OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Amazon balance Apple http://owni.fr/2011/12/08/amazon-derriere-la-plainte-dapple/ http://owni.fr/2011/12/08/amazon-derriere-la-plainte-dapple/#comments Thu, 08 Dec 2011 16:09:42 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=89822 Selon des sources internes à la Commission européenne, Amazon a fortement encouragé l’enquête pour soupçon d’entente illégale ouverte avant-hier contre Apple et cinq grands éditeurs. Les instances européennes suspectent Apple et les éditeurs de s’être concertés pour maintenir un prix artificiellement gonflé du livre numérique. Au terme de leurs tractations, les éditeurs espèrent ainsi protéger la distribution du livre papier vendu à un prix voisin du numérique. En contrepartie ils s’engagent à ne pas vendre leurs livres moins chers que sur l’iBook Store.

Soupçons

Une source proche du dossier nous a confié que des représentants d’Amazon avaient attiré l’attention des commissaires européens sur l’étrange façon de se comporter des éditeurs, dont les prix s’alignent sur ceux pratiqués outre-atlantique. La procédure engagée à l’initiative de la Commission européenne vise à déterminer s’il y a bien eu entente entre le groupe Apple et Hachette (groupe Lagardère, France), Harper Collins (États-Unis), Simon and Schuster (États-Unis), Penguin (Royaume-Uni) et Verlagsgruppe Georg von Holzbrinck (Allemagne). Aux États-Unis, une procédure collective (class action) a permis des dépôts de plaintes, les unes après les autres, pour des faits comparables.

Aux yeux de la Direction générale de la concurrence, le premier soupçon vient de la frilosité des éditeurs français à l’égard des marchés du livre numérique. S’accorder avec Apple revient pour eux à protéger leur système de distribution et leurs catalogues de leurs éditions papiers. Les fonctionnaires européens ont également été alertés par le lobby des éditeurs pour “obtenir une protection légale contre l’évolution technique et la ‘désintermédiation’ par la fixation de prix de vente obligatoires pour le livre numérique, aligné sans aucune justification sous-jacente sur les prix de vente des versions papier” selon un familier du dossier.

La direction générale de la concurrence va ainsi éplucher les clauses des contrats d’agence que les éditeurs ont signé au moment de l’ouverture de l’iBook Store d’Apple en février 2010. La réglementation européenne sur le sujet n’est pas la même qu’aux Etats-Unis. Certaines clauses laissant la liberté aux éditeurs de fixer les prix de leurs eBooks ne sont pas compatibles avec le droit européen sur la concurrence. Cette clause est une des premières opérations séduction d’Apple en direction des éditeurs. Et avec l’interdiction de vendre leurs livres moins chers ailleurs, lors de l’arrivée d’Amazon sur le marché du livre numérique en Europe, les éditeurs ont pu lui imposer que leurs livres soient au même tarif que ceux présents sur l’iBook Store d’Apple.

Deux modèles

Pour Apple, le plus important consiste à vendre son propre terminal de lecture, l’iPad. Peu importe ce que pourrait contenir le catalogue, il lui faut simplement draguer tous les éditeurs et distributeurs. La présence sur l’iBook Store est indispensable.

Inversement, Amazon vend sa tablette Kindle à prix quasi-coûtant et compte bien réaliser ses bénéfices sur ses livres en Europe. Sauf si Apple s’est accordé avec les éditeurs, qu’ils soient français, américains ou anglais pour fixer un prix qui freinerait le développement du livre numérique. Quelques temps après le lancement du Kindle en France et l’ouverture de la librairie numérique d’Amazon, si le libraire, dont les parts de marché tiennent de l’hégémonie, ne peut pas attirer ses clients en puissance avec des prix défiants toute concurrence, impossible pour lui de laisser faire Apple.

En fixant ses conditions avec les éditeurs, Apple pratique sa stratégie habituelle pour empêcher ses concurrents d’exister, et récupérer leurs parts de marché. Amazon en concurrent direct n’y échappe pas : les éditeurs sont plus séduits par une conservation de leurs marges – et donc un prix d’eBook élevé – promises par Apple que par la baisse du prix de leurs livres et la multiplication des ventes au format numérique. Au détriment des lecteurs et de l’émergence et la diffusion des liseuses et des tablettes qui tendent à se démocratiser.


Illustrations par arnoKath [cc-byncsa] et Geoffrey Dorne [cc-byncsa]

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Livre numérique: quand les auteurs s’en mêlent http://owni.fr/2011/03/18/livre-numerique-quand-les-auteurs-sen-melent/ http://owni.fr/2011/03/18/livre-numerique-quand-les-auteurs-sen-melent/#comments Fri, 18 Mar 2011 13:15:40 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=52076

En octobre 2007, le Kindle d’Amazon sort. Deux ans plus tard, il est commercialisé dans plus de cent pays. Depuis d’autres tablettes sont nées et la révolution numérique en littérature est en cours, opposant numérique et papier.

Premiers concernés, les éditeurs, qui se sentent menacés. Mais un tout autre bras de fer s’est peu à peu engagé: celui entre des écrivains lésés et des éditeurs qui profitent d’un pourcentage de rémunération qui reste le même quelque soit le format, alors que les coûts de production sont plus faibles quand il s’agit de numérique.

Il ne s’agit pas d’une guerre de principe. Plutôt d’une vision d’un avenir encore incertain: les quelques 3% de vente de livres numériques représentent pour le moment une petite partie du marché. Reste que les auteurs se demandent, tout comme les éditeurs, de quoi demain sera fait. L’économie du livre va sans nul doute devoir s’adapter à la consommation et aux technologies émergentes. Si le volume du livre papier diminue et que celui du livre numérique augmente, les auteurs, qui signent la plupart du temps leurs contrats à vie, ont tout intérêt à s’occuper dès maintenant de leur rémunération et de leurs droits d’auteur.

Les 10% du prix de vente hors taxe que perçoivent en moyenne les auteurs français sur les versions papiers sont certes justifiables par les éditeurs, mais le même pourcentage semble très faible sur le numérique. En effet, la rémunération de l’auteur basée sur le livre papier se justifie par les coûts d’impression, de stockage et de manutention, inhérents à la publication d’un roman papier. Et l’éditeur touche en moyenne 20 % en fin de chaîne. Or, le livre numérique n’a pas de coûts de stockage ni d’impression. Pour le numérique, les seuls coûts sont le DRM ajouté pour éviter le piratage et l’hébergement des livres sur des librairies virtuelles. Il reste donc un peu moins de 90 % du prix du livre pour l’éditeur.

