OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Tea Party & Sarah Palin: une infusion de com’ saveur réac http://owni.fr/2010/11/17/tea-party-sarah-palin-infusion-de-communication-saveur-reac/ http://owni.fr/2010/11/17/tea-party-sarah-palin-infusion-de-communication-saveur-reac/#comments Wed, 17 Nov 2010 14:53:27 +0000 Olivier Cimelière http://owni.fr/?p=35948 Cette percée fulgurante du Tea Party qui bouscule les lignes politiques conventionnelles, repose sur une communication binaire surfant volontiers sur un détonnant cocktail où les peurs sociétales de l’Amérique profonde s’entremêlent aux valeurs ancestrales des Pères Pèlerins, fondateurs de la Nation américaine.

Difficile aujourd’hui de prédire si le Tea Party relève de la bouilloire contestataire sans véritable lendemain ou si au contraire, cette décoction populiste va continuer à infuser dans une opinion publique américaine chauffée à blanc par la récusation des élites et la crise financière. Décryptage d’un phénomène politico-médiatique aux idées courtes mais aux longs effets de traîne que réseaux sociaux et postures communicantes chocs sèment à tout vent. Avec en embuscade depuis son Grand Nord sauvage, une Sarah Palin revigorée et sans complexes pour lancer une OPA sur le Tea Party et se positionner pour 2012.

Les pionniers du Tea Party débarquent

Si le site officiel du Tea Party attribue la paternité du mouvement à un ancien Marines de carrière dénommé Dale Robertson, force est de constater que cette figure tutélaire affichée s’est pourtant diluée au profit de personnages nettement plus marquants. Lors de la campagne électorale de mi-mandat qui vient de s’achever début novembre, Dale Robertson a été largement éclipsé par une flopée de candidats « grassroots » qui ont fait le miel des médias en mal de portraits croustillants.

Signe des temps numériques ou pas, les militants du Tea Party décernent plutôt l’acte fondateur du Tea Party à une blogueuse implantée à Seattle, ville berceau d’entreprises américaines aussi mythiques que Boeing, Microsoft, Starbucks et Amazon et surtout qualifiée de « Mecque des libéraux radicaux » dans la bouche dédaigneuse des conservateurs les plus durs. Bien que la « marque » Tea Party soit en réalité apparue dans la foulée de la crise financière de 2008, la légende retient prioritairement le nom de Keli Carender comme étant l’instigatrice qui a provoqué la véritable étincelle de l’écho médiatique dont jouit aujourd’hui le mouvement.

Énervée par le « stimulus package » de Barack Obama, un plan visant à injecter 787 milliards de dollars pour redynamiser l’économie américaine en berne, elle ouvre un blog en janvier 2009 pour faire entendre son opposition virulente. Sur ce blog, elle se présente sous les traits masquées d’une super-héroïne prénommée Liberty Belle qui « ne veut pas s’asseoir oisivement à regarder les sociaux-démocrates, les socialistes ou les communistes essayer de dominer ce pays ».

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Le ton est donné. Le mois suivant, elle s’empare de l’emblème Tea Party, lance un appel à la mobilisation et réussit à faire descendre dans la rue 120 personnes. Fière de son coup d’essai, elle enfonce le clou à plusieurs reprises à travers son blog. Six semaines plus tard, 1200 personnes se rassemblent pour sa Tax Day Tea Party à Seattle.

Son initiative rencontre d’autant plus d’écho qu’en février 2009, l’ascension médiatico-politique du Tea Party bénéficie d’un effet d’aubaine amplificateur non négligeable. Peu de temps après la première manifestation de Seattle, un journaliste TV, Rick Santelli, s’égosille en direct sur CNBC le 19 février 2009 contre la décision du Président des États-Unis de consacrer 75 milliards de dollars pour venir en aide aux propriétaires croulant sous les dettes et les saisies d’huissiers. Pour contester ce qu’il estime être une dilapidation de l’argent du contribuable, il suggère l’idée d’organiser une « Tea Party » à Chicago. La vidéo publiée dans la foulée sur YouTube, rencontre aussitôt un succès phénoménal. La légende du Tea Party est en marche !

« Tea Party » ou le code génétique de l’Amérique

Dans la conscience collective nationale, l’épisode haut en couleurs du Tea Party de Boston constitue un puissant et magnétique référent culturel et patriotique au même titre que l’exécution de Louis XVI en France qui précipita la chute de la royauté française en 1789. En d’autres termes, la « Boston Tea Party » est indéfectiblement enchâssée dans l’ADN de l’Amérique des Pères Fondateurs. Cette page glorieuse est en effet le premier acte de désobéissance civile de l’embryonnaire nation américaine à l’égard de la tutelle royale anglaise.

En 1773, une soixantaine de Bostoniens grimés en Indiens grimpèrent à bord de trois bateaux de la Couronne britannique mouillant dans le port de la ville et jetèrent par-dessus bord les cargaisons de thé. Objectif : protester contre les taxes imposées par la monarchie anglaise aux 13 colonies d’Amérique du Nord. Cette contestation marquera le coup d’envoi de la Révolution américaine, un conflit armé au cours duquel l’Amérique de George Washington déclarera son indépendance en 1776 avant de parvenir à se la voir définitivement accordée par Londres en 1783.

De ce fait saillant de l’Histoire de la bannière étoilée, les supporters du Tea Party en tirent aujourd’hui un argument instaurateur pour revenir aux fondamentaux de l’identité unitaire américaine dont à leurs yeux, la nation contemporaine (surtout celle de Barack Obama !) s’est bien trop éloignée. Les mêmes oublient un peu vite au passage que cette même nation américaine a pourtant accouché dans la douleur et dans le sang.

Les divergences philosophiques profondes et des conflits meurtriers ont été légion comme la célèbre Guerre de Sécession où s’affrontèrent les Nordistes, tenants d’une nation fédéraliste avec un État fort et les Sudistes, partisans d’une nation confédérale avec un État réduit à son strict minimum. Aujourd’hui encore, ces lignes de fracture perdurent dans les mentalités et se retrouvent d’ailleurs dans la hargne du Tea Party envers le pouvoir central de Washington et l’administration Obama.

En dépit de ces contradictions sous-jacentes mais opportunément mises sous le boisseau, le Tea Party déroule une symbolique magnifiée qui emprunte très abondamment à l’époque des insurgés américains. À chaque manifestation d’envergure, les supporters du Tea Party n’hésitent pas à ressortir des placards de l’Histoire, les tricornes, les perruques et les redingotes des insurgés des 13 colonies de la Nouvelle-Angleterre. Sans complexes, ils rejouent la scène version 2010 sous l’œil gourmand des médias trop ravis de saisir des images clinquantes à mi-chemin entre la fresque historique farfelue et le bal masqué de mauvais goût.

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« Tea Party » ou la marque de la vraie Amérique

Décorum plouc ou pas, les sympathisants n’ont qu’une obsession en tête lors de leurs rassemblements : établir le nom de Tea Party comme le label exclusif de l’Amérique authentique. À cet égard, la dénomination « Tea Party » fonctionne aujourd’hui véritablement comme le principe marketing de la marque ombrelle bien connu dans l’univers des biens de grande consommation. Ce principe permet de cautionner des déclinaisons de produits en les adossant à une marque puissante et notoire et ainsi de leur faire bénéficier de l’estampille rassurante de la marque mère.

Depuis 2009, le mouvement du Tea Party a ainsi essaimé sur tout le territoire américain. Si les dénominations varient selon les villes et les États, toutes revendiquent et accolent en revanche la mention « Tea Party » comme un sceau validant leur combat. Une marque qui dispose même de sa boutique de merchandising en ligne dans laquelle tout militant peut afficher ses sympathies envers le Tea Party.

Un roadshow contestataire né en Californie pour s’achever sur la côte Est dans le New Hampshire se baptise par exemple « Tea Party Express ». À Nashville dans le Tennessee, un groupe se désigne sous le nom de « Tea Party Nation » pour faire entendre son attachement au 2ème amendement de la Constitution (à savoir le droit de chaque citoyen de porter des armes). À Chicago, un « Tea Party Patriots » se forme pour pousser plus haut et plus fort le cri de colère du journaliste de CNBC, Rick Santelli.

Un autre groupe, émanation de l’ex-milice anti-immigration du Minutemen Project, se qualifie de « 1776 Tea Party » pour défendre Dieu et la Nation. L’association ResistNet reprend à son compte le sigle Tea Party pour appeler à la résistance contre la propagation du socialisme à travers les réseaux numériques. Une autre intitulée « White Plains Tea Party » entend faire tomber les élus d’un comté de l’État de New York au motif qu’ils ont oublié les fondamentaux constitutionnels. Et ainsi de suite à travers les USA.

Au total, près de 750 groupes agrègent et catalysent les mouvements d’humeur du Tea Party jusqu’au 15 avril 2009, date butoir qui marque le paiement des impôts pour les contribuables américains et par la même, une échéance métaphorique pour le mouvement de grogne. Avec un point d’orgue qui intervient le 12 septembre 2009 à Washington où une immense manifestation baptisée « Taxpayer March » fait converger des milliers de « tea partiers » en provenance de tous les États-Unis.

Tryptique basique pour citoyens excédés : Drapeau, Dollar et Dieu

Si le Tea Party a rallié autant de supporters sur le territoire américain, c’est parce que le mouvement ne s’embarrasse guère de circonvolutions oratoires pour frapper au cœur et convaincre son auditoire. Les arguments sont en règle générale basiques. Ils parlent de manière simpliste mais terriblement efficace des maux complexes de la nation à des Américains majoritairement blancs, souvent chrétiens convaincus, défenseurs en diable des valeurs familiales et patriotiques les plus strictes et plus étonnant, plutôt éduqués et aisés financièrement comme l’a révélé une enquête démographique du New York Times en avril 2010. Au final, leur poids est estimé à 18% de l’électorat américain.

