensation le 21 septembre en annonçant un potentiel de 35 000 emplois dans l’exploration-production des gaz de schiste. Le rapport Britain’s shale gas potential sur lequel repose ce coup de com’ expose cependant clairement sa méthode pour arriver à ce chiffre à partir d’une estimation d’une hausse de 8 % de la production grâce à ces hydrocarbures :

L’industrie gazière et pétrolière britannique assure directement et indirectement l’emploi de 440 000 personnes. En supposant que l’emploi soit directement proportionnel à la production, alors une hausse de 8 % de la production de 2011 générerait un gain de 35 000 emplois, aidant à contrecarrer les pertes liées au déclin de la production conventionnelle de pétrole et de gaz au Royaume-Uni.

Ce postulat du “tous pareils” est également à l’origine de deux estimations du think tank Iref Europe. L’auteur de l’article, qui présente un potentiel de 42 000 à 62 000 emplois, a cependant l’honnêteté de reconnaître “les limitations statistiques” de la règle de trois.

Promesses

Avant la mise en exploitation des grands gisements du Nord-Est et du Sud des Etats-Unis, des promesses d’emplois toutes aussi alléchantes avaient été formulées par les industriels. En mai 2011, un rapport était repris par le quotidien Patriot News estimant à 48 000 emplois le nombre d’embauches réalisées en 2010 grâce au développement des gaz de schiste en Pennsylvanie. Signé par le département Travail et Industrie de l’Etat, le document semblait au dessous de tout soupçon.

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A ceci prêt que le terme d’embauche n’est pas synonyme de “création d’emploi“, une nuance relevée par l’institut Keystone, dans le même rapport ! Les “embauches” remplacent en effet parfois des départs en retraite, des licenciements ou des démissions, sans augmenter le nombre total d’emplois pourvus dans la zone. Le bénéfice “réel” pour l’emploi serait en fait de 10 000 personnes sur trois ans (2008 à 2010), ce qui pèse pour moins de 10% de la hausse de l’emploi industriel dans l’Etat, selon la même source.

Avec plus de 24 000 emplois directs au 2e trimestre 2012 dans les industries extractives, la France dispose déjà de professionnels dans les différents corps de métier nécessaires au développement des gaz de schiste. Comme pour la Guyane, de nombreuses opérations de prospection sismique ou de forage mobilisent pendant un temps limité des équipes de spécialistes qui repartent aussitôt le travail fini avec leur coûteux matériel, sans créer d’autre richesse sur le territoire que celle liée à leurs besoins quotidiens.

De quoi sauver une filière, peut-être. Mais pas de quoi s’attendre à un autre boom que celui qui fait trembler le sous-sol lors de la fracturation hydraulique.


Photo par Arimoore [CC-by-nc-sa] via Flickr

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Tragédie sanitaire en Grèce http://owni.fr/2012/07/26/tragedie-sanitaire-en-grece/ http://owni.fr/2012/07/26/tragedie-sanitaire-en-grece/#comments Thu, 26 Jul 2012 14:27:53 +0000 Camille Gicquel http://owni.fr/?p=116976

Une banque de sang réservée aux Grecs. Le parti d’extrême droite Aube Dorée, qui a fait son entrée au Parlement le 16 juin dernier en obtenant 7 % des voix, mène actuellement une campagne de “préférence nationale” poussée à l’extrême. Le parti tente d’encourager les donneurs de sang grecs à réserver leurs dons pour leurs seuls compatriotes.

“Tous les flacons de sang que nous recueillerons seront destinés à des patients que nous aurons nous-mêmes choisis et à personne d’autre” a déclaré le parti dans un communiqué le 11 juin dernier.

Des affiches ont ainsi été placardées dans le quartier athénien de Loutsa, et de nombreux donneurs de l’hôpital Sotiria ont exprimé le souhait que leur sang soit réservé aux “Grecs d’origine”, rapporte le journal Athens News dans un article du 12 juillet. Les autorités ainsi que le directeur de l’hôpital, Yiannis Stefanou, se sont opposés à ces demandes, rappelant que le sang serait donné à tous les patients dans le besoin “sans considération de race, de couleur ou d’opinions politiques”.

Cette provocation est d’autant plus inquiétante qu’elle arrive alors que le pays connaît depuis plusieurs mois une crise économique sans précédent, à laquelle s’est ajoutée violente une crise sanitaire et sociale.

Le retour de la malaria

Selon le Centre de contrôle et de prévention des maladies (Keelpno) , la Grèce voit une augmentation notable du nombre de malades depuis 2009. Entre 120 et 130 cas de malaria ont été rapportés en 2011. “Les patients atteints de cette maladie n’ont pourtant pas quitté le pays durant les cinq dernières années” précise Reveka Papadopoulos, directrice de Médecins Sans Frontières (MSF) en Grèce. La maladie avait disparu du pays depuis une quarantaine d’année.