Eric Pessan, romancier, auteur de pièces de théâtre et collaborateur de remue.net, explique que la réponse de Gallimard et Flammarion à Google Books et Amazon sur le site Feedbooks ne peut pas tenir: les éditeurs français vendent en effet les œuvres au même tarif quelque soit le format. Pour lui:

Les 10% en moyenne pour les parutions papiers appliquées aux ventes numériques sont totalement ridicules : le travail d’édition est déjà fait, il suffit juste de reprendre le fichier, de le verrouiller et de le mettre en ligne. La rémunération faible de l’auteur ne se justifie plus.

Pour le moment, ce prix unique laisse la possibilité aux librairies “physiques” de rester en vie: les acheteurs ne sont de fait pas incités à préférer le format numérique. Alors pour se protéger des éventuels abus des éditeurs, la plupart des auteurs se défendent en solitaire et ajoutent des nuances à leur contrat.

Faire valoir ses droits: navigation en solitaire

La plupart sont amenés à négocier la clause numérique de leur contrat. Au cas par cas. L’an dernier, au cours du Salon du Livre de Paris, les auteurs de BD ont créé un syndicat et ainsi tenté d’anticiper les effets du numérique sur leur métier: ils demandaient une revalorisation de leurs droits d’auteurs et ont obtenu un peu plus de 30%.

Pour un premier roman, la marge de manœuvre est souvent très faible. Malgré tout Natacha Boussaa, primo-romancière de la rentrée 2010 avec Il vous faudra nous tuer, a eu la quasi audace de signer son contrat sur 5 ans et de demander une augmentation de son pourcentage de droits d’auteur à la vente numérique.

Pour la jeune Alma Brami (trois romans à son actif dont Ils l’ont laissée là), le rapport avec l’éditeur est primordial.

je lui fais confiance et il a un respect du livre qui me correspond beaucoup, de fait je n’irai pas voir s’ils pratiquent les mêmes pourcentages de rémunération à la vente que pour les tirages papiers.

Certains auteurs ne s’attardent pas forcément sur leurs droits numériques, trop contents de signer chez un éditeur. En particulier lorsqu’ils sont publiés pour la première fois. Mais selon les maisons d’édition, les contrats divergent. “Chez Héloïse d’Ormesson par exemple, il n’y a pas d’avenant au numérique et avec Gilles [Cohen Solal] ou Héloïse [d’Ormesson], les contrats fonctionnent sur le principe de “une bonne affaire est une affaire qui sert les deux parties” ” explique l’écrivain Harold Cobert.

Personne ne semble être sur la même longueur d’onde. C’est pourquoi Stéphanie Hochet, auteure de sept romans dont La distribution des lumières, exprime la nécessité pour les auteurs de se grouper en collectif pour obtenir une revalorisation de leurs droits : “C’est une question qui nous préoccupe, nous en parlons avec d’autres auteurs et des membres de la Société des Gens de Lettres”.

Récemment s’est formé le Collectif du 4 février. Fédéré par les auteurs d’une tribune dans Le Monde du 2 décembre 2010, il dénonce les abus des éditeurs en terme de pourcentage consenti aux auteurs lors de la vente numérique. Aux États-Unis, le pourcentage de vente est également sujet à débat : Random House a vu les héritiers de William Styron quitter la maison pour un éditeur web qui leur proposait 50% sur les ventes numériques.

À ceux qui voient le livre numérique comme une concurrence au livre papier, Eric Pessan répond que le vrai débat se pose d’un point de vue économique. Pour autant, même si aucun des auteurs interrogés ne possède d’Ipad ou autre liseuse, pas un seul d’entre eux n’écrit encore à la main ni ne considère le livre papier et le livre numérique comme antinomiques. Au contraire certains pensent que les deux formes peuvent coexister pacifiquement.

Attachés aux livres, numériques ou pas

Harold Cobert explique:

le livre papier, ce sera peut-être le vinyle de la littérature.  Les deux vont effectivement se compléter. Le livre papier étant très sacralisé, ça va juste étendre la sphère du livre. Des non-lecteurs deviendront peut-être des lecteurs numériques, qui sait ?

Pas de mort du livre programmée, non seulement ils se complètent mais en plus leurs utilisations sont totalement différentes : “D’une part les deux existences sont compatibles mais surtout c’est une bonne chose qu’ils existent en même temps. On ne les utilise pas de la même façon !” rassure Stéphanie Hochet.

Façons différentes de l’utiliser ou extension du lectorat, il n’existe pas d’opposition réelle entre papier et numérique. Le livre selon Eric Pessan aurait simplement une troisième vie “entre la version brochée, celle en poche et celle numérique, si le livre est bien référencé, les possibilités de le trouver s’élargissent. Et même en tant qu’auteur, le livre numérique m’amène sur des territoires où je ne serais pas allé avec le romanesque papier”.

Les territoires en question pourraient très bien concerner la BD augmentée, une expérience de lecture partagée depuis un lecteur e-books ou encore l’émergence de fictions à partir des réseaux sociaux.


Photos, Elliot Lepers pour Owni
Illustrations CC Flickr Bob August

> Vous pouvez retrouver tous les articles de la Une : De la datalittérature dans le 9-3, Le papier contre le numérique et Ce qu’Internet a changé dans le travail (et la vie) des écrivains

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Les Kiosques numériques sont-ils le problème ou la solution de la presse en ligne? http://owni.fr/2011/01/31/les-kiosque-numeriques-sont-ils-le-probleme-ou-la-solution-de-la-presse-en-ligne/ http://owni.fr/2011/01/31/les-kiosque-numeriques-sont-ils-le-probleme-ou-la-solution-de-la-presse-en-ligne/#comments Mon, 31 Jan 2011 13:00:50 +0000 Régis Confavreux et Romain Saillet http://owni.fr/?p=44421 L’annonce n’est guère une surprise : que Google projette d’être présent sur le segment de la vente des journaux est parfaitement cohérent avec sa stratégie. Quand Eric Schmidt (CEO de Google) explique tout le bien que Google peut faire à la presse, évidemment, on se pose des questions. De son coté, Apple fait aussi fureur dans les médias de presse écrite en exigeant des éditeurs une exclusivité de la commercialisation de leur application, seul le couplage d’une édition papier et d’une édition iPad serait autorisé par l’entreprise à la Pomme. …

Avec le numérique, la presse vit un premier traumatisme qui résulte de l’ouverture de nouveaux canaux de distribution, et de la monétisation problématique des contenus éditoriaux sur ces nouveaux canaux. Les métiers d’éditeur de presse restent fondamentalement inchangés : élaborer du contenu, et si possible « de qualité », « enrichi », « augmenté » : les possibilités offertes de diversification et d’enrichissement des contenus sont démultipliées.