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Le fonds de commerce argumentaire du Tea Party repose sur trois piliers indissociables qu’on pourrait résumer en trois mots-clés :

  • Drapeau ou haro sur le pouvoir central ! Les discours s’inspirent largement de la veine antifédéraliste qui avait combattu (en vain) la rédaction de la Constitution de Philadelphie en 1787 au motif qu’un pareil texte serait attentatoire à la liberté individuelle de chaque citoyen américain. Lois fédérales et élites politiciennes de Washington sont conspuées à longueur de temps pour avoir souillé les valeurs fondatrices du pays. Si les Républicains en prennent au passage pour leur grade, accusés d’avoir bradé leurs principes, c’est surtout Barack Obama qui cristallise les haines au point d’être dépeint régulièrement en dictateur sous les traits de Staline ou d’Hitler.
  • Dollar ou stop aux impôts ! C’est sans nul doute l’épine dorsale du Tea Party même si tous les militants ne l’admettent pas aussi ouvertement. Il n’en demeure pas moins qu’ils ont l’impression d’être toujours les cochons de payants pour le sauvetage des banques frappées par la crise financière, l’aide aux chômeurs jugés fainéants et au final, l’impossible renflouement de l’abyssale dette publique. Pas étonnant qu’ils soient aussitôt montés en première ligne pour combattre le projet de réforme du système de santé américain entrepris par l’administration Obama début 2010. Un projet qu’ils qualifient de socialiste, voire de soviétisation de la société américaine.
  • Dieu ou retour aux principes chrétiens des Pères fondateurs. La référence à la chrétienté est récurrente dans les discours du Tea Party. Mais au-delà des convictions religieuses, elle sert aussi à plus ou moins « habiller » d’autres combats troubles contre l’immigration noire, asiatique et latino, contre les médias jugés trop gauchisants pour la plupart et contre l’islam qui attaque et envahit subrepticement l’Amérique. Là encore, c’est le président Obama qui sert de cible défouloir où il est qualifié de « Mau-Mau kenyan crypto-musulman ».

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Avec le Tea Party, les contre-vérités et les inventions à grosses mailles se ramassent à la pelle. Mais qu’importe, les militants trouvent là un exutoire réconfortant à leur colère et leur angoisse. Exemple pioché parmi les nombreuses affirmations du Tea Party : la loi sur la réforme du système de santé. Pour mobiliser, le Tea Party a alors prétexté que des « death panels » dirigés par des médecins bureaucrates allaient être mis en place pour euthanasier les personnes âgées si les ressources budgétaires pour les soins médicaux le requièrent !

Cet été toutefois, le Tea Party s’est efforcé de gagner un peu en consistance et d’étoffer sa rhétorique militante. Il s’est notamment doté d’un programme intitulé « Contract From America » qui repose sur 10 points clés devant impérativement structurer l’action publique de tout élu. À ce jour, le site Web spécialement dédié claironne avoir obtenu plus de 300 signatures de candidats et d’élus.

Poujadisme concentrique à la sauce américaine

À la différence des mastodontes antédiluviens de la vie politique américaine que sont l’éléphant républicain et l’âne démocrate, le Tea Party n’est pas à proprement parler un parti structuré comme tel mais plutôt un amalgame de contestataires en butte à l’oligarchie traditionnelle constituée par les Démocrates et les Républicains. Pour autant et fort de ses arguments massue, il opère çà et là des brèches qui bousculent les rentes politiques locales.

Une particularité de ce mouvement spontané et virulent est qu’il se déploie par capillarité sur tout le territoire. Soit en générant des boutures locales se réclamant ouvertement du Tea Party et griffées comme telles, soit en en bénéficiant du support logistique et financier de think tanks privés aux idées cousines comme par exemple, Americans for Tax Reform, Regular Folks United, Americans for Prosperity ou encore Freedom Works. Réservoirs à idées qui établissent en outre de nombreuses passerelles programmatiques avec l’aile dure des Républicains. Cette approche idéologique concentrique ne repose pas sur les épaules d’un leader charismatique mais se décline au contraire par le truchement de personnalités engagées et suscitant très facilement le buzz médiatique avec des déclarations à l’emporte-pièce.

C’est le cas par exemple de Christine O’Donnell, candidate malheureuse au Sénat dans l’État du Delaware. Sous des airs d’oie blanche un peu nunuche, elle a pourtant vite focalisé l’attention sur elle autour de deux phrases simplissimes mais séduisantes pour l’Américain blanc moyen : « I am You » et « Je n’ai pas fait Yale ».

Elle a gagné encore un peu plus en bruit médiatique en affichant pendant sa campagne électorale, son aversion avérée de la masturbation parce que synonyme d’adultère selon elle. Une notoriété à peine ternie lorsqu’une télé américaine exhume une vidéo de 1999 où elle racontait ses prestations de sorcellerie sur un autel satanique durant sa jeunesse !

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Quasiment partout, le Tea Party excelle dans l’art de confier ses couleurs à des candidats particulièrement clivants et ne reculant devant aucune déclaration tapageuse. Autre exemple dans le Nevada avec Sharron Angle (également vaincue dans sa tentative sénatoriale). Dans un même élan, elle appelle au boycott des Nations Unies qu’elle qualifie de « bastions gauchistes », affirme que la loi islamique de la charia doit être boutée des États-Unis car déjà en vigueur dans certains comtés et gaffe pour finir en confondant des écoliers latinos avec des écoliers asiatiques lors d’une visite dans un établissement scolaire.

Dans un registre quasi identique, Carl Paladino (battu lui aussi pour le poste de gouverneur de l’Etat de New York) a fait très fort au point de longtemps menacer dans les sondages son adversaire démocrate. Surnommé « Crazy Carl », l’ex-promoteur est parti en croisade contre la construction d’une mosquée sur les lieux même de Ground Zero où se sont écroulées les tours jumelles du World Trade Center, a étrillé la communauté gay en estimant « qu’il n’y a pas de quoi être fier quand on est un homosexuel dysfonctionnel. Ce n’est pas la façon dont Dieu nous a créé » avant de matraquer un adversaire politique en le traitant de « Hitler » et d’« Antéchrist »

Quand le Tea Party tisse sa Toile

En soi, les courants droitiers extrémistes et populistes ont toujours traversé chroniquement la scène politique américaine. Ils ont notamment nourri idéologiquement la campagne victorieuse de Ronald Reagan en 1980 ou celle échouée de Ross Perot en 1992. Pour autant, ils ne sont jamais réellement parvenus à décrocher une visibilité forte sur l’échiquier politique américain.

À la différence de ses précurseurs, le Tea Party jouit en revanche d’une viralisation et d’une médiatisation hors pair de ses idées. Pour vite émerger, le mouvement a su habilement combiner un activisme digital sans relâche sur Internet avec quelques puissants relais médiatiques au premier rang desquels figure la chaîne de télévision ultraconservatrice Fox News.

C’est d’abord sur le Web que le Tea Party a mené ses premières incursions militantes. À la suite de la blogueuse Keli Carender, une myriade de sites, blogs et autres plateformes militantes a champignonné sur Internet pour recruter de nouveaux adhérents et opérer un harcèlement numérique de grande ampleur auprès des élus républicains et démocrates.

Le site-blog de Freedom Works est particulièrement emblématique de cette capacité du Tea Party à s’emparer du levier d’influence que constitue le Web 2.0. Le site a notamment établi une cartographie exhaustive des candidats en lice pour le Tea Party. Il offre aux sympathisants la possibilité d’interagir avec eux et les noter en fonction de leur implication dans la campagne pour pousser les idées de Tea Party.

Dans la même optique mais à l’adresse cette fois des candidats sortants, le site Freedom Works propose des modèles de courriels sur différentes thématiques sensibles pour inonder les boîtes des élus, le tout étant mis à jour quotidiennement avec des graphiques, des courbes d’audience et des compteurs montrant la progression in situ des idées de Tea Party.

Rien n’est laissé au hasard. Chaque espace numérique est occupé comme il se doit. Sur YouTube par exemple, Tea Party s’est doté d’une chaîne intitulée « Tea Party Movie » qui retrace en images les différentes marches et meetings électoraux sur le territoire américain. Enfin, chaque site renvoie à d’autres sites de la même obédience constituant ainsi un maillage incroyablement dense dans lequel le militant peut largement trouver de quoi étayer ses convictions.

Les militants sont de surcroît vivement encouragés à s’emparer de tous les outils électroniques qui sont à leur portée. Un reportage d’Hélène Vissière, correspondante aux États-Unis du magazine Le Point, raconte ainsi un meeting électoral qui se double d’une séance de formation intensive aux médias sociaux où l’on enseigne l’usage de Twitter ou encore l’entrisme éditorial sur Wikipedia pour orienter les définitions sur des sujets sensibles et chers au Tea Party.

Quand les médias prêtent leur porte-voix

Si Tea Party s’est taillé un inexpugnable bastion numérique, ce dernier n’aurait probablement guère pu dépasser les bornes du Web si des relais médiatiques classiques puissants n’avaient pas prêté leur concours et relayé à plus grande échelle. La stratégie médiatique de Tea Party a donc consisté à investir les tribunes d’expression que sont les stations de radio et les journaux locaux. Jugée gauchiste irrécupérable et de mèche avec les élites politiques, la presse nationale a en revanche été largement boycottée, exceptée la chaîne TV Fox News connue pour ses engagements droitiers musclés.

Sur cette chaîne détenue par le magnat de la presse Rupert Murdoch, un homme est particulièrement à la pointe de la lutte pour le conservatisme. Il s’agit du polémiste et animateur Glenn Beck. Inlassable pourfendeur des adversaires du conservatisme, l’homme multiplie les interventions et les talk-shows dans les radios, sur les sites Web. En parallèle, il écrit dans le magazine mensuel Fusion et a déjà publié six livres brûlots. Mais c’est véritablement sur Fox News qu’il fait le plus parler la poudre argumentaire avec une émission intitulée « les vendredis des fondateurs ».

Dans ce programme, il donne libre cours à sa réinterprétation personnelle de l’histoire des États-Unis pour mieux asséner ses convictions militantes. Ainsi, il n’a pas hésité à se réapproprier à sa sauce le symbole de la célèbre marche de Martin Luther King sur Washington en août 1962 pour dérouler la sienne 47 ans plus tard dans la même ville mais cette fois tout à la gloire des militaires, des patriotes et des supporters du Tea Party sous la bannière de « Restaurer l’honneur de l’Amérique ».

En plus de cet omniprésent et puissant porte-voix qui touche près de 3 millions de téléspectateurs avec son show et 10 millions d’auditeurs du Sud et du Midwest avec ses programmes radio, le Tea Party s’appuie également sur l’impact non moins négligeable d’un autre vibrion en croisade : Rush Limbaugh. Prédicateur halluciné à la radio, il martèle en boucle et sans discontinuer l’argumentaire contestataire du Tea Party qu’il décline ensuite sur son portail Internet personnel.

Le Tea Party dans les griffes de Mama Grizzly ?

