OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Les concerts de moins en moins accessibles ? http://owni.fr/2011/04/26/les-concerts-de-moins-en-moins-accessibles/ http://owni.fr/2011/04/26/les-concerts-de-moins-en-moins-accessibles/#comments Tue, 26 Apr 2011 15:11:57 +0000 Capucine Cousin http://owni.fr/?p=31657 Il y a quelques semaines, j’ai assisté à un concert de PJ Harvey à La Maroquinerie, une petite salle parisienne de quelques centaines de places, très prisée pour la qualité de son acoustique. Joli concert, j’étais à 4 mètres de PJ, que j’écoute depuis 15 ans et ses débuts avec le très énervé et jouissif Dry. Je n’ai pas boudé mon plaisir, malgré l’auditoire un peu froid…

Nous étions une poignée de privilégiés à voir la grande dame trash british, qui mêlait punk-rock et mélodies folk. D’autant plus privilégiés que la lady n’a donné que deux concerts en France ce printemps, à l’occasion de la sortie de son dernier album, Let England shake : l’un, à l’Olympia – tarifs prohibitifs (60 € la place) – , et l’autre, à La Maroquinerie, auquel j’ai donc eu la chance d’assister en tant qu’invitée… Comme l’ensemble de l’auditoire. Il s’agissait en effet d’un “concert privé”, auquel n’assistaient que des invités, et des gagnants à un jeu-concours organisé par les partenaires, Deezer et Arte Live Web. Eh oui ! Car ce concert organisé par la plateforme d’écoute de musique à la demande Deezer était réservé aux heureux internautes membres de sa communauté ayant gagné des places via un jeu-concours en ligne – et bien sûr aux habituels invités de ce genre d’événements.

Des prix prohibitifs

En résumé, outre un concert à prix prohibitif pour le commun des mortels (non-invités donc), bien loin derrière les places à 30 € de sa tournée de 2002 – preuve que la star néo-punk s’est embourgeoisée ? – ce concert très privé était la seule alternative. Les concerts seraient-ils devenus un loisir de luxe ?

Ou tout simplement, ce n’est peut-être plus une activité rentable pour les maisons de production… Une étude menée sur quatre ans par le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV), publiée cette semaine, montre en effet la galère pour les jeunes artistes à se produire en tournées. Sur 650 demandes d’aide à la production déposées entre 2006 et 2009 (par de jeunes artistes, mais aussi par des musiciens confirmés comme Thomas Dutronc et Jean-Louis Murat), l’étude révèle une baisse de 22% de la durée moyenne par projet et un recul de 21% de la fréquentation. Ouch…

En fait, les “concerts privés” sont un format, une sorte de package de luxe très marketé en plein développement. Terriblement révélateur d’une industrie musicale en pleine déconfiture. En quête de nouvelles recettes. Depuis quelques années, ce nouveau format de concert se fait discrètement sa place dans les grilles de concerts. Il y a le cas particulier de concerts privés au premier degré – ces cas caricaturaux de chanteurs qui se produisent lors d’anniversaires de milliardaires, payés rubis sur l’ongle, ou qui font des sortes de gigantesques ménages, assurant l’ambiance musicale lors de défilés de mode ou de soirées corporate, comme le cas récent de Sting lors d’une teuf pour la lancement de l’Audi A8 (hélas… tout se perd).

Mais une autre sorte de “concert privé” commence à avoir les faveurs des majors : organisé par une marque, il est destiné à sa seule communauté, formé des gagnants à un jeu-concours en ligne, tirage au sort ou autre. On est bien loin du modèle de concerts simplement sponsorisés par des marques – radios, majors musicaux, marques de produits high-tech..

Des concerts qui relèvent autant de l’offre musicale que d’un nouveau package marketing, organisé – certes toujours par des radios et chaînes musicales, mais aussi des marques qui ont plus ou moins à voir avec cet univers : Deezer (le site de streaming musical) et Arte Live Web pour le concert privé de PJ Harvey, la Fnac pour ses Fnac Live (prochain jeu-concours : Moriarty…). L’occasion de générer des contenus exclusifs, qui seront accessibles en ligne à sa seule communauté : ce que propose SFR sur son portail SFR Live Concerts. Car l’opérateur téléphonique s’est lui aussi engouffré dans la brèche, en ouvrant son Studio SFR et ses showcases en 2008.

