OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 L’Élysée couvre les gaz de schiste http://owni.fr/2011/10/04/sarkozy-mou-sur-le-schiste-permis-sarkozy-gasland-total/ http://owni.fr/2011/10/04/sarkozy-mou-sur-le-schiste-permis-sarkozy-gasland-total/#comments Tue, 04 Oct 2011 11:26:55 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=82101

En décidant d’abroger seulement trois permis d’exploration d’hydrocarbures dans le Sud de la France, Nicolas Sarkozy est loin de fermer la porte aux gaz de schiste. Étalées sur près de 10 000 km² autour des Cévennes, les concessions de Montélimar, Nant et Villeneuve-de-Berg ne sont que trois des dizaines de permis d’exploration accordés par le ministère de l’Écologie dans toute la France ces dernières années. Grâce auxquels des compagnies pétrolières ou gazières pourront continuer de fouiller le sous-sol par la technique controversée de fracturation hydraulique.

Les permis de gaz de schiste n’existent pas

L’annonce a pourtant produit l’effet désiré sur le plan médiatique. À la faveur d’articles titrés « le gouvernement abroge les permis de gaz de schiste », les militants impliqués dans le débat ont poussé sur les réseaux sociaux un long ouf de soulagement toute la journée du lundi 3 octobre. Un peu rapide.

Car en réalité 61 autres permis d’exploration gaziers et pétroliers en vigueur en France, ouvrent la voie aux gaz de schiste et autres hydrocarbures non conventionnels. Au plan du droit, ils s’intitulent, formellement, « permis exclusifs de recherche de mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux ». Autrement dit, des autorisations d’aller rechercher tout combustible volatile ou poisseux, à quelques profondeurs et dans quelque état que ce soit, depuis la classique poche de gaz jusqu’aux forages destructeurs à des kilomètres de profondeur.

Les trois permis abrogés (sur 64 actuellement en cours) / Carte : Marion Boucharlat pour OWNI.fr.

Quand elles déposent leur volumineux dossier au ministère pour obtenir un permis, les compagnies pétrolières et gazières exposent par le menu les opérations qu’elles souhaitent mener sur place : profondeur des forages, méthode d’extraction, emprise au sol des plateformes, etc. Un document tamponné par la direction générale de l’énergie et du climat. Seule cette note d’intention archivée dans un tiroir de cette administration énonce clairement si oui ou non la société compte aller chercher des gaz de schiste.

Or, pour déterminer le bienfondé des permis, la loi votée le 13 juillet ne prévoit de vérifications entre la réalité des explorations et le contenu de cette note d’intention qu’a posteriori. Il suffit pour le moment à chaque société, de jurer, la main sur un rapport, qu’elle ne pratiquera pas de fracturation hydraulique.

Couper l’herbe sous le pied de la gauche…

Or le double discours est déjà pour certaines sociétés une spécialité. Telle Toréador, administrée par le frère de Julien Balkany elle avait essayé en mars dernier de décourager une manifestation prévue en Seine-et-Marne contre l’exploration des huiles de schiste en diffusant auprès des habitants des tracts assurant qu’il ne s’agissait là que d’exploration pétrolière « classique ». Une version dont OWNI avait révélé le peu de sérieux dans les documents transmis aux actionnaires de Toréador, prévoyant d’exploiter des couches profondes (le « thème liasique », couche géologique à plus de 2 000 mètres de profondeur où du gaz peut être emprisonné dans le schiste) et de « produire des réservoirs » dans le Bassin parisien. Une expression désignant dans l’industrie pétrogazière la première fracturation hydraulique sur un gisement.

Mais ces réalités techniques ne semblent guère intéresser le gouvernement. La tonitruante promenade dans les Cévennes que nous organise l’Élysée tombe tout juste l’avant-veille de l’examen à l’Assemblée nationale de la proposition de loi portée par la gauche et les écologistes pour pallier les insuffisances de la première « loi sur les gaz et huiles de schiste » adoptée à la mi-juillet. En déchirant trois bouts de papiers, le Président dégonfle par avance un débat qui aurait pu empoisonner ce début de campagne. Et retire aussi de la place publique un vrai débat qui n’a toujours pas eu lieu sur les choix énergétiques de la France. Quid des autres techniques et des autres réservoirs comme le offshore profond, les gaz de houille, les schistes bitumineux… Au final, le texte voté le 13 juillet ne définit en fait pas grand chose. Pas même en quoi consiste la fracturation hydraulique.

