OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 L’autorité européenne de protection des données critique le filtrage http://owni.fr/2010/06/09/lautorite-europeenne-de-protection-des-donnees-critique-le-filtrage/ http://owni.fr/2010/06/09/lautorite-europeenne-de-protection-des-donnees-critique-le-filtrage/#comments Wed, 09 Jun 2010 07:48:59 +0000 Astrid Girardeau http://owni.fr/?p=17965 Le 10 mai dernier, le Contrôleur européen de la protection des données (CEPD) a rendu son avis (PDF) sur la proposition de directive relative “à l’exploitation et aux abus sexuels concernant des enfants et à la pédo-pornographie”.

Après voir rappelé qu’il ne remet pas en cause la nécessité de mettre en place “des mesures adéquates pour protéger les enfants contre de tels abus”, il émet de vives critiques sur le projet de filtrer des sites Internet. Notamment sur son impact “sur les droits fondamentaux à la vie privée et à la protection des données”. Tout en soulignant que cette position n’est pas spécifique à la lutte contre la pornographie enfantine en ligne, “mais à toute initiative visant à la collaboration du secteur privé à des fins de répression”.

Le blocage des sites Internet selon la directive

Pour rappel, la proposition de directive, de la commissaire européenne Cecilia Malmström (Affaires Intérieures), prévoit le “blocage de l’accès aux sites internet contenant de la pédo-pornographie”.

L’article 21 impose ainsi aux États membres de prendre “les mesures nécessaires pour obtenir le blocage de l’accès par les internautes sur leur territoire aux pages Internet contenant ou diffusant de la pédo-pornographie”. De manière assez floue, il indique que “des garanties appropriées sont prévues, notamment pour faire en sorte que le blocage de l’accès soit limité au strict nécessaire”.

Pour mettre en place le blocage, il propose deux mécanismes: un système placé sous l’ordre d’autorités judiciaires ou policières compétentes ou bien des actions de la part des fournisseurs d’accès Internet (FAI) sur une base volontaire de code de bonne conduite et de lignes directrices.

Autorité judiciaire ou policière a minima

La critique du contrôleur est sévère. A l’examen de ce texte, il s’interroge sur les critères et conditions conduisant à une décision de blocage. Il indique que : “s’il peut soutenir des actions menées par la police ou les autorités judiciaires dans un cadre juridique bien défini, il a de sérieux doutes quant à la sécurité juridique de tout blocage opéré par le secteur privé”.En clair : le blocage des sites peut être envisagé sous le contrôle d’une autorité judiciaire ou policière. Pas sous celui des FAI ou d’une seule autorité indépendante.

A noter qu’en France, dans le cadre de la Loppsi, les députés ont adopté en janvier dernier un amendement du député UMP Lionel Tardy qui impose l’intervention du juge à la notification par l’autorité administrative aux FAI de la liste noire des sites à bloquer. Mais il y a quelques jours, en Commission des Lois du Sénat, le sénateur et rapporteur UMP Jean-Patrick Courtois a déposé un amendement visant à supprimer l’accord préalable du juge.

Conséquences sur la protection des données à caractère personnel

Le CEPD se dit aussi préoccupé par la surveillance des réseaux. “La surveillance et le blocage peuvent impliquer différentes activités telles que scruter Internet, identifier les sites illicites ou suspects et bloquer l’accès aux utilisateurs finaux, mais aussi la surveillance du comportement en ligne des utilisateurs finaux qui tentent d’accéder ou de télécharger de tels contenus”.Et, selon le contrôleur, si chacune de ces pratiques implique la mise en place d’outils au degré d’intrusion différent, toutes ont “des conséquences sur la protection des données, comme les données à caractère personnel”. Et ceci vis-à-vis de toutes les parties concernées : les victimes, les témoins, les utilisateurs comme les fournisseurs de contenu.

Aussi, pour lui, cela pose la question de la légalité et de la compatibilité du traitement et de l’utilisation des données à caractère personnel en vertu des articles 6.1.b et 7 de la directive sur la protection des données. Selon le premier, les données à caractère personnel “doivent être collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes, et ne pas être traitées ultérieurement de manière incompatible avec ces finalités”.