Co-branding et charity-business

Pour d’autres, les concerts privés sont un produit d’appel marketing pour attirer la clientèle prisée des djeuns… Jackpot pour la Société Générale, qui s’est associée à Universal Music pour organiser les concerts So Music. C’est en septembre 2008, lorsqu’ils ont lancé une carte bancaire co-brandée (un “nouvel espace publicitaire”, comme j’en parlais alors dans ce billet), “So’ Music”, destinée aux djeuns (important de les fidéliser.. pour qu’ils restent ensuite dans ladite banque), leur offrant entre autres des places de concerts à tarifs réduits… Concerts privés organisés exclusivement pour eux. Une forme de sponsoring d’un nouveau genre, en somme.

Même le charity business s’empare de ce format de micro-show exclusifs. Depuis le 4 avril, plusieurs chanteurs – Raphaël ouvrait le bal au Grand Palais – se sont succédés à des concerts privés réservés aux bénéficiaires d’un tirage au sort parmi des prêteurs (au minimum 20 euros) de MicroWorld, une plateforme de mircrocrédit qui met en relation prêteurs et entrepreneurs.


Article publié initialement sur Miscellanees.net sous le titre Les “concerts privés”: les concerts sont-ils devenus un loisir de luxe ?

Illustrations Flickr CC Christing-O K-Meron et Silent(e)

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#2oct: Retraites: Le temps des propositions? http://owni.fr/2010/10/01/2oct-retraites-le-temps-des-propositions/ http://owni.fr/2010/10/01/2oct-retraites-le-temps-des-propositions/#comments Fri, 01 Oct 2010 19:13:41 +0000 Admin http://owni.fr/?p=30205 Samedi, grève pour tout le monde (y compris chez OWNI)! Pour ce troisième mouvement en un mois, la rédaction a décidé de faire un pas de côté pour mettre en perspective l’ensemble des contrepropositions à la réforme des retraites de la majorité. Du NPA au FN, nous avons scanné point par point les programmes des partis français pour les retraites, ne relevant que les idées qui différaient du texte débattu au Sénat à partir de mardi (raison pour laquelle le Nouveau centre, qui rejoint le projet gouvernemental, est absent de notre tableau). A vous de nous signaler les oublis de notre inventaire et, aussi, de participer au liveblogging de cette journée en utilisant le tag #2oct qui succède aux #7sept et au #23sept des derniers mouvements, en n’oubliant pas de préciser #votreville pour être localisé ainsi que votre appartenance au secteur #prive ou #public.

Car ce samedi 2 octobre sera l’occasion de vérifier l’une des vraies surprises des dernières manifestations, un fait qui a fait leur force et la masse des cortèges : la participation des jeunes et des entreprises privées. Face aux différences gênantes entre les chiffres du ministère de l’Intérieur (997000) et des syndicats (3 millions de manifestants pour la CGT), le gouvernement s’était concentré sur le nombre de fonctionnaires dans la rue, le seul en baisse, niant le nombre de cortèges représentant le privé à travers la France. Au finish, les 231 mouvements avaient mobilisés plus de secteurs et plus de Français que le 7 septembre. Pour ce 2 octobre, la CGT prévoit 229 manifestations et deux à trois millions de personnes dans les rues. Autant que le 19 mars 2009 où les cortèges avaient égalé ceux du CPE.

L’autre vrai coup de pression de ce samedi 2 octobre pourrait être celui des villes moyennes : comme l’avait montré nos cartes des #7sept et #23sept, le mouvement de cette rentrée a gagné des terrains jusqu’ici vierge de toute banderole, sages sous-préfectures et petites villes tranquilles. Le sentiment d’injustice y a agité la France désindustrialisée par la crise et par les délocalisations l’ayant précédé.

Or, le soutien populaire pourrait bien créer le coin nécessaire à un vrai débat sur la réforme des retraites : alors que les députés ne seront réélu qu’après la présidentielle de 2012 (ce qui justifie de suivre aveuglément un Président dont on anticipe la réélection), les Sénateurs jouent leur place dès septembre 2011 et, à ce titre, certains rechignent à être associés à cette réforme des retraites. Soutien essentiel pour obtenir une majorité au Sénat, les centristes tendent ainsi l’oreille à la CFDT et comptent présenter dès l’ouverture du débat des amendements, notamment sur la retraite des femmes.

Un aménagement du projet de loi cosmétique qui ne reflétera en rien la réalité du débat : comme le montre le tableau synthétique ci-dessous, la quasi totalité des partis hors majorité s’accordent contre l’augmentation de la retraite à taux plein de 65 à 67 ans (en dehors du PRG) et toute la gauche est vent debout contre la retraite à 60 ans. Le reste du chemin a faire sera donc celui des manifestants. Avec vos propres banderoles ou en récupérant celle de notre concours Affichez-Vous, le mot d’ordre sera le même que les #7sept et #23sept : Manifestez-vous !