Des questions énergétiques en suspens

Pour éviter les risques liés à la fracturation hydraulique, il faudrait rentrer dans d’ennuyeux détails : parler des quantités d’eau utilisées, des produits chimiques injectés dans le sol, des gaz de houille et du pétrole de schiste… Donc, débattre politique industrielle, ce que l’État se garde bien de faire. L’article 4 de la loi sur les gaz et huiles de schiste votée le 13 juillet prévoit ainsi un « rapport sur l’évolution des techniques d’exploration et d’exploitation et la connaissance du sous-sol français, européen et international en matière d’hydrocarbures liquides ou gazeux ». Une façon de « ne pas fermer la porte » aux hydrocarbures de schiste, comme le promettait Eric Besson. Surtout à l’heure où la compagnie Elixir Petroleum publie un rapport dépeignant la verte Lorraine en petit Koweït plein de 164 milliards de barils de pétrole de schiste et 650 000 milliards de pieds cube de gaz de même extraction.

Laissant les écologistes et les militants s’empêtrer dans les explications techniques, le gouvernement joue la montre sur les hydrocarbures comme il l’a fait sur le nucléaire, promettant contrôles et commissions sans donner de perspective précise. Un temps qu’il ne souhaite pas prendre en ce temps de campagne présidentielle. Car un projet énergétique, ça ne s’invente pas en une balade dans les Cévennes.


Carte et illustrations : Marion Boucharlat pour OWNI.fr.

Retrouvez toute l’actualité du schiste sur notre site dédié.


Retrouvez le livret “Gaz de Schiste, histoire d’une révolution énergétique hors de prix” par Sylvain Lapoix dans Le DVD du documentaire Gasland (Arte Éditions)

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[Infographie] Des huiles de schiste à Washington http://owni.fr/2011/08/26/infographie-des-huiles-de-schiste-a-washington/ http://owni.fr/2011/08/26/infographie-des-huiles-de-schiste-a-washington/#comments Fri, 26 Aug 2011 09:42:17 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=77006 Retrouvez l’infographie dans son intégralité en cliquant ici

À Washington, au département de l’Énergie, un nouveau sous-comité sur le gaz naturel se montre très favorable au gaz de schiste ; à contre-courant de plusieurs réseaux d’experts. Depuis peu, des scientifiques américains s’en inquiètent. Interrogée cette semaine par OWNI, la porte-parole du secrétaire à l’Energie, Tiffany Edwards, plaide en faveur de la complémentarité des points de vue :

Le sous-comité respecte un équilibre entre expérience et expertise et chaque membre est proprement qualifié quant à la connaissance pratique et technique. Certains ont jugé le panel trop favorable à l’industrie, d’autres trop pro-écologistes. Nous pensons avoir touché juste et que la diversité des points de vue ne peut que renforcer la qualité du résultat final.

Une explication contestable au regard de la composition de cette instance, chargée de se prononcer sur les gaz de schiste aux Etats-Unis. Car sur les sept experts réunis dans le sous-comité, six s’avèrent liés à l’industrie énergétique.

Et c’est le gouvernement lui-même qui a organisé le mélange des genres. Formé le 5 mai dernier par le secrétaire à l’Energie Steven Chu, sa mise en place répond aux demandes du programme pour la “sécurité énergétique” annoncé le 30 mars par Barack Obama.

Sous le vernis académique, les fiches de paie industrielles

Ce sous-comité aligne de prestigieuses références. Des professeurs éminents du MIT et Stanford, deux des plus grandes universités américaines, y sont assis aux côtés d’anciens pontes du ministère de l’énergie de l’administration Clinton ou de responsables d’ONG. Mais, leur CV respectif fait aussi apparaître des intérêts industriels bien compris et quelques grandes compagnies, toutes intéressées par les gaz de schistes :

Retrouvez l’infographie dans son intégralité en cliquant ici

Le propre directeur du sous-comité, le professeur du MIT John Deutch, aligne à lui seul des liens avec Schlumberger, leader mondial des services d’extraction pétrolière, et Cheniere Energy, spécialiste du gaz naturel liquéfié, unique état où les gaz de schiste sont actuellement transportables. Ne manquent à l’appel que les entreprises pétrolières elles-mêmes (malgré la présence d’un membre de la direction de leur principal lobby) ou bien le géant Halliburton, inventeur de la fracturation hydraulique que ce collège était réuni pour analyser. Et le résultat est à la hauteur du casting.