C’est ainsi du côté marketing que les bouleversements sont les plus radicaux. La France est un exemple en la matière :  fini le bon temps des NMPP/MLP qui assuraient la vente au numéro, et celui des mailings qui bon an mal an ont permis la croissance des abonnements. Les NMPP/MLP,  à l’image des éditeurs de presse dont elles sont l’émanation,  ont le « papier » comme culture, et n’ont  pris le virage du numérique que tardivement et timidement. Presstallis (ex-NMPP) a certes créé un kiosque numérique, « madeinpresse » : mais qui le fréquente ?

Des éditeurs ont pris des initiatives en dehors du système coopératif. Lagardère a créé Relay, quelques éditeurs de la PQN mettent en place une offre numérique. Des non-éditeurs aussi créent des kiosques numériques – lekiosque.fr, en est un, et certains courtiers aussi (Viapresse par exemple). On trouve de tout, dans ces initiatives, du papier, du numérique, de la vente au numéro, de la vente à l’abonnement, de la vente d’articles, des offres mulitplateformes…

Mais la France n’est qu’une province, et Apple s’est mis en premier sur le marché mondial de la distribution des produits de presse numériques. Dans sa suite, tous les fournisseurs de smartphone et de tablettes.  Avec ces nouveaux acteurs, se pose un problème de taille – un marché mondial qui échappe aujourd’hui aux acteurs nationaux, et la force commerciale des nouveaux entrants est hors de portée pour des opérateurs purement nationaux, qu’ils soient éditeurs ou non.

Les kiosques numériques se multiplient. Quelles conséquences pour les éditeurs ?

Le risque principal est que les éditeurs laissent se recréer un environnement connu : celui des « collecteurs » et autres « courtiers », que ces derniers imposent leurs conditions commerciales et qu’ils captent tout ou partie des informations permettant de qualifier le lectorat d’un titre de presse. L’existence de ces nouveaux courtiers n’est pas un mal en soi. Elle est bénéfique si l’on parle de volume, voire de la marge, car les conditions tarifaires des boutiques en ligne (iTunes, Blackberry etc) sont plus favorables que celles de la plupart des distributeurs physiques.

Ce qui paraît plus dommageable pour la presse, c’est que les conditions commerciales soient définies par le réseau, et surtout, que le réseau rompe dans la plupart des cas le lien entre éditeurs et lecteurs. Comment mettre en place des offres spéciales ? Avoir une stratégie marketing efficace en matière de positionnement, de fidélisation de ses lecteurs? Comment développer une stratégie de vente adaptée à son produit quand le réseau isole le lecteur de l’éditeur, voire est en mesure d’adopter une stratégie commerciale contraire aux intérêts des éditeurs ?

La presse est ainsi confrontée à l’émergence d’une économie de réseau qu’elle ne maîtrise pas, ou qu’en partie, alors même que la gestion d’une telle économie est traditionnellement, en France tout au moins, un des points faibles du secteur.

Quels atouts pour les éditeurs ?

1. L’innovation éditoriale

Alors qu’un nouveau média – Internet et plus généralement les supports numériques – voyait le jour, les éditeurs n’avaient aucune visibilité sur les bouleversements d’usages qu’allait apporter une telle révolution. Ceci pendant des années. Et même aujourd’hui, aux États-Unis, seulement quelques éditeurs ne sont que récemment sortis du lot grâce à leurs expérimentations. C’est le cas de Wired, qui très vite à compris les nouveaux usages de consommation qu’apportaient les tablette tactiles.

“L’arrivée de la tablette offre un grand champ d’expérimentation pour le futur des médias. Dans les prochains mois, nous intégrerons un média social, et nous offrirons une variété de versions et de modalités d’abonnement numérique. Nous apprendrons à travers l’expérimentation, et nous allons observer dans le détail ce que nos lecteurs nous apprendrons sur comment il veulent utiliser leur tablette.”

Chris Anderson Rédacteur en chef de Wired, 26 Mai 2010

Lors de la sortie de l’iPad, Chris Anderson avait en effet toutes les bonnes raisons de croire que l’avenir se trouvait sur les tablettes. Au cours de la première année de commercialisation, le marché des tablettes a véritablement stoppé net la progression des netbook. Avec près de 15 millions d’iPad vendus, Apple a réussi à conquérir un marché qui n’existait pas il y a encore un an. Apple a réussi à positionner sa tablette comme un outil de consultation de média, ce qui a déclenché l’engouement de bon nombre d’éditeurs.

Le premier exemplaire du journal Wired s’est vendu à plus de 100.000 exemplaires – soit 25.000 de plus que la version papier. Créant ainsi un buzz incroyable sur internet. Pourtant dès le second numéro, les espoirs s’évanouissent avec des ventes divisées par 3, pour atteindre péniblement les 33.000 ventes. La chute des ventes ne s’arrêtera pas là, puisque le troisième numéro se vendra à 28.000 exemplaires, malgré une baisse du prix.

Que s’est-il passé durant ces quelques mois pour la demande retombe aussi vite ?

Michael Philippe, co-fondateur de “Lekiosque.fr” propose une réponse. Selon lui, 67% des lecteurs souhaitent retrouver sur leur tablette leur journal papier. Adieu l’innovation et l’enrichissement de l’information : les usages ne sont pas encore installés. Surtout que du coté des éditeurs, le développement d’un journal enrichi tel que Wired ou Paris Match coûte extrêmement cher, et ne peut être créé pour tous les titres de presse.

La problématique qui se cache derrière cette incroyable déception, est celle de la fidélisation des lecteurs. En l’absence de contenu innovant, et d’évolution dans la gestion du lien entre le titre de presse et les lecteurs, les pratiques semblent aujourd’hui se cantonner à des usages “classiques” ou tout au moins déjà connus. D’où un effet déceptif : les attentes aujourd’hui portent sur l’innovation éditoriale. Seuls 9 % des utilisateurs d’iPad  disent ne pas être intéressés par la lecture de leur magazine sur la tablette. Les fonctionnalités plébiscitées pour la lecture interactive sont la vidéo (75 %), de nouveaux contenus (73 %) et des galeries de photos (71 %) (Source : Etude d’Um et de Time Inc., citée par les Clés de la Presse, n°21 janvier 2011).

La tablette numérique n’est pas le remède miracle aux maux de la presse, de même que le numérique, tablettes ou autres, n’est pas la cause de tous ces maux. Ce ne sont pas les “contenants” qui sont en cause, mais les “contenus”. La cannibalisation du papier par le numérique apparaît de plus en plus clairement comme un mythe, qui masque l’incapacité à gérer diversement les contenus en fonction des supports à la disposition des éditeurs. En l’absence d’innovation éditoriale, on offre partout le même produit, parfois payant, parfois gratuit, en ignorant les diversités d’usage et d’attente tout en initiant un cycle de destruction de valeur.