Tableau des contrepropositions identifiées par la rédaction

Retrouvez tout au long de ce tableau l’ensemble des contrepropositions à la réforme des retraites lancée par la majorité. La lecture en est simple : la première colonne à gauche liste les principaux points de la réforme, la seconde colonne rappelle ce qu’il en est dans les textes actuellement en place, la troisième donne le détail du projet de réforme sur chacun des points et ensuite chaque colonne présente les contrepropositions des divers partis de l’opposition. N’hésitez pas à nous signaler d’éventuels oublis dans notre inventaire.

Référence actuelle Texte en cours Lutte ouvrière NPA PCF Debout la République Parti radical de gauche PS Parti de Gauche Europe Ecologie République solidaire Modem FN
âge légal/taux plein 60 ans/65 ans pour le taux plein 62 ans/67 pour le taux plein, dans le privé comme dans la fonction publique. 60 ans à taux plein 60 ans à taux plein 60 ans à taux plein Maintien du taux plein à 65 ans 60 ans/65 ans Maintien à 60 ans pour l’âge légal 60 ans à taux plein 61 ans en 2030 (création d’un « contrat emploi retraite ») Maintien du taux plein à 65 ans - Passage à 62 ans pour l’âge légal.
- Maintien du taux plein à 65 ans
Pas de considération d’âge légal de la retraite, basé sur les annuités de cotisation
Durée de cotisation 37,5 à 41 ans et un trimestre en fonction de la date de naissance 41 ans et un trimestre en 2013, et à 41,5 ans en 2020. 37,5 annuités de cotisations 37,5 annuités de cotisation 37,5 années de cotisations. Allonger progressivement la durée de cotisation 37, 5 annuités 42
annuités dès 2016
regrette qu’on “ne privilégie pas l’allongement de la durée des
cotisations sur le report de l’âge légal de départ à la retraite”
Maintien à 40 annuités maximum de cotisation
Minimum vieillesse Aspa
: 8.507,49 euros par an pour une personne seule, à partir de 65 ans.
Minimum contributif : si la retraite a été calculée au taux maximum de
50 % : 595,64 euros ou 650,87 euros (minimum majoré)
Maintenu à 65 ans, conditions d’accès au minimum vieillesse assoupli pour les agriculteurs L’augmenter 1500 euros par mois Le Smic ou la pension d’invalidité si elle est supérieure Instaurer une retraite-plancher sur le modèle suédois Revenu au moins équivalent au SMIC Revalorisation des petites retraites grâce à une enveloppe de 5 milliards d’euros (commune aux
carrières pénibles)
Supérieur au Smic 85% du Smic
Mécanisme d’indexation des pensions rétablir le lien entre l’évolution des retraites et l’évolution des salaires Indexation sur les salaires plutôt que sur les prix. La revalorisation des retraites et du plafond de la Sécurité sociale selon l’indice d’évolution
des salaires.
Taux de remplacement et méthode de calcul taux de 75 % à un salaire de référence calculé sur les six derniers
mois de salaire, dans le privé taux de 50 % appliqué aà un salaire de
référence calculé sur les vingt-cinq meilleures années
Pas de changement L’augmenter 75 % du salaire brut, calculée sur les six meilleurs mois de salaire 75% du salaire moyen des 10 meilleures années. 6 derniers mois pour le service public. Maintien du taux de remplacement actuel 75% du dernier salaire, minimum, calcul basé sur les 10 meilleures années.
assiette Cotisations réparties entre les salariés et les employeurs, régime privilégié pour les
fonctionnaires
Aligner le régime des fonctionnaires sur celui du privé à l’horizon 2020. Suppression des cotisations salariales et l’intégralité de la retraite doit être payé par les
employeurs
Augmenter les cotisations patronales Suppression
des exonérations de charges patronales. Cotisations assises sur la
masse salariale. Majoration de 10 % des cotisations pour les entreprises
de plus de 20 salariés. Modulation du taux des cotisations patronales
selon le rapport « salaires / valeur ajoutée »
Calculer les cotisations patronales en tenant compte de la valeur ajoutée Le
taux de cotisation des fonctionnaires augmenterait de 7,85% à 10,55% en
2020 ; de 2012 à 2021, une augmentation de 0,1 point de cotisation
salariale et employeur chaque année.
déplafonnement des cotisations patronales Suppression