Rien de bien frais… à part des subventions

Plus que des pincettes, c’est avec de véritables queues de billard que le sous-comité manipule les modestes recommandations qu’il a soumis le 11 août :

Bien que le comité s’accorde avec l’opinion précédemment admise selon laquelle le risque de fuite de liquides de fracturations dans les fissures formées dans des réservoirs de schiste profond est éloigné aux vues de la distance qui les sépare des eaux potables, le rapport considère qu’il n’y a aucune raison d’ordre économique ou technique qui justifie de ne pas informer le public des produits chimiques utilisés dans la fracturation hydraulique.

Pas un mot sur les fissures dans les puits, rien sur les incidents constatés aux quatre coins du pays, immortalisés par Gasland et les Américains mobilisés. Pour toute réglementation, le comité propose des systèmes déjà en place (une base de données publique, un contrôle régulier de la qualité de l’air à proximité des sites d’extraction…), d’autres comités ad hoc (air, eau, recherche et développement des gaz de schiste… le tout garanti 100% “multi acteurs du secteur et indépendant”) et, cerise sur le derrick, des demandes d’aide à l’industrie :

Nous sommes conscients des difficultés financières rencontrées par l’Etat. Mais nous réalisons le rôle clef que peut jouer un modeste soutien à la recherche et développement autour des questions environnementales.

Des scientifiques s’élèvent contre la stratégie du “business as usual”

Face à l’initiative gouvernementale, un groupe de 22 universitaires de 13 Etats différents a adressé au secrétaire à l’Energie une lettre soulignant le “manque d’impartialité” dans la composition du comité d’évaluation scientifique, et les liens financiers et professionnels évidents qui donnent à ses membres un biais plus que favorable aux extracteurs de gaz de schiste.

Ces conflits d’intérêts laissent apparaître que le sous-comité a plus été conçu pour servir l’industrie aux frais du contribuable que pour apporter au Président Obama et au public des conseils crédibles.

Cosignataire de la lettre, le Dr Stanley Scobies, de l’université de Binghamton (Etat de New York) met pour sa part directement en cause la façon dont le comité a évalué les risques liés aux gaz de schiste :

Les membres du sous-comité étaient pour la plupart des managers de haut niveau arrivés là avec des positions sur les questions politiques et énergétiques bien rodées. Avant et pendant leurs consultations, ils ont reconnu avoir négligé les aspects relatifs aux risques pour la santé humaine des gaz non conventionnels. Tout ce qu’a fait le président du comité, John Deutch, a consisté à convoquer l’expertise d’un économiste de la santé, qui semble être un de ses copains.

Depuis quelques mois, la communauté scientifique américaine est sous un couvercle de plomb : après avoir poussé dehors un prof trop critique vis-à-vis de l’industrie des gaz de schiste, l’Université de Pittsburgh a publié un rapport favorable à cette nouvelle énergie qui persille la Pennsylvanie de puits, dont on a appris qu’il avait été financé à hauteur de 100 000 dollars par l’association des entreprises exploitant lesdits puits.. Stanley Scobies reconnaît la perversion du système universitaire quant à la nouvelle donne énergétique, où les grandes universités qui ne sont pas financées par les entreprises sont perfusées par les aides publiques favorables au développement de ces nouvelles ressources.

Reposant sur le même coffre d’or gris que la Pennsylvanie (le gisement de la Marcellus shale), l’Etat de New York a déclaré de fait un moratoire de trois ans pour regarder le problème dans les yeux avant d’autoriser les forages. Une option décentralisée que certains scientifiques appellent de leurs voeux, soulignant l’existence d’une National Academy of Science ou bien de comités d’évaluation des autorités de protection de l’environnement à même d’assurer l’indépendance des experts de ces futurs groupes… Une alternative qui nécessiterait de donner un coup de frein à la course aux gaz de schiste lancée à pleine vitesse du Texas au lac Michigan. Mais une alternative qui gênerait comme un caillou dans la chaussure la marche du “business as usual”.