Le challenge éditorial des éditeurs se dessine peu à peu : des contenus adaptés aux contenants, donc de l’enrichissement, et une réactivité éditoriale accrue en raison de modes de consommation eux-mêmes beaucoup plus versatiles que dans le passé. En ce sens, le confort de l’abonnement (et plus encore celui de l’abonnement par prélèvement bancaire) va rapidement se transformer en souvenir, tandis que les incertitudes et fluctuations de la vente au numéro sont appelées à rythmer la vie de l’éditeur…comme il y a 50 ans.

2. L’innovation publicitaire

Cette même étude nous apprend que :

“Les annonces sur la tablette d’Apple retiennent l’attention à 86 % et sont même appréciées pour leurs fonctions interactives pour 82 % des répondants”

Source : Les Clés de la presse du 21 janvier 2011

Ce n’est bien sûr pas le réseau, mais l’éditeur qui est à même d’inventer de nouveaux formats publicitaires, plus événementiels, plus informatifs, plus  interactifs, sur la marque annonceuse. Passer de la vente au poids à une approche qualitative en matière publicitaire, à condition bien sûr d’être en mesure de connaître ses lecteurs et de pouvoir les qualifier.

3. L’innovation commerciale

En matière de marketing, tout est à inventer. Lekiosque.fr souhaite par exemple développer une nouvelle offre, permettant la consultation de 5 magazines par mois pour moins de 5 euros. Cette offre commerciale s’adapte à notre nouvelle consommation de l’information. Nous ne sommes plus fidèle à un seul journal, ni magazine. Nous nous laissons guider par une première de couverture, un dessin, une info, une exclu, puis dans second temps, par le nom du journal. Cette offre permettra ainsi d’apporter un souffle d’air frais sur les offres d’abonnement aujourd’hui en place.

Cette prise de position a pour elle le mérite de la rationalité économique. Elle répond à une problématique de réseau de distribution, de son animation, de ses performances. Elle ne se substitue pas à la politique commerciale de l’éditeur. Encore qu’on ne sache pas quel type de remontée qualitative vers l’éditeur va être acceptée par ce nouveau kiosque numérique. Nul doute que la qualité de ces remontées constituera un avantage concurrentiel déterminant pour le réseau qui jouera pour, et non contre, les éditeurs.

Dans ce jeu commercial, les éditeurs ont donc des atouts fondamentaux : eux seuls ont la maîtrise de l’innovation éditoriale et publicitaire; eux seuls ont la maîtrise d’une politique marketing sophistiquée de couplage et d’offre éditoriale composites ( les produits de base et des produits dérivés); eux seuls ont la maîtrise leur marque hors réseaux de distribution, via les réseaux sociaux (à titre d’exemple : la part des lecteurs qui “fréquentent” une marque non par accès direct au site mais par recommandations d’article via Facebook, twitter etc… est grandissante : près de 50% pour des sites comme OWNI ou Rue 89)

Tous ces atouts sont mis en danger en l’absence d’un maîtrise des réseaux de distribution : c’est ce qui prend forme si la logique Apple s’impose.

Le nœud gordien : comment gérer les réseaux de distribution ?

Pour les éditeurs, cette interface commerciale peut vite devenir un réel handicap pour le développement de leur stratégie commerciale. Les Google et autres Apple font peur aux éditeurs, car économiquement, aucun éditeur ne peut rivaliser avec la taille de ces poids lourds. Le choix cornélien est alors de faire le choix le moins pire : accepter les conditions commerciales imposées (sur sa boutique d’applications, Apple ponctionne 30% du prix final, lequel n’est même pas libre), et ne plus avoir de contacts avec ses lecteurs, ou alors ne pas y apparaître, mais ne pas profiter de cette formidable vitrine.

En quelques mois, Apple s’est imposé comme une alternative obligée à la diffusion des titres de presse. Aujourd’hui, Apple, Google et autres opérateurs de smartphone prennent les moyens de  s’imposer sur la commercialisation du produit de presse. Pourtant, les relations commerciales de proximité avec son réseau sont une des bases fondamentales du bon fonctionnement d’un média, réactif qui évolue en fonction de son auditoire.

Apple commet une erreur stratégique en imposant aux éditeurs de renoncer à leur propre système de commercialisation de leurs versions tablette ou smartphone pour que leur présence dans Applestore soit maintenue. En effet, de deux choses l’une :

  • soit  Apple est en position dominante sur ce marché de la distribution de la presse. Il serait étonnant qu’une autorité de la concurrence ne sanctionne pas un tel comportement constitutif d’abus de position dominante.
  • soit Apple n’est pas en position dominante, et d’autres offres lui sont substituables. Alors Apple perdra des clients, et favorisera l’achalandage de ses concurrents.

Nous penchons pour la deuxième solution. Des I-stores se développent et vont se développer encore en concurrence frontale avec Apple (merci Google, merci Blackberry et autres vendeurs de smartphones ;) , établissant ainsi, du point de vue du droit de la concurrence, des offres de substitution pour le consommateur. L’initiative, en France, de la PQN de saisir la DGCCRF est fondamentale. Nous aurons enfin une analyse des marchés par les autorités françaises de la concurrence, et une mise sous surveillance de ce marché. Car d’autres risques existent : que les principaux acteurs coordonnent leurs actions, créant ainsi des oligopoles défavorables à l’intérêt du consommateur final, par exemple.

Les kiosques numériques sont en plein essor et promettent un réel développement des usages de lectures des journaux et magazines papiers. Ces kiosques sont un maillon d’un réseau émergeant et complexe de distribution de la presse, constitué de kiosques d’éditeurs, de kiosques de non éditeurs,  et bientôt de points de vente sur les réseaux sociaux, tandis que tout indique que la vente en kiosque va reprendre une part prédominante dans la diffusion des titres de presse par rapport à l’abonnement.

Plutôt que d’engager l’avenir de la distribution de la presse dans des conditions dictées par le réseau “non-éditeurs” il est crucial que les éditeurs maîtrisent l’organisation et le fonctionnement de ce réseau dans ses différentes composantes. Pour cela, ils disposent d’atouts, dans le domaine éditorial, dans celui de la publicité, et dans l’évolution de leurs méthodes de marketing et de promotion de leur marque. Et ils bénéficient d’une protection : le droit de la concurrence. Mais ils souffrent d’handicaps certains : l’inaptitude à l’innovation dans un environnement en forte évolution, et  l’absence de solidarité professionnelle.