d’une partie des exonérations de cotisations. Augmenter de deux points
en 20 ans les cotisations patronales
Impôts et taxation du capital augmentation de 1 pour cent de la tranche la plus élevée de l’impôt sur le revenu Faire payer les revenus du capital Cotisation
nouvelle sur les revenus financiers des entreprises et des institutions
financières aux mêmes taux de cotisations que les salaires
une taxe Tobin et une taxe sur les banques La
tranche supérieure de l’impôt sera relevée d’un point, et seront taxés
davantage les stock options, et les retraites chapeau, les revenus du
capital, les plus-values.
- surtaxe de 15% de l’impôt sur les sociétés acquittée par les banques.
Taxation
de l’intéressement, de la participation et des stocks options au même
taux que les salaires ; prélèvement sur les profits des banques,
taxation des revenus financiers et des dividendes versés aux
actionnaires.
Augmenter
la CSG sur les revenus du patrimoine (hors dividendes) ; taxer les
stocks-options au même niveau que les revenus du travail et créer une
contribution retraites de 12 % sur les dividendes. [...] Une
contribution retraites de 3% sur les bénéfices des sociétés pourrait
être mise en place pour un rendement de 5 milliards.
Mettre à contribution des revenus, en particulier financiers. Elargissement du financement des retraites aux revenus du capital (stock-options, produits
financiers divers)
Retraite par capitalisation Non Non Non Non Non A partir de 3 ou 4 fois le smic, compléments financés par la capitalisation Suppression des subventions à l’épargne retraite par capitalisation. Le
développement de régimes de retraite complémentaire par capitalisation
ouverts à tous et dont les versements, auprès d’organismes agréés par
l’État, seront déductibles des revenus imposables.
Prise en compte de la pénibilité Les
assurés dont l’état de santé est dégradé du fait de leur exposition à
des facteurs de pénibilité peuvent partir à partir à 60 ans avec une
retraite à taux plein quel que soit leur nombre de trimestres.
tous
les salariés qui ont une incapacité égale ou supérieure à 20% ayant
donné lieu à l’attribution d’une rente pour maladie professionnelle (ou
pour accident du travail provoquant des troubles de même nature)
((accord d’une commission entre 10 et 20%) pourront partir à 60 ans et la
retraite sera attribuée à taux plein même s’ils n’ont pas validé tous
leurs trimestres. Ils ne subiront aucune décote.
Plus forte que celle proposé par le gouvernement prise en compte de la pénibilité. Départ à 55 ans pour les travaux pénibles revalorisation
des retraites pour les carrières pénibles grâce à une enveloppe de 5
milliards d’euros (commune aux petites retraites)
départ anticipé pour les carrières longues avant 60 ans la
pénibilité doit être prise en compte, à l’image des accidents du
travail, par une caisse autonome, alimentée par les entreprises au
prorata des risques qu’elles font encourir à leurs salariés
Oui prise
en compte de la pénibilité du travail et des contraintes
professionnelles dans le calcul des annuités (en particulier, droit pour
l’État de maintenir des règles spécifiques pour ses personnels dits en
service actif), sur base de négociations de branches.
Aménagement de la retraite pour les femmes, carrières morcelées en général Oui Oui Oui
Prise en compte des périodes de chômage, des études, des stages et des formations. Oui Oui Oui validation des stages, de l’apprentissage, des formations (à venir) et des périodes de chômage
au salaire antérieur
Carrières longues -Dispositif « Carrières longues ».
-Départ à la retraite avant 60 ans si cotisé deux
ans de plus que la durée nécessaire pour avoir une retraite à taux plein
- Dispositif « Carrières longues » élargi pour salariés ayant débuté à 17 ans.
- Départ à 60
ans pour ceux ayant commencé avant 18 ans.
- Départ à 58 ans pour ceux ayant commencé avant 14 ou 15 ans.
Proposition du gouvernement insuffisantes Demande de plus de justice dans la réforme en ce qui concerne les carrières longues - Ouverture d’une retraite plus précoce pour les salariés entrés dans la vie professionnelle
très tôt.