Le second liste les seuls cas où le traitement de ces données est autorisé. Par exemple s’il est nécessaire à l’exécution d’une mission d’intérêt public ou au respect d’une obligation légale à laquelle le responsable du traitement est soumis.

Une même position quelque soit le contexte

A de nombreuses reprises, le CEPD rappelle avoir déjà émis dans de précédents avis des préoccupations similaires concernant le blocage et la surveillance des individus par les acteurs du secteur privé. Par exemple, par les FAI ou les titulaires de droits d’auteur.“Les questions de protection des données ont déjà été analysés par le CEPD dans différents contextes, en particulier celles liées à la lutte contre les contenus illicites” Et de citer un document de travail du Groupe 29 datant de 2005 sur les questions de protection des données liées aux droits de propriété intellectuelle. Un autre du 23 juin 2008 (PDF) sur la proposition d’un programme visant à la protection des enfants utilisant Internet et les autres technologies de communication. Et enfin celui du 22 février 2010relatif aux négociations de l’ACTA.

Concernant ce dernier, le contrôleur indique : “s’il ne fait pas de doute que la propriété intellectuelle est importante pour la société et doit être protégée, elle ne doit cependant pas être placée au-dessus du droit fondamental à la vie privée et à la protection des données.”

Sur le même sujet :
- Loppsi : Le Sénat opte pour un filtrage sans juge
Filtrage : Instrumentalisation de la pédo-pornographie en Europe

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ACTA, 10 ans après … http://owni.fr/2010/04/15/acta-10-ans-apres-%e2%80%a6/ http://owni.fr/2010/04/15/acta-10-ans-apres-%e2%80%a6/#comments Thu, 15 Apr 2010 14:20:30 +0000 Korben http://owni.fr/?p=8232

Comme tous les matins, je me suis levé et je me suis posé sur mon balcon pour écouter le chant des oiseaux et le vent dans les buissons… Nous sommes en 2020 et cela fait 5 ans que je n’ai plus entendu une seule note de musique. Chaque note a été brevetée par des sociétés privées en 2019 et du coup la musique est devenue impossible à écrire sous peine de poursuites judiciaires… Alors oui, j’écoute le chant des oiseaux car même si régulièrement les chasseurs de la SACEM les capturent pour les modifier génétiquement afin d’inhiber l’instinct de chanter de ces petites êtres volants, ils sont encore trop nombreux pour être réduits au silence.

Depuis que mon pays, la France, que j’aime tant, a signé ce fameux traité ACTA en 2010, j’ai vu tomber une à une mes libertés… ça a commencé tout doucement, un soir de 2011 quand ils ont instauré une loi interdisant l’utilisation des logiciels libres pour écouter de la musique ou regarder des films. « Le DRM c’est l’avenir » m’ont-ils expliqué. « Paye tes logiciels de lecture et tu auras le droit d’écouter le CD que tu viens d’acheter ». Dingue !

Au début révolté, je me suis ensuite rapidement arrêté d’écouter de la musique…

En 2013, en sortant du cinéma, je venais d’assister à la projection d’Avatar IV (en 360°) et je me suis fait intercepter par les agents de sécurité de mon cinéma de quartier, qui m’ont forcé à passer dans une machine baptisée « DReaM Clean ». Chaque spectateur, après avoir payé sa place de cinéma 15 €, devait passer dans cette machine pour se faire effacer le souvenir du film qu’il venait de voir. C’était une nouvelle demande des ayants droits qui pour protéger la propriété intellectuelle empêchaient toute conservation en mémoire (sous forme de souvenirs) de leurs production. Et bien sûr, comme il n’y a pas de petits profits, il existait une formule payante qui permettait de conserver un souvenir du film pendant 5, 10 ou 15 jours selon le tarif que vous y avez mis.