Malgré une mobilisation intense, le Tea Party n’a pas engrangé autant de sièges qu’il escomptait lors des élections de mi-mandat. Certes, il s’empare des postes de gouverneur en Floride, dans le Maine et en Caroline du Sud. Il signe également son entrée sur les bancs du Sénat avec le gain de sièges en Floride, en Caroline du Sud et dans le Kentucky. Néanmoins, on est encore loin du tsunami électoral qu’espéraient voir déferler les « insurgés » du Tea Party au Congrès américain.

Peut-on parler pour autant de mouvement voué à refluer dans l’anonymat des sites militants de la Toile ? Rien n’est moins sûr. La percée médiatique de l’hétéroclite attelage du Tea Party a notamment bénéficié à une personnalité politique républicaine atypique : Sarah Palin. Ex-co-listière du malheureux candidat républicain John McCain à la présidence des États-Unis en 2008 et ancienne gouverneure de l’État d’Alaska, Sarah Palin surfe sans vergogne sur la vague de fond contestataire amplifiée par le Tea Party durant ces vingt derniers mois.

L’image rustique et authentique qu’elle s’échine à cultiver s’emboîte plutôt bien avec le socle argumentaire du Tea Party. Son autobiographie à succès en atteste. Going Rogue – An American Life (littéralement « Entrée en rébellion ») figure en très bonne place dans les ventes en librairies au point d’avoir supplanté les Mémoires d’une autre figure emblématique de la vie politique américaine, Bill Clinton.

Dans ce livre, elle jongle à l’envi avec des valeurs très similaires à celles véhiculées par Tea Party. Elle porte fièrement en bandoulière son origine villageoise de Wasilla, improbable patelin de 5500 habitants situé aux confins de l’Alaska. Origine qui la rend de fait en termes d’image, empathique et proche des aspirations du peuple américain. Elle y décline aussi sous toutes les coutures le concept « palinien » de la Mama Grizzly : une mère de famille active et engagée, une femme au physique flatteur et au maquillage enjôleur, une femme au langage tranché qui n’hésite pas à en remontrer aux hommes, notamment avec son expression fétiche de « Man Up » (littéralement « Sois un homme »).

C’est exactement l’incarnation de ce concept de mère conservatrice que l’on retrouve à travers plusieurs figures de proue féminines de Tea Party ou assimilées. Qu’il s’agisse de Michele Bachmann, députée du Minnesota, Christine O’Donnell, candidate battue du Delaware, Nikki Haley, élue gouverneur de la Caroline du Sud ou encore Dana Loesch, co-fondatrice du Tea Party de Saint-Louis/Missouri, toutes possèdent en commun d’être un clone parfait de « Mama Grizzly ». Laquelle n’a d’ailleurs pas hésité à leur prêter main forte et à s’afficher à leurs côtés lors de la dernière campagne électorale.

Conclusion – Palin, future tasse de thé du Tea Party ?

Même les Démocrates et les Républicains modérés en conviennent. La bataille électorale de mi-mandat de novembre 2010 a ouvert des brèches durables pour le Tea Party. Que le mouvement survive ou s’effiloche, il aura dans tous les cas ancré certaines revendications droitières au sein d’une forte frange de l’électorat américain.

Faut-il y voir une coïncidence fortuite ? Toujours est-il que Sarah Palin vient d’enclencher la vitesse supérieure en matière de communication. Déjà forte d’une page Facebook qui rassemble 2,4 millions de fans, d’un fil Twitter qui compte près de 300 000 abonnés et de deux sites militants dédiés à son œuvre (Conservatives4Palin et Team Sarah), l’égérie populiste de l’Alaska s’apprête à publier courant novembre un deuxième livre sous le titre à la tonalité très Tea Party de « America by Heart : Reflections on Family, Faith and Flag ».

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Alors peut-on parler d’OPA communicante sur le Tea Party ? Sarah Palin dispose en tout cas de tous les atouts pour capter et engranger l’écho acquis par le jeune mouvement populiste. En janvier 2010, elle a signé avec Fox News un contrat de 3 ans pour livrer ses commentaires sur l’actualité et participer à un show sur la même chaîne baptisé « Real American Heroes » où elle met en exergue des héros de l’Amérique injustement ignorés.

Plus fort encore ! Depuis le 14 novembre sur la chaîne câblée TLC, Sarah Palin présente « Sarah Palin’s Alaska », un programme de télé-réalité tout à la gloire de … Sarah Palin elle-même. La bande annonce est à l’aune de l’imagerie « Far West » du Tea Party. Elle s’attarde sur la vie au grand air de Mama Grizzly, fusil à lunettes ou canne à pêche en main, à l’affût dans les immensités sauvages de l’Alaska. À la touche Davy Crockett, trappeur tout droit surgi de la mythique « Wild Frontier », succède ensuite une maman sportive et décontractée qui se double d’un rôle de chef de tribu familiale entouré d’une progéniture aux dents blanches et aux joues roses.

Pour rameuter le ban et l’arrière-ban des fans de l’égérie d’Alaska, la chaîne TLC n’a pas lésiné sur les outils de communication : un site dédié, un compte Twitter, une page Facebook de « Sarah Palin’s America » sont disponibles en ligne pour suivre et commenter les aventures de celle à qui l’on prête l’intention de se présenter à l’investiture républicaine pour l’élection présidentielle de 2012.

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Hypothèse farfelue ? À voir si l’on se fie au sondage Gallup de juillet 2010 qui la créditait de 76% d’opinions favorables au sein du Parti Républicain (avec 11 points d’avance sur son rival Mitt Romney). Un autre sondage publié par le magazine National Journal montrait qu’en cas de duel Obama-Palin, les électeurs masculins donneraient 2 points d’avance à Palin. L’heure du thé a peut-être sonné pour Sarah Palin.

À lire en complément

- L’interview de François Vergniolle de Chantal, chercheur en sciences politiques et civilisation américaine – « L’inconnue Tea Party » – Le Monde Magazine – 30 octobre 2010
- L’article de Denis Lacorne, directeur de recherches à Sciences Po – « Tea Party, une vague de fond » – Le Monde – 19 octobre 2010
- L’enquête sur Sarah Palin par Fabrice Rousselot – « Pour une Maison bien blanche » – Libération – 16 octobre 2010
- Le livre de Kate Zernike, journaliste au New York TimesBoiling Mad – Inside Tea Party America – Times Books – 2010
- La biographie critique sur Glenn Beck d’Alexander Zaitchik, journaliste d’investigation – Common nonsense : Glenn Beck and the Triumph of Ignorance – Wiley – 2010
- L’excellent blog « I Love Politics » des journalistes Marjorie Paillon et Julien Landfried qui décrypte la communication politique aux Etats-Unis
- Dans le même registre, le blog « Great America » des journalistes Lorraine Millot et Fabrice Rousselot, correspondants de Libération aux Etats-Unis
- En bonus, un hallucinant dessin animé vidéo pour expliquer le Tea Party. Tout est résumé !

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Crédits photo cc FlickR : Truthout.org, ragesoss, Les_Stockton, messay.com, dmixo6.

Article initialement publié sur Le blog du communicant 2.0.

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Et si Bobby Kennedy n’avait pas été assassiné ? http://owni.fr/2010/09/03/et-si-bobby-kennedy-n%e2%80%99avait-pas-ete-assassine/ http://owni.fr/2010/09/03/et-si-bobby-kennedy-n%e2%80%99avait-pas-ete-assassine/#comments Fri, 03 Sep 2010 17:33:29 +0000 Thierry Keller (Usbek & Rica) http://owni.fr/?p=26955 Qu’est-ce qu’une uchronie ? L’uchronie est un genre littéraire, souvent au service de la réflexion politique. Il consiste en la réécriture de l’histoire à partir de la modification d’un événement passé. L’uchronie est donc la création d’une histoire alternative qui part à la recherche des possibles. C’est un instrument d’imagination politique qui démarre souvent par ce fameux : « Et si… ? »

La vraie histoire de Bobby Kennedy

Frère cadet de John Fitzgerald Kennedy, Robert Francis Kennedy, dit Bobby, est nommé ministre de la Justice par son frère en 1961. Il a 35 ans. Marié à Ethel et père de onze enfants, Bobby est un homme tourmenté et profondément marqué par l’assassinat de son frère en 1963. Alors qu’il incarne la bien-pensance blanche et catholique de la côte Est, Bobby opère dans la seconde moitié des années 1960 un spectaculaire virage à gauche. Opposé fermement à la guerre du Vietnam, farouche partisan du droit des minorités et porte-parole des pauvres, il brigue la candidature démocrate lors des primaires de 1968. Alors qu’il a de fortes chances de l’emporter, il est assassiné à l’hôtel Ambassador, à Los Angeles, le 5 juin 1968. Des millions d’Américains accompagnent sa dépouille le long du chemin de fer qui relie New York à Washington. Son nom restera à jamais gravé dans la mémoire collective comme celui qui aurait pu donner à l’Amérique un autre destin. À l’opposé des années Nixon ou Reagan. « Seuls ceux qui prennent le risque d’échouer spectaculairement réussiront brillamment », Bobby Kennedy.

1-Le miraculé

Le jour où Bobby Kennedy a survécu

Extrait de Mon journal d’Amérique, de Jeff Pomerol de Launac

« Los Angeles, hôtel Ambassador, 5 juin 1968.
On se croirait au Shea Stadium. Mêmes filles prises de délire, même indescriptible ferveur, même électricité dans l’air. Et même sentiment profond d’être au centre du monde. Mais ce ne sont pas aux Beatles que s’adressent les hurlements fanatiques de ces jolies Américaines en robe blanche. C’est au sénateur Robert Francis Kennedy, dit Bobby. Celui-ci vient de remporter les primaires démocrates de Californie. Et ce n’est pas non plus la joie qui provoque leurs convulsions et fait jaillir leurs larmes. C’est l’effroi. Car elles ont tout vu. Elles étaient là, au premier rang, avec leur canotier « Kennedy for President », quand l’individu a fait feu. Un membre du staff monte à la tribune, celle-là même où quelques instants plus tôt le frère du défunt président avait prononcé, aux côtés de sa femme Ethel, la mère de leurs onze enfants, le discours de la victoire. Il s’empare du micro et déclare, la voix blanche : « Senator Kennedy was shot. »

Dès lors, c’est la confusion. Les salons de l’hôtel Ambassador, en liesse cinq minutes plus tôt, se métamorphosent en scène de crime. Les rares effectifs de police sont débordés. Excitées par l’odeur du sang, les caméras se fraient un chemin vers l’ombre gisante du sénateur. On entend crier : « A doctor, we need a doctor ! » Ils sont trois, penchés sur le corps inerte. L’un d’eux tente de lui parler mais, déjà, il est inconscient. Une tache sombre se répand sur le sol. Cela dure un temps fou. « Dix minutes, quinze peut-être », dira un témoin à la télévision. Enfin, Robert Kennedy est évacué. Par les cuisines…

Quelques instants plus tard, encore sous le choc, les anonymes massés devant l’hôpital où il subit les premiers soins voient défiler des camions de pompiers. À deux pas, un incendie ravage un block entier. Information prise, il n’y a pas de rapport avec l’attentat. À la télé, les flashs spéciaux évoquent les thèses les plus contradictoires. Que s’est-il passé exactement à l’Ambassador ? Combien de personnes ont été fauchées ? Bobby Kennedy a-t-il une chance de survivre ?