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Crédit Photo Flickr CC : ஃ முதல் அ வரை / BenMarvin / angelicchiatrullall (yeppa!) / JmGall54 / K-Ideas

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La petite musique des fonds d’investissement http://owni.fr/2011/01/20/la-petite-musique-des-fonds-dinvestissement/ http://owni.fr/2011/01/20/la-petite-musique-des-fonds-dinvestissement/#comments Thu, 20 Jan 2011 16:18:19 +0000 Philippe Astor http://owni.fr/?p=29730 Philippe Astor (@makno), journaliste spécialiste de l’industrie de la musique, a co-fondé le site Electron Libre, publie sur Musique Info et est blogueur sur digitaljukebox.fr.

De plus en plus de fonds d’investissement jètent leur dévolu sur les actifs d’une industrie musicale exsangue après dix ans de crise du disque. Tous les fonds de catalogue prestigieux, qui promettent de se transformer en vaches à lait, suscitent désormais leur convoitise. Mais ils goûtent moins la prise de risque que constitue l’investissement dans la production et le développement de nouveaux talents, ce qui n’est pas très bon signe.

A quelques jours du Midem 2011, ce n’est plus qu’un secret de polichinelle : le second semestre 2010 s’est révélé beaucoup moins bon en terme de ventes de musique que le premier, au point que le SNEP pourrait annoncer, lors de sa conférence de presse annuelle à Cannes, un recul du marché de gros de l’ordre de 4 %. A noter que l’embellie des ventes de gros de fin 2009 et des six premiers mois de 2010 ne s’est jamais traduite par une embellie des ventes de détail.

Dans un contexte économique qui n’est toujours pas reluisant, certains acteurs du marché parviennent cependant à tirer leur épingle du jeu, au point même de susciter l’intérêt d’investisseurs en capital risque. C’est par exemple le cas de X5 Music Group en Suède. Ce n’est pas une start-up de musique en ligne mais un label au profil atypique, qui vient de lever 7 millions d’euros auprès du fonds de capital risque NorthZone Ventures, principal actionnaire de Spotify..

X5 Music Group ne produit pas de phonogrammes et n’investit pas dans le développement de nouveaux talents, mais s’est spécialisé dans l’acquisition de droits “masters” sur des compilations de fond de catalogue qu’il licencie à différentes plateformes de musique en ligne et à des agrégateurs pour les exploiter en ligne.

Des « Early Years » de Roy Orbisson aux « #1 Hits » d’Elvis Presley, en passant par « The Very Best » de Stan Getz, le « 75 Year Anniversary » de Gene Vincent ou « The Complete B » de Billie Hollidays, X5 Music fait son marché dans les vieilleries de fond de catalogue et les compilations de tout acabit : de rock, de jazz, de country, de blues, de classique, etc.

Et ça marche ! Le label se présente ainsi comme le premier partenaire, en Europe, de plateformes de téléchargement comme iTunes ou Amazon MP3, avec quelques 70 millions de ventes en téléchargement au compteur. Avec les fonds levés auprès de NorthZone Ventures, la compagnie s’apprête désormais à pénétrer sur le marché américain, où cet argent lui permettra d’acquérir de nouveaux droits masters, afin de les exploiter sur Interne

Mauvaise pioche

Passons sur la mauvaise pioche du fonds d’investissement britannique Terra Firma, qui a racheté en 2007 la maison de disques EMI (et ses prestigieux catalogues d’édition et de masters), au prix fort, par effet de levier, c’est à dire en s’endettant lourdement au plus mauvais moment, avant que n’éclate la crise des subprimes. Entre temps, EMI a enregistré des résultats plus qu’honorables, mais pas au point de pouvoir faire face aux échéances de sa dette et d’éviter que la banque américaine Citigroup, qui a financé son rachat, ne mette à plus ou moins brève échéance la main sur l’ensemble de ses actifs, avant d’en organiser la vente par appartements.

Or derrière les repreneurs potentiels, supputés ou déclarés, des actifs d’EMI, se cachent d’autres fonds d’investissement, qui semblent décidément très séduits par un marché de la musique pourtant réputé exsangue. Il en va ainsi de ceux (dont l’américain Bain Capital) qui ont financé le rachat de Warner Music à AOL Time Warner aux côtés d’Edgar Bronfman, et qui ont d’ailleurs très vite récupéré leurs billes à l’issue de cette opération, ou encore du fonds KKR (Kohlberg Kravis Roberts & Co), actionnaire de BMG Rights Management à hauteur de 51 % aux côtés du groupe de médias allemand Bertelsmann.

Dans un article publié sur Electronlibre.info, je retrace la génèse de BMG Rights Managemment, structure dédiée à la gestion de droits masters et d’édition dans le secteur de la musique, dont la création et la montée en puissance ces deux dernières années marquent un retour en force de BMG (l’une des cinq majors du disque au début des années 2000, qui avait complètement disparu des radars de l’industrie musicale en 2008) sur le devant de la scène.

Cette nouvelle structure s’est lancée depuis fin 2008 dans une politique d’acquisition tous azimuts de catalogues d’édition prestigieux. Après avoir acquis l’éditeur Crosstown Song America en juillet 2009, BMG Rights Management a entre autre mis la main sur Cherry Lane Music Publishing en mars dernier, l’un des plus gros éditeurs indépendants américains, avant de racheter le célèbre éditeur britannique Chrysalis, au mois de novembre 2010.

En quête de vaches à lait

Les éditeurs de musique, qui représentent les droits des auteurs-compositeurs (partitions et paroles), ont beaucoup moins souffert de la crise du disque que les producteurs de phonogrammes, au point que dans leur globalité, leurs revenus ont légèrement progressé au cours des dix dernières années à l’échelle mondiale, la multiplication des canaux de diffusion (à l’origine d’une augmentation des droits d’exécution publique qu’ils perçoivent) et le développement du placement de musique à l’image (synchro), qui peut être très rémunérateur, ayant compensé la baisse des revenus qu’ils tirent des ventes de disques (droits de reproduction mécanique).

Aussi certains catalogues d’édition constituent-ils de véritables vaches à lait et ont-ils suscité la convoitise ces dernières années. Le secteur a connu une véritable redistribution des cartes, au cours de laquelle Universal Music, en rachetant le catalogue de BMG Music Publishing, s’est hissé à la place de numéro un mondial. Mais cette convoitise s’oriente clairement, désormais, vers les droits sur les masters de fond de catalogue, qui retrouvent une seconde jeunesse sur Internet, en particulier avec le développement du streaming (1).

Ainsi BMG Rights Management se dit-il beaucoup plus intéressé, aujourd’hui, par l’acquisition des droits masters d’EMI que par celle de ses droits d’édition, beaucoup plus chers à acquérir, et beaucoup moins rémunérateurs sur Internet, qu’il s’agisse de streaming ou de téléchargement. S’agissant d’un fond de catalogue prestigieux, qui a toutes les chances de se transformer en vache à lait, cela n’a rien d’étonnant. D’autant que son exploitation ne revêt aucune prise de risque.