- Maintient des 60 ans pour les carrières longues (entrée avant 18 ans)

Régimes spéciaux Passage progressif de 50 ou 55 ans à 52 ou 57 ans.
Seront concernés en 2017 par les mesures
d’âge.
Maintien régime unique pour tous les Français, y compris les fonctionnaires, Unification des régimes de retraite - Un seul régime national, géré directement par l’État et sous contrôle du Parlement..
-
Possibilité aux régimes spéciaux de l’intégrer ou financement spécial
Pension de réversion égalité de droits entre couples mariés et couples pacsés - pensions de réversion : 60 % de la retraite du conjoint décédé
Autre levier de la politique des retraites - Handicapés: départ à 55 ans pour tous les travailleurs handicapés
- Extension du
dispositif Allocation équivalent retraite (AER) pour les seniors au chômage
- Interdiction des licenciements
- La répartition du travail entre tous
“un régime par point ou chacun pourra se constituer ses droits à la retraite et avoir accès à
une retraite à la carte”.
- Encourager la natalité.
- Faire des économies en se retirant de l’UE.
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Danah Boyd: la “privacy” n’est pas morte http://owni.fr/2010/03/15/danah-boyd-la-privacy-nest-pas-morte/ http://owni.fr/2010/03/15/danah-boyd-la-privacy-nest-pas-morte/#comments Mon, 15 Mar 2010 18:58:32 +0000 danah boyd (trad. Alexandre Léchenet) http://owni.fr/?p=10127 danah boy (pas de capitale, à sa demande) s’est exprimée dans le cadre du festival FXSW au Texas sur la vie privée, un des thèmes que la spécialiste des médias sociaux étudie dans le cadre de ses recherches. Un discours en réaction à des déclarations récentes de pontes du web annonçant la fin de la “privacy”.


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danah boyd est une sociologue qui explore, depuis plusieurs années, la façon dont les gens s’approprient les médias sociaux, qu’il s’agisse des adolescents américains sur MySpace, de tout un chacun sur Facebook, ou de l’élite geek sur Twitter. C’est aussi une excellente oratrice, très incisive, et c’était un réel plaisir de l’entendre prononcer la conférence plénière d’ouverture du festival.

La conférence portait sur la « privacy », qu’on peut traduire imparfaitement par droit à la vie privée ; autrement dit, la capacité des individus à contrôler quels aspects de leur vie sont rendus publics, et à quel public. Le discours de danah boyd s’inscrivait en réaction directe à plusieurs déclarations récentes de caciques de l’Internet annonçant la fin de la privacy : Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook, l’a déclarée « morte » il y a quelques mois, tandis que le PDG de Google, Eric Schmidt, avait soupçonné les gens qui s’inquiètent pour la privacy « d’avoir quelque chose à cacher ».

Contre cette tendance, la sociologue a affirmé que les gens n’ont à aucun moment renoncé à contrôler l’information personnelle qu’ils rendent publique, et que l’affirmation contraire est le reflet d’une croyance limitée à une petite élite sociale et technologique.

C’est cette croyance qui a conduit Google au désastre du lancement de Google Buzz : en construisant un réseau social public par défaut au sein de l’univers le plus privé qui soit (le mail), Google s’est heurté violemment au souci des individus de contrôler le passage de l’information des réseaux amicaux aux réseaux publics. C’est cette même croyance qui a poussé Facebook à rendre publique par défaut tout l’information de ses utilisateurs il y a quelque mois, avant de se rétracter en partie. Que cette croyance repose sur de l’ignorance ou le mépris des soucis réels des individus ordinaires ne change guère les données du problème.

Bien sûr, dans les couloirs de la conférence comme sur twitter, les festivaliers n’ont pas manqué de soupçonner que l’embauche récente de la sociologue par Microsoft Research contribue à la virulence vis-à-vis de Google et Facebook. La démonstration n’en reste pas moins intéressante.

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danah boyd a commencé par rappeler que, dans la vraie vie (IRL), la privacy est l’objet d’apprentissages et de négociations toujours imparfaites. On apprend à faire plus ou moins confiance aux individus quant à la rétention de l’information qu’ils ont sur nous ; et on apprend à faire plus ou moins confiance aux endroits dans lesquels on se trouve. Par exemple, si dans un café j’entends le récit très intime de mes voisins de table, la norme sociale veut que je me comporte comme si je ne l’avais pas entendu, et que je ne fasse aucun usage de cette information.

Ces normes sont toujours en partie floues, renégociées selon les situations ; elles n’en sont pas moins cruciales au bon déroulement de notre vie sociale. Le contrôle de la diffusion de notre information personnelle repose donc, IRL, sur des suppositions raisonnables quant à la confiance que l’on peut accorder aux gens et aux lieux.

Il n’y a aucune raison de croire que ces enjeux soient différents en ligne. Les gens ordinaires interviewés par la sociologue n’ont pas abandonné l’idée de contrôler la publicité de leur information. Bien sûr, ils sont prêts à publier beaucoup de choses en ligne, parce que c’est justement le ressort du web social : on se montre pour susciter des rencontres.