La nuit est longue. Le peuple américain est tenu dans une insupportable expectative. Il paraît impossible, tout simplement impensable, que le sort s’abatte une seconde fois sur un Kennedy. Non plus le gendre idéal mais, cette fois, le fils rebelle, le héros des classes populaires, le porte-parole des minorités, des jeunes, l’opposant radical à la guerre du Vietnam, l’infatigable défenseur des droits civiques, celui que la mort de John, dont il fut jadis l’attorney général, a conduit aux marges les plus radicales de la famille progressiste, l’espoir de l’Amérique des laissés-pour-compte.

La dernière balle a touché la moelle épinière, mais il est vivant

Depuis près de quarante-huit heures, ils ont retenu leur souffle. Ils ont campé sur le trottoir. Ils ont prié. Ils n’ont pas voulu s’en aller. La résignation gagne. On parle déjà de lui au passé. On promet de venger sa mort. Le tireur, un individu isolé répondant au nom de Sirhan Sirhan, a été immédiatement interpellé, mais on parle d’un second tireur : un policier. Complot ? Comment savoir ? Les traits sont tirés. Un désir de vengeance gronde chez les âmes meurtries. Pas lui ! D’abord son frère, ensuite le révérend King, assassiné deux mois plus tôt. Qu’ils aillent tuer Nixon, ou même le faux démocrate Johnson, tant qu’à faire… Mais pas lui !

Soudain, une mère de famille, qui n’a pas dormi depuis deux jours, désigne la porte en verre. Elle voudrait crier, mais aucun son ne s’échappe de sa bouche. Ce qu’elle vient de voir n’est pas une hallucination. Difficilement, le malade tient à actionner les roues de sa chaise roulante sans l’aide des deux infirmières ; il n’est que douleur, même si les yeux sont encore emprunts de cette douceur extravagante. Il ne marchera plus jamais. Plus jamais il ne se tiendra debout sur de vieux tonneaux, en plein ghetto, devant des foules ardentes. La dernière balle a touché la moelle épinière, mais il est vivant. La clameur qui accompagne la sortie du miraculé en atteste. En réponse, un faible sourire se dessine alors sur son visage d’éternel étudiant de la Nouvelle-Angleterre. »

Dans l’après-midi, Humphrey, McCarthy et McGovern jettent l’éponge. Le 5 novembre 1968,
Bobby Kennedy devient le 37e président des États-Unis, écrasant le républicain Richard
Nixon. Quatre ans plus tard, sa réélection est une formalité. Très affaibli néanmoins, il meurt
en février 1974. Jusqu’en 2008, tous les présidents seront des démocrates. C’est après que les
choses se gâtent… (ndlr)


2-La gauche caviar, une invention américaine

À Woodstock, on a assisté à la naissance d’une culture officielle. La subversion n’est plus ce qu’elle était.

Récit paru dans Le Monde, édition du 20 août 1969. Par Sophie Planchet.

16 août 1969. Festival de Woodstock, État de New York.

Des quatre coins du pays, les jeunes à cheveux longs affluent pour assister au concert géant. Les organisateurs sont débordés, mais les étudiants de Berkeley, fers de lance de l’avant-garde démocrate, veillent au bon déroulement de la manifestation. Pas question que des gauchistes du Socialist Workers Party hostiles au régime ou des Black Panthers aigris viennent perturber le week-end. On a planté des tentes et apporté assez d’herbe pour défoncer la totalité des États-Unis. Janis, Jimi, Joe, Pete… se relaient sur la scène géante. Ils chantent les louanges de RFK au lieu des diatribes anti-guerre auxquelles on se serait attendu en cas de maintien des hostilités. Mais le nouveau président, Bobby Kennedy, a rappelé les boys de la jungle vietnamienne, rompant ainsi nettement avec la politique proguerre de son prédécesseur, Lyndon Johnson, ce « beauf texan » soutenu par l’armée. Les derniers régiments ont quitté Hanoi, ils ont été accueillis en héros à leur retour. D’ailleurs, les voici qui se pavanent par grappes, uniforme ouvert jusqu’au nombril, sur la vaste plaine de Bethel, à une soixantaine de kilomètres de Woodstock. Ce sont les invités d’honneur d’un festival marqué du sceau d’un patriotisme tout neuf. Pour les stratèges démocrates, ils sont aussi la garantie que l’état-major se tiendra tranquille. Qui s’en prend aux soldats se heurte à l’opinion. Et l’opinion préfère ses gars au pays, plutôt qu’à 10 000 miles de là, zigouillés par les Vietcongs.

Et tandis que le ciel se noircit, menaçant les centaines de milliers de festivaliers d’un orage dantesque, une onde orgasmique parcourt l’échine des organisateurs, dont l’intrépide Michael Lang, qui a négocié en douce la venue d’un special guest. Il se pourrait – cela est à prendre au conditionnel – il se pourrait que le président honore le festival de sa venue ! Quand les premières gouttes de pluie inondent le campement géant, le murmure devient réalité. L’hélicoptère présidentiel se pose là où les artistes ont eux-mêmes atterri dans la journée. Un quart d’heure plus tard, Bobby est sur la grande scène. Il y prononce, le buste droit sur sa chaise roulante, stupéfiante réincarnation de Franklin Delano Roosevelt, le plus beau discours de son mandat devant un public recueilli. « Vous êtes l’avenir. Vous êtes l’Amérique. God bless you, God bless America ! », conclut-il. On pleure, on s’embrasse. On n’est plus dans un concert rock, on est à la messe !

Dans le carré VIP, Ethel Kennedy est pareille à une première communiante. Quand Jimi Hendrix lui tend un pétard gros comme ça, elle accepte, polie, et manque de s’étouffer en ricanant. L’homme du « Star-Spangled Banner » n’insiste pas. On parle de lui comme conseiller spécial à la Maison-Blanche chargé des Affaires culturelles, alors autant ne pas transformer d’emblée la première dame en junkie. Bobby, lui, est en grande conversation avec les Who. Santana se joint au petit groupe, tandis que Crosby, Stills & Nash ne perdent pas un mot de ce qui se dit. Le chef suprême évoque le nouveau visage de l’Amérique, cette « troisième voie vers le socialisme » qu’il promeut depuis son élection. On hoche la tête religieusement en signe d’approbation. Graham Nash glisse à l’oreille de son compère Stephen Stills : « Fuck ! Si on m’avait dit qu’on passerait en un an de la contre-culture à la culture d’État… » Stills, hilare : « Ça sert à ça de s’être battus ! »

Sur scène, Joan Baez chante : « We pray for you, Mister President. » C’est certain, le festival de Woodstock restera dans les annales comme la revanche de l’Amérique libérale. Les beatniks ont bien bossé : voici leurs héritiers passés du bon côté de la respectabilité. Un joli paradoxe…

3-Les États-Unis socialistes d’Amérique

Bobby et le « socialisme à visage humain »

Extraits du discours du président Robert Francis Kennedy sur l’état de l’Union, janvier 1974. (Dernier discours prononcé par Bobby Kennedy avant sa mort.)

« (…) Les États-Unis d’Amérique se sont désormais engagés dans une nouvelle voie, celle du socialisme démocratique. Pour cela, je veux avant tout rendre hommage à vous tous, senators, congressmen, qui avez rendu cela possible. Je m’adresse aussi à l’opposition républicaine, qui nous a permis de mener à bien ce bouleversement sans heurts ni violence. La vie d’une grande nation apaisée est à ce prix. (…)

Qu’on ne s’y trompe pas : ce socialisme à visage humain n’est en rien comparable à celui qui asservit des centaines de millions de nos frères à l’Est. Il refuse l’abolition des libertés individuelles comme préalable à l’égalité. Il condamne la société sans Dieu que les théoriciens du marxisme construisent avec haine derrière le rideau de fer. Il s’indigne de voir l’utopie d’une société sans classes trahie par les zélotes de Moscou. À cause d’eux, l’idée même de révolution contre l’ordre inégalitaire capitaliste devient suspecte, alors qu’il s’agit de la seule grande idée que nous autres, pauvres pécheurs, avons su retenir de l’enseignement divin.

Depuis six ans, nous avons mis fin à la guerre stupide au Vietnam. Nous avons institué un système de sécurité sociale pour tous. Nous avons renforcé la législation pour l’égalité entre les citoyens, quelles que soient leurs origines ethniques, leurs croyances religieuses, leurs inclinations sexuelles. Nous avons puni les exploiteurs, donné des droits aux travailleurs, aux femmes. Nous avons pris aux riches pour donner aux pauvres.

À l’extérieur de nos frontières aussi, nous avons choisi le camp de la justice. (…) Je suis fier que le Congrès ait répondu favorablement à l’appel déchirant du peuple chilien, en finançant la lutte héroïque des partisans de mon ami Salvador Allende contre les visées rétrogrades du général Pinochet. Sans vous, Pinochet serait au pouvoir à Santiago au lieu de purger une peine de prison à vie.

Mais notre bilan est infime, au regard de la tâche qui nous reste à accomplir. Mes forces me quittent, mais je sais pouvoir compter sur une nouvelle génération de responsables dévouée au bien commun, une génération qui transformera nos rêves en réalité pour changer la vie de millions d’hommes et de femmes. Abolir la pauvreté. Pourfendre les injustices. Transformer nos villes en havres de douceur, bannir la violence qui ronge encore nos ghettos. Rechercher la paix en toutes circonstances et partout dans le monde. Comprendre nos ennemis tout en gardant la certitude que, un jour, ce sont eux qui nous suivront. Œuvrer, enfin, en vue du seul but digne de toute action politique : unir les hommes dans une société démocratique planétaire, où seul devra régner l’amour de son prochain. (…) »

4-« Beijing strikes California »

La présidente Palin annonce une riposte sans précédent

Interview de Sarah Palin par Diane Sawyer, en direct sur CBS, 13 septembre 2009.