Par contre, ni BMG Rights, ni X5 Music, à une moindre échelle, ne manifestent de velléités d’investir dans la production ou le développement de nouveaux talents, ce qui n’est pas très bon signe. D’un industrie essentiellement axée sur la production de nouveautés, appelées à constituer les fonds de catalogue de demain, l’industrie de la musique risque fort de se transformer de plus en plus en machine à exploiter des standards dont la production a déjà été largement amortie et à resservir essentiellement des plats réchauffés.

A moins que ne se crée un cercle vertueux qui verrait les revenus générés par les fonds de catalogue être réinvestis dans la production. Mais il faudrait pour cela que ceux qui mettent aujourd’hui la main sur ces fonds de catalogue, d’édition comme de masters, soit plus animés par l’amour de la musique que par l’appât du gain, ce qui, s’agissant de fonds d’investissement, est loin d’être gagné.

(1) Alors qu’à peine 20 % des titres de musique référencés sur iTunes se vendent, 70 % de ceux qui figurent dans le catalogue de Spotify sont écoutés

Article initialement publié sur Digital Jukebox

Crédits Photos : FlickR CC : Daniel Hedrick; Wiity Name; Domien

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Synchronisez-moi ! http://owni.fr/2010/09/15/synchronisez-moi/ http://owni.fr/2010/09/15/synchronisez-moi/#comments Wed, 15 Sep 2010 10:37:50 +0000 Loïc Dumoulin-Richet http://owni.fr/?p=28217 Retrouvez cet article et bien d’autres sur OWNImusic, que nous lançons avec joie ces jours-ci !

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Cet article fait suite au billet Do You Speak Rock Français ? paru le 13/09/10 sur Ownimusic.com et Owni.fr

Si le succès des groupe de rock français chantant en anglais est variable (les ventes de Lily Wood And The Prick ne tutoient pas encore celles de Phoenix ou Aaron), ceux-ci semblent avoir un dénominateur commun : la synchronisation. Pour un artiste, le placement d’une œuvre dans une fiction ou une publicité assure une exposition souvent bienvenue à un titre qui serait peut-être passé inaperçu sans celle-ci. Il permet aussi à un album de décoller à moindre frais.

Fils de pub, mais pas que.

Le duo Aaron doit une fière chandelle au film de Philippe Lioret Je vais bien ne t’en fais pas, sorti en 2006. La chanson U-Turn (Lili) devient le titre phare de sa bande originale avant même la sortie de l’album du groupe. Le succès du titre est immédiat et lui sert de rampe de lancement. Il sera certifié double disque d’or.

Dans le même domaine, l’inclusion du titre It’s Gonna Be du groupe Empyr dans la bande annonce US de la nouvelle saison des Experts: Manhattan aidera sans doute le lancement du nouvel album du quintette qui offre d’ailleurs le titre en téléchargement gratuit sur son site.

Mais nos groupes hexagonaux chantant en anglais brillent particulièrement dans la synchronisation publicitaire. Annonceurs, maisons de disques, éditeurs, artistes, tous les intervenants sont gagnants dans ce business.

Synchroniser un groupe français s’exprimant dans la langue des Beatles permet à l’annonceur de proposer le spot à l’international, la langue anglaise étant beaucoup moins segmentante que la notre. Dans le même temps la proximité géographique et linguistique avec les artistes rend les contrats plus simples à mettre en place. Les équipes de synchronisation, intégrées aux éditeurs, n’ont qu’à piocher dans le catalogue maison pour proposer leurs poulains aux agences de publicité.

Certains contrats ont récemment offert de belles opportunités de visibilité à des artistes issus de la jeune scène française anglophone. On peut penser à Jill Is Lucky, dont le titre The Wanderer illustre la campagne du parfum Kenzo Flower depuis un an, ou encore à Lily Wood And The Prick qui devrait voir s’ouvrir de nouveaux horizons avec l’utilisation de This Is A Love Song dans le spot de la fragrance Idylle de Guerlain et de Down The Drain dans celui de Virgin Radio.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Jill Is Lucky – The Wanderer

I $ <3 synchro

L’exemple de Cocoon est éloquent sur ce point : leur titre Chupee a servi de support à pas moins de deux campagnes (Peugeot Partner et Danone Taillefine) et l’agence responsable du spot  Volkswagen Eos a quant à elle choisi le titre On My Way pour habiller son spot en 2008.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Cocoon – On My Way

Phoenix, dont le succès chez nous et hors des frontières n’est plus vraiment à faire (leur dernier album Wolfgang Amadeus Phoenix vient de passer la barre des 500 000 ventes aux Etats-Unis), a habillé le spot Twingo de son Lisztomania au début de l’été, tout comme Daft Punk l’avait fait en 2005 avec Technologic pour Apple et pour Alpha Roméo en 2008. Dans ces cas, la marque bénéficie autant de l’image hype du groupe que ce dernier d’une exposition supplémentaire pour son œuvre.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

(spot Apple utilisant le Technologic des Daft Punk)

La synchronisation constitue donc un véritable coup gagnant pour l’artiste. En plus des royalties perçues pour la diffusion de sa musique, une campagne télévisée est souvent un tremplin capable d’attirer un nouveau public, qui, séduit par un titre peut entrer dans un univers musical qu’il ne connaissait pas. Comme me le confiait récemment le chef de projet d’un artiste suédois qui vient de signer un gros contrat de synchronisation avec une célèbre marque de produits de grande consommation, ce genre de contrat rapporte aujourd’hui bien plus que les ventes de supports physiques ou numérique pour un groupe émergeant.

Si malheureusement les parties prenantes sont très discrètes sur les montants en jeu, ceux-ci sont très variables selon la notoriété du titre, de l’artiste, les territoires, la durée d’utilisation et les médias sur lesquels sera diffusé le produit final et la notoriété de l’artiste. La scène française anglophone prometteuse va-t-elle pour autant se transformer en une armée d’hommes-sandwich ?

Crédit photo : CC Flickr Marine*B

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L’information n’a jamais été un produit commercialement viable http://owni.fr/2010/07/02/l%e2%80%99information-n%e2%80%99a-jamais-ete-un-produit-commercialement-viable/ http://owni.fr/2010/07/02/l%e2%80%99information-n%e2%80%99a-jamais-ete-un-produit-commercialement-viable/#comments Fri, 02 Jul 2010 08:00:58 +0000 Philippe Couve http://owni.fr/?p=11823 Cet article est une traduction d’un billet publié par le Pr Robert G Picard: News has never been a commercially viable product. Qu’il soit remercié d’avoir autorisé cette traduction. Le Pr Picard est l’un des meilleurs spécialistes de l’économie des médias. Il enseigne en Suède, à New York et à Pékin.