Le virus du Nil occidental a également fait des ravages, tuant 35 personnes en 2010 selon Reveka Papadopoulos. Le Keelpno a même été enregistré un pic de contamination à l’automne 2011, 101 cas de contamination et 9 décès ont été comptabilisés. Les chiffres de l’OMS montrent une forte propagation de la rougeole et de la coqueluche entre 2009 et 2010. Si les nations européennes se sont engagées à éradiquer ces maladies par des campagnes de vaccination, le nombre de cas rapportés ont respectivement augmenté de 7 350 % et 137 % sur la période, passant de 2 à 149 et de 27 à 64.

Représentatif du malaise social de la société grecque, le nombre de suicides a très rapidement progressé ces dernières années. Le Ministère de la santé grec a observé une augmentation de 40% au premier semestre 2011 par rapport à 2010. Le pays est passé de 2,8 suicides pour 100000 habitants en 2007 à 3,5 pour 100000 en 2009, alors même qu’il occupait les derniers rangs des pays pour cette statistique.

Explosion du VIH

L’augmentation la plus inquiétante concerne le VIH. Entre 2010 et 2011, le nombre de nouvelles contaminations a augmenté de 57% dans l’ensemble du pays selon le rapport d’activité 2012 des Nations-Unies concernant la Grèce. Sur la même période, le centre ville d’Athènes a même connu un bond record de 1 250% selon Médecins Sans Frontières (MSF). Les toxicomanes sont particulièrement concernés : avec 20% de consommateurs d’héroïne en plus en 2010 selon le centre de contrôle et de prévention des maladies, et la suspension du programme gouvernemental permettant aux drogués de disposer de seringues stériles, le constat n’est malheureusement pas surprenant. Coupes budgétaires obligent, la distribution de préservatifs aux travailleuses du sexe a également été suspendue.

La situation de la Grèce est d’autant plus préoccupante quand on la compare à un pays ayant été brisé par la rigueur : en pleine crise de la dette souveraine en 2008, l’Irlande n’a pas connu une telle poussée des maladies infectieuses et du Sida. Le graphique ci-dessous représente le nombre de nouveaux cas de VIH depuis 2007 en Grèce et en Irlande. (Il est possible de sélectionner des couleurs différentes afin de distinguer les deux pays.)

Contacté par Owni à l’occasion de la conférence internationale sur le sida qui se tenait du 23 au 27 juillet à Washington, Eric Fleutelot, directeur général adjoint de Sidaction assure que le cas grec est unique en Europe :

Les politiques de répression ont toujours favorisé le développement des épidémies. C’est la conséquence d’un appauvrissement de la population et de la baisse des dépenses de santé de l’État. Mais maintenant la Grèce fait marche arrière dans l’accès à la santé, elle régresse. Concernant le VIH, sa situation est semblable à celle des nouveaux entrants comme la Roumanie et la Bulgarie. C’est la première fois en Europe que l’on voit ce phénomène. L’Irlande, qui a connu une crise très grave en 2008, n’a pourtant pas connu de telles conséquences. Les mesures ont été moins difficiles et ont été appliquées moins longtemps.

Rigueur budgétaire

La crise économique qui frappe actuellement la Grèce n’est en effet pas étrangère à cette situation. Le pays accumulait une dette de 165.3 % en 2011 contre 142.8 % l’année précédente. Le déficit pour sa part était revenu à 9.1 % en 2011 contre 10,5 % l’année précédente sous l’effet de la “cure d’austérité” imposée par la Banque Centrale Européenne (BCE), la commission européenne et le Fonds Monétaire International (FMI).

Le gouvernement n’épargne donc aucun poste budgétaire. Suite à une augmentation annuelle moyenne de 6 % des dépenses de santé (publiques et privés cumulées) entre 2000 et 2009, les experts estiment que celles-ci ont diminué de 6.5% dans le pays en 2010. Plus concrètement, les dépenses de santé par habitant sont passées de 3 078 $ en 2008 à 3 015 $ en 2009, et à 2 729 $ en 2010 selon la banque mondiale. Des chiffres sans commune mesure avec ceux de la France qui affichait 4 941 $ en 2008, 4 840 $ en 2009 et 4 691 $ en 2010. (cf. le graphique ci-dessous qui présente les dépenses de santé entre 2007 et 2010 en Europe).

Grecs d’ethnie grecque

Porté par la situation économique difficile, le parti d’extrême droite Aube Dorée joue de la crise sanitaire pour stigmatiser les populations migrantes. Outre la campagne concernant le don du sang, il propose d’autres initiatives afin de privilégier les “Grecs d’ethnie grecque” telles que les épiceries solidaires pour les personnes en difficultés. Mais comme l’explique Eric Fleutelot, directeur général adjoint de Sidaction :

Dans la crise grecque, certaines populations sont stigmatisées. Les photos des travailleuses du sexe séropositives publiées dans les médias ont renforcé ce sentiment. Ce genre d’évènement consolide l’idée que le sida ne concerne que les prostituées, les usagers des drogues et les étrangers, ce qui est évidemment faux. Le VIH est toujours la maladie des étrangers, c’est une représentation qui ne change pas. C’est la maladie de l’autre. En Afrique noire, le VIH est la maladie apportée par les blancs, en Grèce ils considèrent qu’elle vient des étrangers.


Photographie par Agelakis (CC-byncsa)

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