Madame la présidente, merci de nous recevoir dans le bureau ovale alors que l’Amérique connaît les heures les plus tragiques de son histoire. Sans détour, ma première question : qu’allez-vous faire maintenant ?
La guerre. Les États-Unis d’Amérique ont été sauvagement agressés. Nous allons riposter. Vite, fort et sans aucune espèce de scrupule. 2 500 Américains innocents sont morts dans ces attentats. Il est temps que notre grande nation réagisse au lieu d’observer avec lâcheté nos adversaires nous piétiner. Depuis quarante ans, nous n’avons opposé que des mains tendues à des crachats. Cette ère est révolue. Le sang réclame le sang.

Mais ce n’est pas n’importe quel pays. Nous nous attaquons à près d’un milliard et demi
d’habitants !

Nous avons les moyens militaires de remporter cette guerre.

Tous les Chinois ne sont pas en cause !
Nous n’avons rien contre le peuple chinois. Tous ceux qui voudront collaborer avec nous auront la vie sauve. Les autres seront punis.

Permettez ? Avons-nous la preuve irréfutable que le gouvernement chinois est impliqué dans les attentats ? Pékin a démenti.
À 9 heures du matin, ce 11 septembre, deux avions de ligne ont percuté les tours jumelles du World Trade Center. Nos services de renseignements sont formels : les cinq terroristes chinois montés à bord de ces appareils étaient membres du Parti communiste chinois. Vous faut-il une preuve supplémentaire ?

Que voulez-vous dire ? Que nous sommes un peuple de dégonflés ?
Quarante années d’administration démocrate ont dévitalisé les forces de notre pays. Les démocrates ont abandonné le Vietnam. Ils ont voulu faire la paix avec l’URSS. Ils ont encouragé sur notre continent des régimes qui ont piétiné la liberté et la propriété. Ils ont, chez nous, découragé le travail et incité à l’assistanat. Ils ont, en 1984, fait élire un Noir à la Maison-Blanche. Je n’ai rien contre les gens de couleur en général ni contre le révérend Jackson en particulier, mais il y a tout simplement des choses qui ne se font pas. Et qui donnent un très mauvais exemple au monde. Comment s’étonner d’être attaqués, dès lors que nous n’avons cessé d’étaler nos faiblesses ?

Le leader de l’opposition démocrate au Sénat réclame une enquête parlementaire sur les
circonstances de l’attentat…

Vous voulez parler de l’islamophile prochinois Hussein Obama ? Je pense qu’il aurait dû rester social worker dans les bas-fonds de Chicago. C’est là qu’il est le plus utile à son peuple. Par leur histoire, les Noirs ne peuvent être des patriotes. On peut le déplorer, mais c’est ainsi. Allez demander aux familles des pompiers morts dans les tours s’il leur faut une enquête. Les faits parlent d’eux-mêmes.

Cette guerre contre la Chine n’est-elle pas un moyen de remobiliser les Américains ?

C’est d’abord un moyen de nous défendre. Mais aussi, c’est vrai, une occasion inespérée de lutter contre le poison de la décadence, instillé dans l’âme américaine depuis 1968. Il faut réparer le crime originel de la présidence Bobby Kennedy. Cela fait quarante ans que nous attendons ce moment. Et je peux vous dire que nous n’allons pas laisser passer cette chance.

5-« Carla et Cécilia : “Ensemble tout devient possible.” »

La revanche des premières dames

Paru dans Voici du 12 avril 2010 (reprise en pages intérieures de la photo de couverture, où l’on voit, floues mais reconnaissables, Cécilia Attias – ex-Sarkozy – et Carla Bruni-Sarkozy s’embrasser à pleine bouche).

C’est un véritable vaudeville qui agite la planète ! Depuis que nous avons révélé l’idylle fougueuse entre un Nicolas Sarkozy complètement free-minded et la belle Sarah Palin (Voici du 5 janvier), c’est la débandade (sic).

Tout a commencé en décembre au sommet de l’OTAN. Sarah et Nicolas se tiennent discrètement par la main lors du dîner officiel, suite à un entretien en « tête à tête ». Un baiser volé quelques jours plus tard à Washington… On connaît la suite. D’un simple « moment d’égarement » (selon les termes du communiqué commun de la Maison-Blanche et de l’Élysée), on est carrément passé à la love story, où les affaires du monde se traitent sur l’oreiller : la France vient d’annoncer l’envoi de 10 000 soldats sur le front californien. Un Débarquement, mais à l’envers ! Persuasive, la Palin…

Le brave Todd Palin n’en peut plus d’être la risée des humoristes. Il s’est entouré d’une batterie d’avocats et compte bien obtenir un divorce pour faute. En pleine Troisième Guerre mondiale, il faut oser. Quant à Carla Bruni-Sarkozy, elle ne s’est pas embarrassée de telles procédures : elle file le parfait amour – à l’italienne – avec une revenante : Cécilia Attias. L’ex-Mme Sarkozy s’est dit « toute contente » de s’être à la fois délestée de son « gros lourd de mari » et de montrer au monde qu’être une femme libérée, « c’est pas si difficile ». Ah, Nicolas, on t’avait pourtant bien prévenu : « No zob at job ! »

Rapide chronologie récapitulative

1969 : Diffusion à la Maison-Blanche du film promotionnel Easy Rider, où deux militants du Parti démocrate sillonnent les États-Unis à moto pour expliquer les réformes de l’administration RFK à des paysans réfractaires. Naissance du concept de « conduite du changement ».
1970 : Réforme Medicare offrant la sécurité sociale à tous les Américains, y compris en cas d’avortement.
1971 : Abolition de la peine de mort dans toute l’Union. Tollé à droite.
1972 : Manifestation monstre du camp républicain pour protester contre la poignée de main entre Kennedy et Mao Tsé-Toung à Pékin.

1973 : Vote par le Congrès de crédits visant à soutenir le gouvernement du président chilien Salvador Allende contre les miliciens de Pinochet.

11 septembre 1973 : victoire des partisans d’Allende. Signature d’un traité de coopération américano-chilien.
1974 : Mort de Bobby Kennedy. Un million de personnes suivent le cortège funéraire de Washington à New York. Parmi les officiels, le tout nouveau président français, François Mitterrand. Le vice-président McGovern assure l’intérim jusqu’en 1976.
1975 : Fidel Castro déclare : « Cuba doit devenir le 51e État des États-Unis. »
1976 : McGovern élu pour de bon. Il lance la NEP, Nouvelle Politique économique.

1977 : L’aile droite du Parti démocrate est mise en minorité au congrès de Cincinnati. Jimmy Carter, un homme qui a fait fortune dans l’exploitation de l’arachide, en devient le secrétaire général.
1978 : Le ministre Harvey Milk échappe de peu à un attentat.
1979 : Le Tambour, unique Palme d’or au Festival de Cannes. Francis Ford Coppola repart bredouille avec son pensum : La guerre du Vietnam n’aura pas lieu.
1980 : Jimmy Carter élu président. Considéré comme mou et influençable, Carter va pourtant inscrire son nom dans l’histoire : il laisse sa place à un autre quatre ans plus tard !
1981 : Mitterrand réélu en France avec 54 % des voix, contre Raymond Barre.
1982 : Carter dément appartenir à la IVe Internationale.
1983 : Carter défend les mineurs de cuivre de Phelps Dodge (Arizona). C’est bien la preuve
qu’il est trotskiste.
1984 : Greenville, Caroline du Sud, d’où est originaire le pasteur Jesse Jackson, exulte à l’annonce des résultats. Jackson est le premier Noir élu à la présidence des États-Unis.
1985 : Libération de Nelson Mandela.
1986 : Victoire des sandinistes au Nicaragua, financés par les États-Unis.
1987 : Traité de Washington qui scelle la paix entre Palestiniens et Israéliens.

1988 : Le « Jesse Jackson français » Harlem Désir, au sommet de sa popularité, quitte la direction de SOS Racisme et brigue la magistrature suprême. Il est élu au second tour devant Raymond Barre – soutenu cette fois par le FN – le 8 mai.
1989 : En janvier, Jackson prête serment pour son deuxième mandat. Il promet de « débarrasser l’Amérique du cancer de la division raciale ». George Herbert Bush, challenger malheureux, déclare en privé en avoir assez de ces « Nègres qui dirigent l’Amérique ».


1990 : Jean Leloup chante 1990.
1991 : François Mitterrand, prix Pulitzer pour La Graine et le Mulet.
1992 : Jesse Jackson réélu de justesse. Forte poussée républicaine dans les États du Midwest.
1993 : Émeutes raciales dans East Los Angeles suite à l’affaire Rodney King.
1994 : Les États-Unis remportent la Coupe du monde de football, devant leur public, face à la France (Cantona exclu pour agression envers l’arbitre).
1995 : Désir réélu. Bertrand Delanoë à Matignon. « Un Noir et un pédé, où va la France ? », s’interroge le Professeur Choron.
1996 : Élection de Bill Clinton, ancien vice-président de Jackson.
1997 : Hillary Clinton, ministre de la Santé, revient sur les acquis de Medicare : 93 % des médicaments sont déremboursés. Les libéraux du parti crient au scandale.
1998 : La France est éliminée (1-0) par la Croatie en demi-finale de « sa » Coupe du monde, sous l’œil vexé du ministre des Sports, Lilian Thuram.
1999 : George W. Bush rechute : il sombre dans l’alcoolisme une bonne fois pour toutes.
2000 : Réélection de Bill Clinton, malgré le « Monicagate ».


2001 : Odyssée de l’espace.
2002 : Le président Clinton désigne la Chine et la Corée du Nord comme « l’axe du mal » dans son discours sur l’état de l’Union.
2003 : Les républicains se passionnent pour la nouvelle présentatrice de Fox News : Sarah Palin.
2004 : Élection truquée d’Al Gore, ancien vice-président de Clinton. Les démocrates, minoritaires, ont bourré les urnes dans le Tennessee. Ça sent la fin de règne.
2005 : Al Gore déclare que, lui vivant, les États-Unis ne ratifieront jamais les accords de Kyoto.
2006 : Jacques Chirac se baigne enfin dans la Seine.
2007 : Hu Jintao fait brûler la bannière étoilée sur la place Tian’anmen.
2008 : Élection de Sarah Palin. Début de la contre-révolution conservatrice.
2009 : 11 septembre : attentats contre le World Trade Center par des terroristes chinois.
15 septembre : premiers missiles américains tirés sur Pékin et Shanghai. L’ONU proteste.