Mais cela ne signifie pas qu’on accepte par extension de tout montrer à tout le monde : un statut facebook s’adresse à mes amis Facebook, aux personnes avec lesquelles j’interagis régulièrement. Les adolescents qui s’exposent souhaitent se montrer à leurs pairs, pas aux gens qui ont du pouvoir sur eux (parents, enseignants, recruteurs, etc.).

La plupart du temps, lorsque le fruit de cette exposition (photos, blagues, opinions à l’emporte-pièce…) se trouvent être public, et accessible notamment aux moteurs de recherche, c’est par ignorance des règles de fonctionnement des sites et de leur évolution. d. boyd a ainsi demandé à des dizaines d’utilisateurs ordinaires ce qu’ils pensaient être leurs paramètres de privacy sur Facebook, avant de vérifier les paramètres effectivement activés : « le taux de recoupement est de 0% ».

Quelle importance finalement, du moins pour tous les gens qui n’ont « rien à cacher » ? D’une part, bien sûr, l’exposition d’une conversation privée à un public large peut générer des drames liés à la pression de l’attention publique. Mais surtout, danah boyd rappelle que l’espace public de nos sociétés occidentales n’est pas, du moins pas encore, parfaitement égalitaire et démocratique.

Lorsque les individus blancs, mâles, surdiplômés et ultra-compétents technologiquement, qui constituaient la majorité de l’auditoire, s’expriment dans l’espace public, ils estiment avec raison ne prendre aucun risque pour leur vie privée ou professionnelle.

Mais l’espace public, même numérique, n’est pas si accueillant pour tout le monde : danah boyd remarque que lorsque plusieurs sujets liés à la culture noire-américaine apparaissent dans les « trending topics » de twitter, les réactions de rejet fleurissent. Et plus généralement, de très nombreux professionnels sont trop dépendants de leurs clients et employeurs pour qu’on les contraigne à afficher leurs conversations en ligne ; il n’est sans doute pas souhaitable que les opinions politiques et religieuses des enseignants soient accessibles facilement aux parents d’élèves. La publicité sur les réseaux sociaux n’est pas nécessairement un outil de démocratisation de l’espace public, et peut très bien opérer dans le sens contraire.

En guise d’adresse finale aux décideurs et créateurs de technologies sociales présentes dans la salle, Danah Boyd a rappelé qu’il n’existe pas de solution miracle : le problème n’est pas d’inventer le bon algorithme. Il faut plutôt chercher des outils permettant de rendre autant que possible le contrôle aux utilisateurs, outils qui seront, comme dans la vraie vie, forcément imparfaits.

> Article initialement publié sur Frenchxsw

> Illustration par Michael Francis McCarthy et par alancleaver_2000 sur Flickr

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De la rareté vers l’abondance http://owni.fr/2009/09/11/de-la-rarete-vers-labondance/ http://owni.fr/2009/09/11/de-la-rarete-vers-labondance/#comments Fri, 11 Sep 2009 00:01:15 +0000 zoupic http://owni.fr/?p=3481 Pour libérer notre société de ses maux, de ses problèmes multiples, une de mes recommandations est de faire péter les uns après les autres les verrous de la rareté. Qu’est ce que ça veut dire? Comment s’y prendre? Pour remplacer par quoi?

D’abord, il me semble important de définir la rareté (cf wiktionnaire) :

  1. Choses qui sont en petit nombre, en petite quantité ; il est opposé à Abondance.
    Il y eut grande rareté de vin cette année-là.
    Ces objets coûtent cher à cause de leur rareté.
    La rareté en augmente le prix.
  2. Choses qui se trouvent difficilement.
    La rareté des diamants contribue beaucoup à leur prix.
    Il y a dans sa collection des pièces d’une rareté singulière.
  3. Il se dit au figuré de Ce qui est peu fréquent, peu commun.
    C’est une rareté que de vous voir.
  4. (Par extension) (Familier)
    Vous êtes, vous devenez d’une grande rareté.
    Pour la rareté du fait, Pour la singularité de la chose.
    Je voudrais bien voir cela, pour la rareté du fait.

La rareté peut être  naturelle ou contrôlée.

- Rareté naturelle : les rubis se trouvent en quantité limitée sur terre, les trèfles à quatre feuilles sont difficiles à trouver.

- Rareté contrôlée : ressources, services ou produits peuvent être contrôlés et maintenus en quantité limitée, par exemple le nombre de Prix Nobel distribués ou les diamants.