Voir un film et ne plus s’en souvenir après, c’est con je trouve… Alors j’ai arrêté de regarder des films…

Je me suis donc tout naturellement tourné vers le piratage… C’était un monde étrange, rempli de codes mais où chacun se revendiquait adepte du partage libre et gratuit. On pouvait grâce à des protocoles p4p, récupérer des films ou de la musique qu’on pouvait regarder ou écouter en cachette chez soi. Le problème, c’est qu’en 2015, ACTA a forcé les FAI à interdire l’utilisation des protocoles d’échanges. Ce fut un drame pour le réseau internet qui s’est mis alors à regresser. La distribution de gros fichiers comme par exemple la dernière release d’Ubuntu 15.4 alias Valiant Viper s’est retrouvée en grosse difficulté et malgré les manifestations des libristes dans les rues, en 2016, c’était fini… Le tout propriétaire avait pris le dessus et les DRM étaient partout.

Pour télécharger, la seule solution restait le VPN localisé en Chine (le seul pays qui n’avait pas encore signé ACTA à l’époque). Le hic, c’était qu’il fallait changer régulièrement d’endroit pour télécharger sa musique via VPN car la police était partout, prête à vous géolocaliser et à vous emmener direct en prison pour je cite « utilisation illicite d’un cyber armement« .. Oui le VPN est devenu une arme de guerre début 2016 et a été interdit partout sur la planète. Les FAI ont bien sûr contribué à son extinction en interdisant son utilisation et chacun de leurs abonnés qui passait outre cette loi étaient automatiquement repéré par l’Hasi, l’évolution naturelle de l’Hadopi, qui veut dire si je me souviens bien : Haute Autorité de Surveillance d’Internet.

Je me suis donc contenté d’écouter mes vieux morceaux chez moi en les faisant tourner en boucle pendant quelques mois… Mais j’ai du vite arrêter après la création de milices qui grâce à du matériel militaire étaient capable de détecter les écoutes illicites à domicile et n’hésitaient pas à enfoncer votre porte pour vous trainer vous et votre famille jusqu’au poste de police le plus proche.

Le jeu du piratage n’en valait donc plus la chandelle. Il fallait se rendre à l’évidence… A moins de partir vivre en chine, télécharger était devenu un acte de suicide. Si je ne me trompe pas d’ailleurs, c’est au début de l’année 2018 que le dernier pirate français a été arrêté. Ce gars était une vraie star. Il se cachait des autorités et téléchargeait comme un dingue, défiant toutes les lois mais partageait aussi le fruit de son téléchargement avec les gens qu’ils croisaient en transférant des films et de la musique sur les balladeurs MP3 de tous le monde. C’était un peu le Robin des Bois du DivX, l’Abbé Pierre du MP3… Il faisait vraiment tourner notre président Sarkozy en bourrique. Non, non, pas Nicolas mais Jean Sarkozy qui a pris la succession de son père en 2017 après que ce dernier a aboli le droit de vote.

En ce qui me concerne, à cette époque je n’avais plus de baladeurs de toute façon. Mon baladeur était un vieux machin qui datait de 2012 sur lequel j’avais mis quelques MP3 d’ACDC et des Stones sans DRM (donc complétement illégaux) et que je me suis fait détruire en 2014 lors d’un passage en douane. En effet, depuis 2011, les douaniers avaient le droit grâce à ACTA de fouiller dans nos machines, disques durs, baladeurs…etc. Ils ont découvert mes MP3 (que j’avais pourtant caché sur une partition chiffrée) et m’ont condamné à 15 jours de stage de réinsertion culturelle. Ces stages c’est la grande mode. Ils permettent aux gens de rentrer dans le droit chemin et d’apprécier la création artistique sous DRM. C’est là que j’ai appris à écouter la différence de qualité entre un MP3 sans DRM et un WMA avec DRM. Effectivement, le son est plus mélodieux sur le WMA. C’est le doux son de la légalité.