C’est la première fois que deux membres permanents du Conseil de sécurité se font la guerre. 18 septembre : attaque des États-Unis par la Chine. La Californie est prise pour cible par les navires chinois. Couvre-feu à Los Angeles. Guerre des gangs. Pillages.
2010 : Le gouvernement des États-Unis signe l’Armistice de Canton, où il reconnaît sa défaite. « On l’a bien méritée », selon 74 % des Américains. Les États-Unis deviennent une province administrée par la Chine. Sarah Palin s’engage dans « la voie de la collaboration ». Avec Nicolas Sarkozy, elle adopte un fils, prénommé Hu.

Uchronies célèbres

Littérature
> Le Complot contre l’Amérique, de Philip Roth (Gallimard, 2006). Roosevelt est battu à
l’élection de 1940. Charles Lindbergh, républicain anti-interventionniste, devient président et
signe un traité de non-agression avec l’Allemagne nazie.
> Le Transport de AH, de George Steiner (Julliard, 1981). Hitler ne s’est pas suicidé. Il vit,
réfugié dans un recoin de l’Amazonie profonde. Un commando de Juifs l’a retrouvé et se
propose de le ramener à la civilisation pour le juger.
> Fatherland, de Robert Harris (Pocket, 1996). Berlin, 1964. Les nazis ont gagné la guerre.
Ils ont étendu leur pouvoir jusqu’aux confins de la Russie. Plus un seul Juif ne peut témoigner
de la Shoah.
Cinéma
> Jean-Philippe, de Laurent Tuel (2006). Jean-Philippe Smet n’est jamais devenu Johnny
Hallyday du fait de sa première audition ratée. Il est resté un brave type, prénommé Jean-
Philippe.
> On pourra aussi se référer à la trilogie Retour vers le futur, de Robert Zemeckis (1985-
1989-1990), qui plonge le jeune Marty (Michael J. Fox) dans les mythes fondateurs de son
histoire familiale.

Article initialement publié dans Usbek & Rica (article sur OWNI à l’occasion de la sortie du #1)

Texte : Thierry Keller / Illustrations : Eleanor Wood.

À votre tour, réalisez des uchronies grâce à notre application

Vidéo de présentation d’Usbek & Rica

Cliquer ici pour voir la vidéo.

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http://owni.fr/2010/09/03/et-si-bobby-kennedy-n%e2%80%99avait-pas-ete-assassine/feed/ 26
[En] What if Bobby Kennedy had survived? http://owni.fr/2010/09/03/what-if-bobby-kennedy-had-survived/ http://owni.fr/2010/09/03/what-if-bobby-kennedy-had-survived/#comments Fri, 03 Sep 2010 17:33:01 +0000 Thierry Keller (Usbek & Rica) http://owni.fr/?p=26889

Bobby survives an assassination attempt

What is alternate history ?

Alternate history is a writing genre frequently used for political reflections. It consists in rewriting history starting from a particular history point modified by the author. Alternate history creates some kind of new history which shows what could have been. It’s a political imagination tool that begin most of time by : “what if… ?”

The true story of Bobby Kennedy

Younger brother of John Fitzgerald Kennedy, Robert Francis Kennedy, also known as Bobby, is nominated US attorney general by his brother in 1961. He is 35 years old. Married with Ethel and father of 11 children, Bobby is a tormented man and deeply marked by his brother’s assasination in 1963. Whereas he embodies the East coast’s White and catholic self-righteousness, Bobby manages a spectacular shift to the left in the second part of the 1960’s. Strongly opposed to the Vietnam war, a fervent proponent of minorities rights and a spokesperson for the poor, he took part in the Democratic primaries in prevision of the presidential election in 1968. Although he is set to win the race, he is assassinated at the Ambassador hotel in Los Angeles, on June 5, 1968. Millions of Americans accompany his remains all along the railway linking New-York to Washington. His name will remain forever stuck in collective memory as the one who might have given America another destiny. Just the opposite of what Nixon and Reagan did. “Only those who dare to fail greatly can ever achieve greatly”, said Bobby Kennedy.


What if Bobby Kennedy hadn’t been assasinated ?

Bobby Kennedy came through the Ambassador Hotel’s attack. He became president of the United States. A new era is coming for America. But watch out for the counter-revolution !


1-Miracle man

The day Bobby Kennedy survived

Booby is know in a wheelchair

Excerpts of “Mon journal d’Amerique” by Jeff Pomerol de Launac

“Los Angeles, Ambassador Hotel, June 5, 1968.

It looks like the Shea Stadium. The same mad girls, the same foolish enthusiasm, the same electricity in the air. And the same deep feeling to be at the center of the world. But all the fanatic howling from those beautiful white-dressed American girls are not for The Beatles. They’re for Robert Francis Kennedy, a.k.a. Bobby. He’s the one who just won the Californian Democratic primary. However, it is not joy that causes their convulsions and tears. It’s terror. Because they saw everything. They where there, at the first rank, with their “Kennedy for President” hats, when the man fired. A staff member jumped over the stage, this place where a few minutes ago the former President’s brother pronounced his victory speech, next to his wife Ethel, mother to their 11 children. He took the microphone and said, tonelessly : “Senator Kennedy was shot.”

Thereafter came confusion. The Ambassador hotel’s lounge, jubilant five minutes ago, turned into a crime scene. The few policemen were overwhelmed. Excited by the smell of blood, camera crews made their way to the motionless body of the senator. We heard someone shout : “A doctor, we need a doctor !” Three doctors arrived and leant over the dead-still body. One of them tried to talk to him but he was already unconscious. A dark stain spread on the floor. Time seemed to have stopped. “About 10 or 15 minutes maybe”, a witness later said on television. Finally, Robert Kennedy is evacuated.

A few moments later, still shocked, an anonymous crowd gathered in front of the hospital where he was given first-aid treatment. Fire-trucks passed by. Close to there, a whole block was on fire. After a rapid check, they were told that there was no link with the assassination attempt. On television, special editions spoke of conflicting theories. What happened  exactly at the Ambassador hotel? How many persons had been stricken? Could Bobby Kennedy survive?

All night long, Americans were held in a dreadful expectation. It seemed impossible, simply unbelievable, that fate had stuck the Kennedys again. This time it wasn’t the perfect son-in-law but the rebel son, hero of popular classes, spokesman for minorities, for the young, a radical opponent to the Vietnam war, tireless defender of civil rights, JFK’s former attorney general, the one that John’s death brought to the more extreme edges of the progressive family, the hope of America’s forgotten ones.

For nearly 48 hours, they held their breath. They stayed on the pavement. They prayed. They refused to leave, staying out of resignation. People talked about it like he were already dead. They promised to take revenge. The shooter, a lonely person called Sirhan Sirhan, had been instantly arrested but people talked about a second shooter: a policeman. A conspiracy? How could we know? Faces looked tired. Revenge was roaring in wounded souls. Not him! First his brother, then Reverend King, assassinated 2 month before. Kill Nixon or the fake Democrat Johnson, if you want… But not him!

Suddenly, a mother, who had not slept in two days, pointed at the glass door. She wanted to shout but she stayed speechless. She was not hallucinating. Despite the difficulties, the patient wanted to run himself out of his wheelchair without the nurses’ help; he was in pain even if there was still this eccentric gentleness sparkling from his eyes. He would never walk again. He would never stand up on old barrels, in the ghetto, facing fervent crowds. The last bullet touched his spinal cord but he was alive. The roar of the crowd when he left hospital could confirm that. As a kind of answer, a small smile appear on his eternal New-England student’s face.”

JPL.

In the afternoon, Humphrey, McCarthy et McGovern threw in the towel. On November 5, 1968, Bobby Kennedy became the 37th president of the United States of America, crushing Republican Richard Nixon. Four years later, he is easily reelected. But, really weakened, he died in February, 1974. Until 2008, all presidents will be Democrats. Things get bad thereafter… (Ed.)

2-Champagne socialist, an american invention

In Woodstock, we witness the birth of official culture. Subversion is no longer what it was.

Story published in french newspaper “Le Monde”, August 20th, 1969, by Sophie Planchet.

August 16th, 1969. Woodstock Festival, State of New-York.

From all over the country, the long-haired youth flocks here to see the huge show. Organizers are overflowed but Berkeley’s students, spearheads of the Democratic vanguard, ensure that everything goes well. There is no way Socialst Workers Party leftists opposing the government or embittered Black Panthers can come here to disturb this week-end. Participants set up their tents and brought enough weed for all of the United States to get high. Janis, Jimi, Joe, Pete… take the turns on the giant stage. They praise RFK when we would have expected them to criticize the goernment, had the war gone on much longer. But the new president, Bobby Kennedy, called the boys back from the Vietnamese jungle, breaking with the pro-war policy of his predecessor, Lyndon Johnson, the “Texan redneck” supported by the army. The last platoons left Hanoi and were welcomed back as heroes. Moreover, here they are, pouncing around, their uniform opened, showing their chest, on the wide plain of Bethel, 37 miles away from Woodstock. They are the guests of honor in the festival, where a brand-new form of patriotism is in the makings. For Democrats strategists, they’re also the guarantee that Army headquarters will remain quiet. Those who blame soldiers must count with a hostile public opinion. And the opinion prefers to see America’s kids at home rather than 10.000 miles away, being crushed by Vietcongs.

As the sky glows darker, a severe storm threatens the hundred of thousand people who came. In spite of this, an orgasmic wave runs through the crowd as one organizer, the fearless Michael Lang, negotiated quietly the arrival of a special guest. It could be – we might use conditional tense – I could be true that the President honors the festival with his presence! When the first drops start falling on the giant camp, the whisper become reality. The presidential helicopter lands exactly where artists themselves landed earlier. A quarter of an hour later, Bobby is on stage. Straight on his wheelchair, like an amazing reincarnation of Franklin Delano Roosevelt, he delivers the most beautiful speech of his tenure in front of a silent crowd. He says to conclude : “Your are the future. You are America. God bless you, God bless America !” There are kisses and tears. We are no longer at a rock concert, we are attending mass!
In the VIP corner, Ethel Kennedy looks like a girl receiving her First Communion.