Robert G Picard

Les discussions parmi les acteurs des médias, les chercheurs et les politiques à propos de l’avenir du secteur de l’information (news industry) en Amérique du Nord et en Europe continuent de se concentrer sur la question suivante: comment les entreprises d’information peuvent-elles perdurer au XXIe siècle?

Les éditeurs continuent d’assurer que tout irait bien s’ils pouvaient ériger des murs payants autour de l’information en ligne et ils soutiennent que les gouvernements devraient leur fournir une protection juridique de sorte qu’ils puissent faire de l’information un produit numérique économiquement viable.

Leur approche est erronée et ignore cette réalité fondamentale: l’information n’a jamais été un produit commercialement viable parce que la majorité du public a été, et demeure, réticente à payer pour l’information. Par conséquent, l’information a toujours été financée par des revenus qui dépendaient de la valeur de cette information pour d’autres activités.

Historiquement, les premières opérations de collecte et de diffusion d’information ont été financées par les empereurs et les rois qui employaient leurs représentants à travers leurs royaumes pour collecter les informations et les adresser au siège du pouvoir.

Les émissaires, les consuls et les ambassadeurs collectaient, de leur côté, les informations en provenance de l’étranger et en particulier des zones importantes pour le commerce ou qui étaient perçues comme des menaces potentielles pour les royaumes. Dans ce modèle de financement impérial, l’information était collectée et partagée entre représentants officiels des royaumes pour éclairer les choix des gouvernements. Le modèle de revenus était basé sur un soutien financier du souverain parce que cela servait les intérêts de son Etat.

Au Moyen âge, un modèle de financement par l’élite commerciale s’est développé. Dans ce modèle, de riches marchands ont embauché des correspondants dans les villes et les Etats avec lesquels ils commerçaient pour collecter des informations à propos des évolutions politiques et économiques en relation avec leurs affaires. Les marchands de lin, de porcelaine, d’épices ont exploité l’information pour se procurer un avantage commercial et ils gardaient l’information pour eux plutôt que de la partager avec d’autres.

Au 18e et au 19e siècle, un plus vaste modèle de financement par une élite sociale s’est développé pour soutenir les journaux qui servaient les intérêts de l’aristocratie et d’une classe de commerçants de plus en plus nombreuse. Même avec des prix apparents élevés, ce modèle économique n’était pas viable et les journaux étaient subventionnés par les revenus des activités d’imprimerie et d’autres activités commerciales ainsi que par les gouvernements, les partis politiques et des associations patronales.

Le modèle des médias de masse est apparu à la fin du 19e siècle et au 20e siècle. Ce modèle a été rendu possible par la révolution industrielle, l’urbanisation, le salariat et la vente de biens de consommation finale. Dans ce modèle, l’information est fournie aux masses à un prix bas, mais subventionné par la vente de publicité. Comme la plupart du public n’est pas intéressée par le suivi des événements au jour le jour et par l’info d’actualité (hard news), le gros du journal est consacré au sport, au divertissement, au lifestyle et à tous les dispositifs qui accroissent l’appétence du public à dépenser son argent pour le produit.

Ce modèle des médias de masse reste le modèle prédominant pour le financement de la recherche d’information et sa distribution, mais son efficacité diminue à mesure que l’audience « de masse » devient une « niche » d’audience dans les pays occidentaux avec le départ de ceux qui sont le moins intéressés par l’information d’actualité (hard news) vers la télévision, les magazines et internet. Cela crée beaucoup d’incertitude sur la manière dont la société va subventionner et payer pour le journalisme au 21e siècle.

Se concentrer sur l’information en tant que produit commercial peut apparaître futile, mais les fournisseurs d’information feraient bien de consacrer leurs efforts à créer d’autres activités commerciales qui pourront subventionner l’information. Je pense à la création d’événements, à l’éducation, à la formation, à la vente de livres, de voyages et à une variété d’activité de merchandising.

Il y a un siècle, beaucoup d’éditeurs subventionnaient leur activité d’information avec ce type d’activités et certains continuent à le faire. Il est probable que les fournisseurs d’information devront s’appuyer sur une gamme plus large de flux de revenus dans le futur plutôt que de se limiter aux seuls revenus en provenance des acheteurs et de la publicité comme c’est le cas aujourd’hui.

Robert G Picard

> Article initialement publié sur Journaliste-Entrepreneur ; photo CC Flickr zahrky

Ce billet, re-daté pour des raisons techniques, a été publié le 7 avril.

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L’iPad sauvera-t-il les éditeurs du péril web ? http://owni.fr/2010/06/12/l%e2%80%99ipad-sauvera-t-il-les-editeurs-du-peril-web/ http://owni.fr/2010/06/12/l%e2%80%99ipad-sauvera-t-il-les-editeurs-du-peril-web/#comments Sat, 12 Jun 2010 16:34:51 +0000 Pierre Mounier http://owni.fr/?p=18403 Quelques mois après les Etats-Unis, la France a vu arriver il y a quelques jours en même temps que d’autres pays d’Europe et d’Asie la dernière invention d’Apple : l’iPad. De quoi s’agit-il ? [1] D’une tablette multi-usages grand format qui ressemble beaucoup à l’iPhone par bien des aspects, la taille en plus et les fonctions de téléphonie en moins. Comme l’iPhone donc, ce nouveau support bénéficie d’un écran tactile rétro-éclairé et en couleur. Contrairement aux « liseuses » ou tablettes de lecture classiques, l’iPad ne fonctionne donc pas sur la base de papier électronique. Il est équipé d’une connexion wifi dans sa version de base, et wifi et 3G pour un prix plus élevé. Du côté fonctionnalités, il permet de surfer sur le web grâce à son navigateur Safari, de relever son courrier électronique et de regarder des vidéos.

Ce ne sont pourtant pas ces fonctionnalités qui sont à la source de la plupart des commentaires, discussions, et finalement émotions autour du nouvel objet. C’est plutôt sa capacité à être étroitement relié à des boutiques de vente en ligne d’application (AppStore), de livres (iBookstore) et de contenus multimédias (iTunes). Les secteurs de la presse et de l’édition de livres en particulier ont rapidement identifié l’outil comme une véritable planche de salut [2], comme le moyen par lequel ils allaient pouvoir sortir de la morosité économique qui les caractérise de plus en plus.