Pour vous expliquer une rareté contrôlée, @phyrezo vous présente en deux mots le contrôle des diamants : l’approvisionnement du marché est controlé par un oligopole de la production, un quasi monopole de la part de De Bears. Ce qui fait que les diamants, en particulier les belles pièces, sont retenus pour maintenir les prix. Pour les pieces plus communes (en dessous d’un carat), c’est surtout le marketing qui fait le prix – “un diamant est eternel” “Le prix de votre amour”

Bien.

Explosion du barrage

Explosion du barrage

La rareté contre l’abondance

Faire sauter les verrous de la rareté, ça ne donne pas toutes les solutions à nos problèmes, mais ça permet de reprendre les libertés, les responsabilités et la possibilité de se réapproprier ce qui nous appartenait. Comme nous le dit Richard Stallman, le libre c’est égalité, liberté, fraternité. Mais chacun redevient libre du processus de décision, ce n’est plus une entité, organisation privée et propriétaire qui choisit pour nous.

C’est donc bien un changement de paradigme: d’un côté, en quantité limitée et contrôlée derrière une barrière propriétaire, de l’autre côté :  libre et autogéré. En libérant chaque domaine il faut donc bien s’assurer que la responsabilité et la conscience des utilisateurs soient prêtes pour ne pas répéter les modèles basés sur la rareté et surtout, pour savoir gérer l’abondance avec succès!

Se servir une part du gâteau

Se servir une part de gâteau

Gérer l’abondance, c’est comme se servir à un buffet, prendre du fromage sur un plateau gratuit mais limité en quantité : il faut savoir penser aux autres, accepter de diminuer ses droits au fur et à mesure que le nombre d’usagers augmente (si matériel). On le fait tout naturellement à l’échelle locale, via l’éducation, le bon sens, la logique et le partage. A plus grande échelle il s’agit là encore de réaliser, prendre conscience et accepter le super organisme qui nous dépasse et que nous constituons pour d’autres ressources. Il faut revenir à l’échelle de chaque flux.

Si pour un gâteau il est très simple de voir le nombre de part et le nombre de personnes autour de la table, il nous faut revenir à cette logique et apprendre à répartir les richesses de façon plus juste pour les niveaux supérieurs. Une fois encore, il faut être capable d’avoir l’oeil micro et l’oeil macro, d’avoir la barre de zoom dans la cornée et d’être capable de passer de l’unité à l’holoptisme, la vue d’ensemble.

Une super machine qui calcule tout?

Dans la vidéo de Zeitgeist, le projet Venus propose une machine qui calculerait pour chaque ressource et produit les réserves restantes et la quantité autorisée. Sans aller dans un cas aussi global, il est très jouable de définir via des systèmes de gestions locaux, les besoins, les demandes, les ressources disponibles qui peuvent être partagées ou allouées.

Règles générales et règles locales

D’un autre côté, chaque système local doit être régi à un niveau plus global vis-à-vis des problèmes généraux que nous avons. Il n’est plus possible de laisser une communauté gérer certaines ressources comme elle l’entend puisque, étant tous interconnectés, les émissions de CO2 des uns jouent sur le climat global. D’où la nécessité de règles générales, de limites à ne plus dépasser au niveau planétaire.

Parallèlement, il nous faut des systèmes avec des règles qui ne sont pas définies globalement car les enjeux, contraintes, populations, ressources et cultures sont complètement différentes à chaque endroit.

C’est ce qu’on appelle le glocal, contration de Global et Local.

Matériel et Immatériel

Abondance et rareté fonctionnent de façon inverse selon s’ils sont dans un monde matériel et immatériel.

Monde matériel: Tout est en quantités limitées. Les limites peuvent être grandes, mais dans un paradigme holoptiste, c’est limité.

Monde immatériel: Tout est multipliable à l’infini pour une abondance infinie au niveau technique.

dans le matériel quand je partage je divise, dans l’immatériel quand je partage je multiplie“.

Donc on a des problèmatiques inverses: le but est évidemment d’avoir des systèmes gérés en abondance dans les deux cas.

Alors que l’immatériel se créée et multiplie à la demande suivant l’offre de création et diffusion, le matériel a la vie dure: toutes les ressources basiques sont fournies par la Terre en quantité limitée et il est impossible, pour l’instant, de créer de la matière. Elles se transforment, changent, se mêlent et se démêlent en un gigantesque cycle. Ainsi leur allocation doit s’affiner au fur et à mesure que l’occupation du territoire et la population de la Terre augmentent afin de permettre à chacun de garder une part égale.