When Jimi Hendrix gives her a big joint, she takes it, politely, and she’s nearly suffocating in laughter. The “Star-Spangled Banner” man does not insist. Some talk about him as a special council at the White House, in charge of Cultural affairs, so it might be better not to transform the First Lady into a junkie. On his part, Bobby is holding a conversation  with the Who. Santana joins them while Crosby, Stills & Nash listen to every word. The President talks about America’s new face, this “third way to socialism” which he promotes since his election. Graham Nash whisper to Stephen Stills : “Fuck ! If I had been told that in one year we’d shift from counter-culture to state-culture…” Stills, hilarious: “That’s the reason why we fought !”

On the stage Joan Baez sings “We pray for you, Mister President.” For sure, the Woodstock festival will remain in History as the victory of liberal Americans. Well done, beatniks! Their hair are on the good side of respectability. Nice paradox…

3-The Union of Socialists States of America

Bobby and “socialism with a human face”

The Culture Minister

Excerpts of President Robert Francis Kennedy’s State of the Union address, January, 1974.
(Bobby Kennedy’s last speech)

“ (…) The United-States of America are now going into a new road, the road of democratic socialism. I would like to pay homage to you all, senators, congressmen, that made this possible. I also address the Republican opposition, which allowed us to bring this upheaval to a successful conclusion without violence. The life of a great nation at peace is at this cost (…)”

Make no mistake about it: this socialism with a human face is nothing compared to the one which enslave millions of our brothers in the East. It refuses to abolish individual freedoms in order to bring equality. It condemns the godless society that marxists theorists are building up on hatred behind the iron curtain. It is shocked to see that the utopia of a classless society has been betrayed by Moscow’s zealots. Because of them, the very idea of a revolution against the capitalist order is becoming supicious, while it is the only great idea that we, poor sinners, have been able to retain from God’s teaching.

In the past six years, we stoped the foolish war in Vietnam. We established a social security system for everyone. We enforced the legislation for equality between citizens, whatever their ethnic origins, religious beliefs or sexual inclinations. We punished exploiters, gave rights to workers and women. We took from the rich to give to the poor.

We chose justice abroad as well. (…) I’m proud that Congress heard the heart-breaking cry of the Chilian people by financing the heroic fight of those who follow my friend Salvador Allende against the backward goals of general Pinochet. Without you, Pinochet would still lead the government in power in Santiago instead of serving is life in prison sentence.

But all these outcomes are nothing compared to what we still have to accomplish. My strengths are leaving me, but I know I can count on a new generation of young leaders devoted to the idea of common good, a generation that will make our dreams come true in order to change the life of millions of men and women. Abolish poverty. Crush down injustice. Change our cities into sweet havens, banish violence from our ghettos. Seek peace in all circumstances and all around the world. Understand our ennemies while being assured that one day, they will follow our way. And finally strive to achieve the only valuable goal in all political action: unite men under a planetary democratic society, where love will reign (…)”

4-China attacks America!

President Palin announces massive retaliation

Five chinese terrorists attack the WTC

Interview of Sarah Palin by Diane Sawyer, live on CBS, September 13, 2009.

Madam President, thanks for having us in the Oval office at a time when America is living its the most tragic hours. My first question will be to-the-point: What are you going to do now?

War.The United States of America have been savagely attacked. We will retaliate. Quickly, strongly, and without any kind of hesitation. 2,500 innocent Americans perished in these attacks. It’s about time our great nation reacts instead of looking cowardly at our enemies crushing us. For the past forty years, we only opened our hands to those spitting at us. This era is over. Blood calls for blood.

But China is not a typical country. We are waging a war against almost 1,5 billion people!

We have the means to win the war.

Not all Chinese are guilty!

We have nothing against the Chinese people. All those ready to collaborate with us will be spared. Others will be punished.

Do we have irrefutable proof that the Chinese government is behind the attacks? Beijing denied any involvement.

At 9am, this 11th of September, two airliners struck the twin towers of the World Trade Center. Our intelligence services are clear on that: All 5 Chinese terrorists were members of the Chinese Communist Party. What other proof do you need?

What do you mean? Are you implying that America is made of cowards?

Forty years of Democrat administration let the vital energies of our country go dry. Democrats abandoned Vietnam. They wanted to make peace with the USSR. They encouraged regimes on our continent that had no respect for freedom and property rights. They have, at home, discouraged people from working and encouraged state charity. In 1984, they had a Negro elected at the White House. I have nothing against colored people in general and against rev. Jackson in particular, but there are things that simply should not be done. And that give a very bad example to the world. How can we be surprised to be attacked after we showed everyone our weaknesses?

The leader of the Democratic opposition asks for a Senate inquiry over the circumstances of the attack…

You are talking about the islamophile, pro-Chinese Hussein Obama? I think he should have stayed where he belongs: as a social worker in the slums of Chicago. That’s where he’ll be most useful for his people. Judging from their history, Blacks cannot be patriots. We can regret it, but that’s the way it is. Go ask the families of the dead firefighters if they need an inquiry. Facts speak for themselves.

Isn’t this war against China a way to rally Americans around an issue?

It is, first and foremost, a way to defend ourselves. But it is also an unexpected way to fight the poison of decadence that grows in the hearts and minds of Americans since 1968. We must repair the original sin of the Bobby Kennedy presidency. We have waited 40 years for this moment. I can tell you we’re not going to let this opportunity slip through our hands.

5-Carla and Cecilia: “Together, everything is possible”

The First Ladies’ revenge

Sarah Palin and Nicolas Sarkozy have an affair...

Published in Hello!, April 12, 2010 (the photograph in the inner pages is taken from the magazine cover, where we see – blurred – Cécilia Attias, Sarkozy’s former wife, and Carla Bruni-Sarkozy French kissing each other).

What a story! The whole planet is upside-down ever since we revealed that Nicolas Sarkozy was having an affair with Sarah Palin (Hello!, February 5).

Everything started at the Nato summit, in December last year. Sarah and Nicolas quietly held hands during the official dinner, following a ‘one-to-one’ conversation. A stolen kiss a few days later in Washington… we know the rest. From a simple ‘foolish moment’ (according to the press release from the Elysee Palace and the White House), we went to a full-blown love-story, where world affairs are being dealt with under the sheets. France just sent 10,000 additional troops on the Californian front! That’s how persuasive women can be…

Brave Todd Palin cannot stand to be laughed at anymore. He gathered around him an army of lawyers and is hoping to get a divorce at-fault. Right in the middle of the Thild World War, that’s cheeky. As for Carla Bruni-Sarkozy, she did not bother with all the judicial stuff. She is in the middle of her own – Italian – love story with what seems to be a ghost: Cécilia Attias. Sarkozy’s ex-wife said she was ‘very happy’ to have got rid of her ‘rather boring’ husband and to show the world that “it’s not so hard” to be a free woman. Ah, Nicolas, we had warned you: “No penis in the office!”


Select timeline

1969: The promotional movie Easy Rider premieres at the White House. In the film, two Democrats criss-cross the US to explain the reforms of the RFK administration to uncooperative peasants. The concept of “change driver” is born.

1970: Medicare reform gives every American comprehensive social benefits, even in case of an abortion.

1971: The death penalty is abolished throughout the US. The right tolerates the move.

1972: Massive demonstrations from the Republicans in protest of the handshake between Kennedy and Mao Zedong in Beijing.

Jimi Hendrix nominated

1973: Congress votes the budget for the US to support Chilean President Allende against the rebels of Pinochet. Sept 11, 1973: Victory of Allende. A military treaty is signed between Chile and the US.

1974: Bobby Kennedy dies. 1 million persons follow the funeral cortege from Washington to New-York. Among the officials present is the new French president, François Mitterand. Vice-president McGovern takes office until 1976.

1975: Fidel Castro declares that “Cuba must become the 51st state of America”.

1976: McGovern is elected. He launches the New Economic Policy (NEP).

1977: The right wing of the democratic party is marginalized at the Cincinnati convention. Jimmy Carter, a man who made a fortune growing peanuts, becomes general secretary.

1978: Defense Secretary Harvey Milk escapes a terrorist attack.

1979: The Tin Drum is the only Palme d’Or at the Cannes Festival. Francis Ford Coppola goes back empty-handed with his uninviting piece, The Vietnam War Will Not Take Place.

Woodstock turn into a democrats meeting

1980: Jimmy Carter elected president. Considered to be soft and easily influenced, he will remain in History for he remained only 4 years in office.

1981: François Mitterant is reelected with 54% of the vote in France, against Raymond Barre.

1982: Carter denies he belongs to the 4th International.

1983: Carter steps up for the copper miners in Phelps Dodge, AZ. That’s the best proof of his being a Trotskyist!

1984: Greenville, SC, hometown of rev. Jesse Jackson, cannot believe the election result. Jackson is the first African-American to be elected president of the United States.

1985: Nelson Mandela is freed.

1986: Sandinists win in Nicaragua, financed by the US.

1987: The Washington treaty puts an end to the Arab-Israeli wars.

1988: The “French Jesse Jackson”, Harlem Desir, acclaimed by public opinion, leaves his NGO and runs for president. He wins against Raymond Barre, who was running with far-right support, on May 8.

1989: In January, Jackson takes oath for his second term. He promises to “rid America of the cancer that is racial segregation”. Gearge H. Bush, his contender, declares privately that he is fed up with “these Niggers that run America”.

A new ideological model is born : The United Socialists States of America (USSA)

1990: Jean Leloup sings “1990″.

1991: Francois Mitterrand is awarded a Pulitzer prize for The Secret of the Grain.

1992: Jesse Jackson is reelected with a thin margin. Republicans strongly improved their standing in Midwest states.

1993: Race riots in Los Angeles following the Rodney King affair.

1994: The US win the Soccer World Cup at home, beating France in the finals (Cantona is given a red card after he beat up the referee).

1995: Desir is reelected in France. Bertrand Delanoe becomes prime minister. “A Negro and a fag, where is France headed for?” asks Prof. Choron.

1996: Bill Clinton, former Vice-president, is elected.

1997: Hillary Clinton, Health minister, revamps the Medicare system: 93% of all drugs will now have to be paid by the patient. The Democrats’ left wing are up in arms.

1998: France loses against Croatia (1-0) during the semi-finals of its World Cup. Sports minister Lilian Thuram is very upset.

1999: George W. Bush falls back into alcoholism and will not get over it.

2000: Clinton is reelected despite the “Monicagate”.

Chinese soldiers invade California

2001: A space odyssey.

2002: President Clinton talks of China and North Korea as the “Axis of Evil” in his State of the Union address.