Plus profondément, c’est la possibilité pour ces acteurs de perpétuer un modèle économique traditionnel dans le nouvel environnement numérique qui est le catalyseur de toutes les attentions que suscite l’iPad. La presse s’est jeté sur ce nouveau support avec la conviction du désespoir [3]. Car jeté plus que tout autre dans le tourbillon de la révolution du web grand public depuis plus de quinze ans, ce secteur a dû expérimenter à peu près tous les modèles économiques possibles : du payant au gratuit, puis du gratuit au payant, avec des barrières mobiles classiques ou inversées, expérimentant le « freemium », la diversification des revenus et surtout le laminoir des revenus publicitaires à rendements décroissants, la presse en arrive aujourd’hui à la conclusion un peu désespérante qu’elle n’arrive pas au bout du compte à tirer des profits suffisants du nouveau monde numérique. De ce point de vue, l’accueil fait par la presse française à ce qui n’est finalement qu’un objet électronique est tout à fait étonnant : on ne compte plus les articles dithyrambiques, les dossiers spéciaux, les éditoriaux exaltés.

Les éditeurs de livres restent manifestement plus méfiants : seuls Hachette, Albin Michel et Eyrolles ont pour l’instant franchi le pas et accepté de mettre à disposition une partie de leur catalogue sur l’iBookstore [4]. Les autres devraient suivre à plus ou moins longue échéance, mais des manifestations d’opposition ont déjà été exprimées. Le plus remarquable, celle d’Antoine Gallimard, conduit sa maison a proposer plutôt une application branchée sur sa plateforme de distribution numérique, Eden livres, par l’intermédiaire de laquelle, les ouvrages seront vendus.

Trois éléments expliquent une telle prise de position :

- il s’agit d’abord de la maîtrise du prix de vente du livre. Apple ne laisse pas les éditeurs fixer librement les prix dans son Bookstore mais exerce des contraintes qui ne sont pas difficiles à admettre pour un secteur qui a toujours eu l’habitude contraire, surtout grâce à la loi sur le prix unique du livre.
- le deuxième élément est le stockage du fichier numérique sur les serveurs d’Apple qui en assure du coup toute la gestion. Cette option a toujours été refusée jusqu’à présent par les éditeurs français aux plateformes de distribution numériques qu’ils ne maîtrisent pas [5].
- Enfin, Antoine Gallimard évoque explicitement le risque de « monopole » d’Apple sur le secteur du livre [6]. Monopole : le terme est un peu fort car il existe en réalité des alternatives. Il faut plutôt voir dans cet argument le risque que représente une concentration verticale entre la plateforme de distribution et le fabricant de la machine elle-même susceptible de créer un effet de verrouillage inquiétant pour les éditeurs.

Malgré les résistances et les inquiétudes, l’arrivée de l’iPad semble pourtant être un élément déclencheur pour un secteur qui semble désormais bien engagé dans de grandes manoeuvres. Récemment, les trois grandes plateformes françaises de distribution de livres numériques ont conclu un accord d’interopérabilité permettant aux libraires d’accéder selon les même méthodes et simultanément à leurs catalogues [7]. Comme souvent, c’est bien l’apparition d’une menace extérieure qui fait avancer les acteurs.

Les espoirs que l’iPad suscitent, que ce soit pour la presse, l’édition de livre ou du côté des consommateurs ne sont pas partagés par tous. Certains en appellent à un retour à un minimum de lucidité, notamment quant aux perspectives économiques que ce nouveau support est susceptible d’ouvrir. Hubert Guillaud dans La Feuille, fait un rapide calcul portant sur les liseuses (tous types confondus) en général :

Estimons que demain, en France, il y ait 600 000 liseuses en circulation. Aujourd’hui, le papier touche potentiellement 60 000 000 de Français. Combien pourraient faire un succès commercial qui se vend à 100 000 exemplaires (c’est devenu un beau chiffre) sur un public potentiel de 60 millions quand le public potentiel n’est plus que de 600 000 lecteurs équipés ? Un livre numérique se vendant à 1 000 exemplaires (rapport au parc de machine) serait donc l’équivalent d’un best-seller dans le monde physique ! Voilà qui permet de remettre les pendules à l’heure [8]

Certains chiffres annoncent la vente de plus d’un million d’iPad aux Etats-Unis, ce qui est un beau succès, mais reste marginal rapporté à une population globale de 300 millions d’habitants. Le talent marketing d’Apple et de son dirigeant Steve Jobs sont certains, mais le prix de vente de la tablette restera sans doute trop élevé pour lui permettre de jamais devenir un objet de consommation universel.

Par ailleurs, les premières études d’usages sur l’iPad risque de faire l’effet d’une douche froide sur les éditeurs qui en attendent beaucoup pour leur trésorerie. Une étude publiée récemment montre en effet que pour l’instant, la plupart des acquéreurs d’iPad utilisent davantage leur tablette pour consulter leur courrier électronique ou surfer sur le web [9].

Ce point précis des usages de la tablette est fondamental et demande à être observé avec précision. Car l’iPad est identifié par les éditeurs de contenus comme une machine de guerre contre le web, ce web qui en a ruiné certains ou que d’autres ont toujours voulu éviter en raison des incertitudes économiques qu’il représente. La tribune publiée par Cory Doctorow contre l’iPad [10] et finalement tout le système Apple est caractéristique de cette opposition. Ayant pour sa part su tirer tout le parti de la logique ouverte et créatrice du web, cet auteur et éditeur de contenus dénonce très naturellement la logique verrouillée et privative que met progressivement en place la firme de Cupertino.

Le succès annoncé de l’iPad ne doit enfin pas faire oublier l’existence d’une concurrence nombreuse et diversifiée [11]. Outre les habituelles « liseuses » à base de papier électronique – Sony Reader, Cybook, Kindle, on recense de nombreuses tablettes Internet à écran LCD tactiles comme l’iPad. La firme française Archos vient par exemple de mettre sur le marché une machine fonctionnant sous Linux Android, nettement moins coûteuse, dotée d’un écran un peu plus petit, mais beaucoup plus performante, tandis que d’autres constructeurs fourbissent leurs armes.

Pour les éditeurs de contenus, l’iPad est attendu comme le messie parce qu’il est identifié comme le moyen leur permettant de perpétuer un modèle économique qu’ils maîtrisent [12]. L’espoir de retrouver un marché unifié constitué par un public rassemblé autour d’un seul canal de commercialisation éprouvé semble illusoire. Une vision un peu plus large de la situation fait plutôt état d’une diversification des supports, d’une multiplication des modes de commercialisation et d’une fragmentation des publics.

L’avenir des producteurs de contenus résidera donc plutôt dans leur capacité à être présents dans tous les lieux de circulation d’information, sur tous les supports, iPad compris ; mais pas seulement.

> Article initialement publié sur Homo Numéricus

> Les notes renvoient à l’article original

> Illustrations CC FlickR par thms.nl,

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