J’ai donc arrêté de pirater suite à ça…

Et je dois dire que depuis ACTA, depuis 10 ans, le monde a bien changé… Sur Internet, tout est devenu monotone. Tous les sites internet ont besoin d’un agréement officiel pour exister et si par malheur un de ces sites permet à un internaute d’enfreindre une des lois sur le copyright et la contrefaçon, ce dernier est immédiatement arrêté et le site doit fermer sous 3 jours. C’est ainsi que j’ai vu disparaitre Twitter d’abord, puis Facebook et MySpace… J’ai du me resigner aussi à fermer mon blog suite au refus de mon agréement par l’Hasi à cause du wiki expliquant comment protéger sa vie privée et passer outre la censure sur le net.

Bien sûr, des groupes de résistances se sont formés sur la toile mais au fil des années, ces terroristes qui prônaient l’ouverture de zones de libertés d’expression et d’échange sur le web, sont tous morts dans des conditions mystérieuses.

En 2019, mis à part les brevets sur les notes de musique dont je vous parlais au début, j’ai vu aussi l’arrivée des droits d’auteur sur les couleurs… Chaque fois que vous utilisez une couleurs, vous devez reverser un petit quelque chose à la SACEC (Société des auteurs, créateur et éditeurs de couleurs). Un jean’s bleu, c’était 0,15 €… Une menthe à l’eau c’était 0,03 €… et si vous vouliez une voiture rouge, il fallait alors débourser plus de 20 € à chaque fois que vous la sortiez du garage.

Les gens se sont donc mis à vivre en noir en blanc. Le monde est devenu gris et triste. Les gouvernements ont bien essayé via un nouvel amendement à l’ACTA de nous faire porter des lunettes aux verres fumés pour éviter de voir le ciel bleu et les couchers de soleil orangés mais l’OMS a du refuser cette disposition car cela provoquait des cancers de la rétine. (Ce qui du coup, aurait accélèré la baisse de fréquentation des cinémas. Ironique non ?)

Au final, depuis 2019, les gens ont tout arrêté… Ils ont arrêté d’écouter de la musique et de regarder des films. Ils ont arrêté d’aller sur le net, de regarder la TV ou encore de voyager. Les gens ont fait comme moi… Ils se sont posé sur leur balcon ou dans leur jardin et ont commencé à profiter de ce qui les entouraient… Le vent, le chant des oiseaux, le bruit des vagues, la couleur de l’herbe, du ciel, les conversations avec d’autres gens…etc…etc. Internet n’était plus qu’un mauvais souvenir… Mais bien que le piratage avait été éradiqué, le marché de la musique et du film, trop cher pour les habitants de cette planète, a continué de se casser la gueule… Les gens ne voyaient plus l’intérêt de regarder un film et de se le faire effacer du cerveau ensuite. D’écouter un morceau de musique auquel il manque des passages car l’éditeur n’a pas pu se payer les droits de toutes les notes. Ou encore de naviguer sur internet et de lire la même information partout, avec toujours cette menace de se faire arrêter par la police si leur FAI détectait un clic sur un mauvais lien.

Tel est donc mon quotidien en 2020… Un monde transformé grâce à l’ACTA et toutes ces lois qui a l’époque étaient qualifiées de liberticides mais qui au final ont rendu leur liberté aux Hommes en les rapprochant de la nature et des autres.

Mais ce matin, devant mon bol de café gris, sur mon balcon tout gris, avec mes moineaux gris et sans cordes vocales, j’ai quand même souri car j’ai lu dans le seul journal encore autorisé en France, que les ayants droits allaient combattre le fléau qui ravage le secteur musical en chute libre depuis 2010 en proposant une nouvelle façon de distribuer de la musique. Ils vont libérer une dizaine de morceaux de leurs DRM et autoriser les gens à les copier et de les écouter librement dans la rue sans reverser de frais à la SACEM. C’est une vraie révolution selon le journal et cela pourrait relancer l’économie de la musique… mais moi je m’en fous car ma musique et mes films, ils sont partout autour de moi et dans ma tête et ça, jamais ils ne pourront les DRMiser ou m’empêcher de les partager avec les autres…

Et toc ! :-)

A lire : http://fr.readwriteweb.com/2010/01/20/a-la-une/traite-acta-censure-loppsi-hadopi/

Et pour ceux qui veulent : http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/deed.fr

[photo]

» Article initialement publié sur Korben.info

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