2003: Republicans are crazy about an anchor on the Fox News channel: Sarah Palin.

2004: Al Gore is elected thanks to a fraudulent vote. Democrats, feeling the defeat, manipulate the votes in Tennessee. The end of the Democrat era nears.

2005: Al Gore declares that, while he remains alive, the US will never sign the Kyoto Protocol.

2006: Jacques Chirac bathes in the Seine river.

2007: Hu Jintao burns the Star-Spangled banner on Tienanmen Square.

2008: Sarah Palin wins the presidental election. Beginning of the conservative counter-revolution.

2009: Sept. 11: Chinese terrorists Attack the World Trade Center. Sept. 15: The US fire missiles against Beijing and Shanghai. The UN protests. For the first time, two members of the security council are at war. Sept. 18: China attacks the US. California is targeted by the Chinese Navy. A curfew law is passed in Los Angeles, leading to gang wars and plunders.

2010: The US government signs the armistice in Guangzhou and acknowledges defeat. For 74% of Americans, “we deserved it”. The United States become a province of China. Sarah Palin chooses to collaborate. Together with Nicolas sarkozy, they adopt a boy named ‘Hu’.

They adopt a young Hu

Famous alternate histories

Writings :
> The plot against America, by Philip Roth (Houghton Mifflin, 2004). Roosvelt lost the 1940 presidential election. Charles Lindberg, non-interventionist republican, became president and sign a non-agressive treaty with Nazi Germany.
> The Portage to San Cristobal of A.H., by George Steiner (Faber and Faber, 1981). Hitler did not commit suicide. He’s alive, hiding in the Amazon forest. A Jewish commando finds him and wants to bring him back to civilization to judge him.
> Fatherland, by Robert Harris (Hutchinson, 1992). Berlin, 1964. The Nazis won the war. They rule everything as far as east Russia. No Jews remain to testify of the Holocaust.

Movies :
> Jean-Philippe, by Laurent Tuel (2006). Jean-Philippe Smet never became Johnny Hallyday because he missed his first audition. He’s still a kind person named Jean-Philippe.
> There is also the “Back to the Future” trilogy, by Robert Zemeckis (1985-1989-1990) where the young Marty (Michael J. Fox) goes back in time and interferes in his parents’ romance.

First published in Usbek & Rica (article on OWNI when the #1 was published)

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Texte : Thierry Keller / Illustrations : Eleanor Wood.

À votre tour, réalisez des uchronies grâce à notre application

Vidéo de présentation d’Usbek & Rica

Cliquer ici pour voir la vidéo.

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http://owni.fr/2010/09/03/what-if-bobby-kennedy-had-survived/feed/ 13
Des milliers d’emails piratables sur les sites .gouv.fr http://owni.fr/2010/05/14/55-000-webmails-piratables-sur-les-sites-gouv-fr/ http://owni.fr/2010/05/14/55-000-webmails-piratables-sur-les-sites-gouv-fr/#comments Fri, 14 May 2010 13:18:47 +0000 Jean Marc Manach http://owni.fr/?p=15629 On imagine mal la NSA, ou la CIA, proposer aux internautes de les contacter grâce à une adresse email de type laposte.net ou wanadoo.com. C’est pourtant ce que proposent la Direction du renseignement militaire (DRM), qui utilise deux adresses @yahoo.fr, et la Direction de la Protection et de la Sécurité de la Défense (DPSD), qui utilise une adresse @laposte.net et une autre @wanadoo.fr. Je m’en étais étonné en 2005, dans un article consacré à guerre de l’information que se livrent les grandes puissances mondiales en terme d’intelligence économique, d’espionnage industriel, et de guerre électronique.

La DPSD et la DRM sont loin d’êtres les seules entités de l’armée dans ce cas. Citons, ainsi, l’Ecole militaire, le Commandement Air des Systèmes de Surveillance, d’Information et de Communication, le service de santé des armées, le responsable de la communication de l’armée de terre sur le quart sud-est de la France, la direction des ressources humaines de l’armée de l’air et la direction du personnel militaire de l’armée de l’air, un administrateur civil de la Délégation aux affaires stratégiques, placée sous l’autorité directe du ministre de la Défense et chargée du conseil géopolitique, stratégique et prospectif…

Les mails de Sarah Palin et de députés piratées

Non content de déléguer la gestion de leurs boîtes aux lettres électroniques à des sociétés privées dont certaines sont contrôlées par des entreprises américaines, ces militaires prennent aussi le risque, tout bête, de se voir pirater leurs adresses e-mails.

Car le problème, avec ces webmails, c’est qu’il suffit de cliquer sur le lien “J’ai oublié mon mot de passe” pour se voir proposer de répondre à une ou deux questions du type “Où avez-vous rencontré votre conjoint ?” pour réinitialiser le mot de passe, et donc prendre le contrôle de la boîte aux lettres. Ce qui est arrivé, l’an passé, à Sarah Palin, leader du parti républicain aux Etats-Unis. Sa question supposée secrète était “où avez-vous rencontré votre mari?La réponse était sur le web. Deux députés français se sont également récemment fait ouvrir leurs boîte aux lettres virtuelles de cette manière.

L’attaque contre Twitter, menée par le désormais célèbre Hacker Croll, se fondait également sur une faille de sécurité des webmails. En l’espèce, un employé de Twitter utilisait Gmail, qui proposait d’envoyer le mot de passe oublié à une adresse e-mail secondaire. Cette dernière, hébergée chez Hotmail, était désactivée. Croll n’a eu qu’à la réactiver pour récupérer le mot de passe…

Une étude a montré que 20% des internautes pouvaient deviner les réponses aux questions de sécurité de leurs amis. Au Texas, des chercheurs se sont aperçus que 30% des noms de jeune fille des internautes pouvaient être obtenus en consultant des archives publiques.

Une équipe britannique a établi qu’un cracker avait à peu près 1 chance sur 80 de trouver la réponse aux questions de sécurité de type “Quel est le nom de jeune fille de votre mère ?” en se basant uniquement sur les noms les plus courants. En Corée par exemple, où la concentration des noms est la plus forte, vous avez 40% de chances que le nom en question soit Kim, Park ou Lee.

Des centaines de milliers d’e-mails vulnérables

Pour mieux mesurer l’ampleur du problème, j’ai proposé à Nicolas Kayser-Bril, “datajournaliste” à Owni.fr, de développer une petite application, que nous avons intitulé mail.icio.us, afin de voir combien d’adresses e-mails vulnérables sont disponibles sur les sites des principales administrations. Et force est de constater qu’elles sont légions.

On dénombre ainsi près de 55 000 mentions d’adresses utilisant des webmails piratables sur l’ensemble des sites en .gouv.fr, plus d’une dizaines de milliers d’associations et de contacts sur celui du Journal Officiel, des centaines de mairies sur service-public.fr, mais également, et c’est plus gênant, des centaines de contacts dans les ambassades et d’adresses d’expatriés sur le site du ministère des Affaires étrangères, de militaires ou prestataires sur celui de la défense nationale, des dizaines d’experts automobiles sur celui de la sécurité routière, de professionnels de l’éducation nationale, une trentaine de députés…

Aux États-Unis, on trouve ainsi plus de 750 000 mentions d’adresses utilisant des webmails sur l’ensemble des sites en .gov, dont plus de 25 000 sur les serveurs de l’armée américaine, un millier sur ceux de la NASA, la National Science Foundation ou la Chambre des représentants, et près de 100 sur le site du FBI…

La situation est encore plus critique dans les pays où les fonctionnaires n’ont pas d’autre choix que d’utiliser des webmails, par manque d’infrastructure locale. En Afrique, la plupart des ministres utilisent des boîtes mail hébergées par Yahoo. Et sur les 40 contacts de l’Agence Internationale à l’Energie Atomique en Afrique, par exemple, pas moins de 21 utilisent Yahoo.

Ces données ont été récupérées à partir de listes des administrations aux Etats-Unis, en France et en Allemagne.

Nous avons ensuite utilisé l’API de Google Search pour obtenir une estimation du nombre de pages contenant une adresse webmail @hotmail.fr (et .com), @yahoo.fr (et .com), @laposte.net ou @voila.fr, les plus “simples” à pirater. Cette estimation n’est pas extrêmement fiable, ce qui explique les différences de résultats entre nos données et celles que vous pourrez trouver en faisant une recherche vous-même. Par ailleurs, le chiffre compte des pages, qui peuvent contenir plusieurs adresses e-mail (voir l’appli mail.icio.us).

Alors que le Pentagone se prépare sérieusement à la “cyber-guerre“, tout comme la gendarmerie française, il est frappant de constater des failles béantes dans la sécurité des administrations nationales. Le gouvernement dépense des dizaines de millier d’euros pour assurer la sécurité de ses communications privées (voir chez Thales, par exemple). L’utilité de ces défenses est sérieusement diminuée si un assaillant peut avoir accès à de nombreuses boîtes e-mails au sein de l’administration.

Une fois à l’intérieur d’une boîte mail, un cracker peut facilement gagner la confiance des collègues ou des supérieurs en se faisant passer pour sa victime. Il est alors plus facile de leur envoyer des logiciels malveillants en pièces jointes. Une bonne partie de l’opération Aurora, lors de laquelle Google a été attaqué en Chine, s’appuyait sur ce type de stratégie (voir cette présentation).

Les solutions sont très faciles à implémenter. Il suffit d’utiliser des webmails plus sécurisée ou d’utiliser les solutions mises à disposition par l’administration (les adresses de type prenom.nom@ministere.gouv.fr). Rajoutez à ça un bon mot de passe et vos communications en ligne deviennent beaucoup, beaucoup plus sûres. Ca n’empêchera pas un assaillant déterminé d’avoir accès à vos données. Mais ça lui compliquera la tâche.

Contactées, la DRM et la DPSD n’ont pas voulu répondre à nos questions. A suivre, une interview d’Eric Filiol, directeur d’un laboratoire de virologie et de cryptologie qu’il avait créé du temps où il était lieutenant-colonel de l’armée française, et un manuel de contre-espionnage informatique, pour apprendre à se protéger.

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Retrouvez les autres articles de ce premier volet de notre série sur le Contre-espionnage informatique : Blinde ton mot de passe et Enquête : 70 centimes les 1000 captchas.

Retrouvez également les deuxième et troisième volets de cette série sur le  Contre-espionnage informatique.

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http://owni.fr/2010/05/14/55-000-webmails-piratables-sur-les-sites-gouv-fr/feed/ 11