Le combat de la rareté contre l’abondance dans le monde  immatériel?

On a vu qu’au niveau technique, l’immatériel permet l’abondance aisément. Cela a permis très vite aux humains de se retrouver sur Internet pour partager, échanger, diffuser leurs oeuvres, leurs savoirs et connaissances. Au niveau juridique et mentalité, il y en a encore qui n’ont rien compris et veulent garder le contrôle. La quantité d’eau augmente et le barrage commence à grincer, il ne retient plus aussi bien l’eau.

Il s’agit donc de convaincre ces dynosaures d’orienter et de guider le courant de façon plus fluide, plutôt que de s’y opposer en barrage. Les convaincre pour les aider, ou les laisser y rester.

On ne peut arrêter l’eau, on ne peut arrêter l’information, on ne peut arrêter Internet.

Nous ne pourrons reculer devant ces libertés auxquelles nous avons goûté: il s’agit ici d’abolir le copyright. Respecter l’auteur oui, en le mentionnant. Je le remercie par mon attention, pas par mon argent.

Comment les artistes vivraient alors s’ils donnent gratuitement leurs chansons?

Pour Gerd Leonhard et Chris Anderson, l’abondance et le gratuit se sont déplacés, mais il continue d’y avoir des moyens de se financer à côté du gratuit. On avance doucement en libérant le contenu.

Gerd Leonhard les décompose en 3 parties : Access, Embodiment, Experience, ce qu’on peut traduire en l’accès, la forme de représentation et l’expérience.

Exemple: Pour aller sur Internet, je ne paye pas une quantité de contenu, je paye l’accès via mon FAI. Pour radiohead je ne paye pas pour le mp3, je paye pour le CD avec la pochette collector. Pour le Dalaï Lama, je ne paye pas pour ses prières ou sa parole, je paye pour le voir lors d’un événement.

Chris Anderson lui nous dit qu’il faut faire du gratuit et déplacer l’offre rare et payante vers autre chose. Si vous distribuez votre livre gratuitement, les lecteurs achèteront des produits dérivés. Vous me direz c’est l’inverse de ce que font les marques qui distribuent des produits dérivés pour sympatiser avec le client et lui faire aimer la marque et au final acheter ses produits.

L’immatériel sera abondant, le matériel restera précieux

Par leurs exemples Chris Anderson et Gerd Leonhard appliquent toujours une semi-rareté en libérant la partie immatérielle mais en transférant la valeur de rareté sur le matériel. Ainsi Radiohead distribue de façon infinie ses chansons, c’est l’abondance, mais il faut payer pour les voir en concert. Eh oui, on a beau faire son possible, l’expérience est unique, l’événement provoque la rareté. Ce n’est pas un hasard si assister à un opéra a tant de valeur.

L’idéal dans une société d’abondance est quand l’offre dépasse la demande. Ainsi les choix sont multiples et toutes les options disponibles. La vitesse à laquelle les heures de vidéos s’accumulent dans les bases de données de Youtube est à se demander si quelqu’un sera capable de regarder tout ça un jour?

Compétition ou coopération?

Pour ce qui est de maintenir la compétition, puisqu’on aime quand même se challenger et il faut toujours un mix entre compétition et coopération, c’est évidemment la coopétition. Comme les groupes de codeurs de linux s’aident et se concurrencent, l’objectif commun est le même, la victoire n’est pas matérielle mais symbolique et émotionnelle. Elle s’exprime en échelle de réputation et de remerciement pour l’apport à l’intelligence collective globale.

On est tout à fait dans la société de connaissance de Marc-André Ghyxx. Chaque être humain apportant son cerveau et ses contibutions à l’ensemble de la société. On peut imaginer une compétition rude pour les projets les plus pointus, et une coopération complète sur les partages des ressources de bases et sur les recherches pour l’Humanité. Il faut toujours jouer sur les deux tableaux et adapter en fonction du terrain et de la ressource avec laquelle on joue.

De la rareté à labondance dans les mondes matériels et immatériels

De la rareté à l'abondance dans les mondes matériels et immatériels - CC by-nc-sa zoupic

Si on résume le tout, ça pourrait donner quelque chose comme ça. Amusez-vous en famille ou avec des amis à réfléchir à une ressource ou un bien immatériel que vous pourriez libérer, et comment. Je n’ai par exemple pas fait l’Internet.. à vous! Je mettrai à jour si la récolte est abondante.

Article originellement publié sur http://www.zoupic.com

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