Crédits photo: Flickr CC Pay No Mind, ehpien, Infographie Sylvain Lapoix & Marion Boucharlat

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Gaz de schiste : les nouveaux subprimes ? http://owni.fr/2011/07/04/gaz-de-schiste-les-nouveaux-subprimes/ http://owni.fr/2011/07/04/gaz-de-schiste-les-nouveaux-subprimes/#comments Mon, 04 Jul 2011 16:48:25 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=72673

La rumeur dans le milieu des indépendants est que les grandes zones d’extraction des gaz de schiste ne sont qu’une énorme pyramide de Ponzi et que le modèle économique ne marche tout simplement pas.

Ce jugement sans appel n’est pas celui d’un militant écologiste : en bas de ce mail révélé par le New York Times figure la signature du très sérieux cabinet IHS Drilling Data, expert en énergie. Au total, ce sont des centaines de communications internes au secteur de l’énergie que le quotidien américain a publié le 27 juin 2011. Une somme qui restitue un inquiétant constat : l’industrie des gaz de schiste repose sur des évaluations reconnues comme fausses. Un mensonge gros de plusieurs milliards de dollars que les géants du secteurs tentent déjà de dissimuler pour éviter l’effondrement de la bulle.

« Le plus grand secteur économique à fonds perdus du monde »

Etalés sur trois ans, les échanges portent sur tous les aspects de cette nouvelle industrie, et principalement sur les gisements du Sud-Est Etats-Unis (Barnett shale et Haynesville shale). Premier problème, les réserves semblent avoir été surévaluées dès le départ. Là où les communiqués de presse et déclarations publiques du géant texan Chesapeake revendiquent jusqu’à 50 ans de durée de vie pour les puits de gaz de schiste de la Barnett shale, certains géologues doutent que l’on puisse atteindre les 20 ans. Un géologue tente ainsi de prévenir un cadre de l’entreprise de ses doutes sur les évaluations dans un mail daté du 17 mars 2011 :

Vous avez parfaitement raison de mettre en question la durée de vie des puits. Nos ingénieurs évaluent leur potentiel à 20 ou 30 ans de production et, à mon avis, cela reste à confirmer. En fait, je suis plutôt sceptique à propos du pourcentage de déclin de la production après la première année d’exploitation. Dans certains cas, les puits sont excellents et produiront de grands volumes sur la période prévue mais certains s’épuisent rapidement.

Seul problème, « l’argent coule à flot pour profiter de cette nouvelle « nouveauté » que constitue ce secteur de l’énergie qui est fondamentalement non rentable », comme le déclare le responsable du fonds d’investissement PNC dans un mail. En 2009, le leader mondial du pétrole Exxon Mobile déboursait 41 milliards de dollars pour la start up des gaz non conventionnels XTO avant de remettre la main à la poche en juin 2011 pour acheter Philips ressources 1,7 milliard. Pour ne pas rompre le cycle, certaines entreprises usent de ficelles très douteuses pour ne pas éveiller de doutes chez les investisseurs.

Bien côté en bourse, Chesapeake est ainsi identifié pour sa « comptabilité agressive », comme le relève une note de la société d’investissement Argus dans une de ses analyses. Pour se procurer du cash, la compagnie a ainsi recours à des « volumetric production payments », sorte de bons par lesquels elle commercialise sa future production gazière contre paiement immédiat. Or, au lieu de marquer le gaz déjà vendu par ce procédé en dette dans ses bilans comptables, Chesapeake gonfle artificiellement sa production en le signalant comme stock. Un gaz dont certains doutent seulement qu’il soit jamais produit…

Refourguer les puits pour continuer de faire du cash

Selon les données communiquées en interne que s’est procuré le New York Times, des puits très productifs existeraient donc parmi les 10000 dont Chesapeake est propriétaire, mais ils seraient entourés de puits où la vente du gaz extrait compense à peine le coût des opérations. Au Texas, certaines zones commencent déjà à montrer des signes d’épuisement, comme la région de Fort Worth, à l’Ouest de Dallas. Dans la région, Chesapeake a acheté à tour de bras des droits d’extraction à des particuliers, jusqu’à 27500$ par acre (environ 4m²). Si le « boom » des gaz de schiste venait à faire pschit, l’économie locale pourrait s’effondrer plus vite encore que les cours de bourses des géants. D’autant plus que les gaziers préparent déjà des options de repli.

Car la condition sine qua non de la rentabilité de ce business n’a toujours pas été remplie : seule une augmentation conséquente du prix des hydrocarbures permettrait de couvrir les frais d’extraction des gaz de schiste et les rendraient ainsi rentables. Quand nous nous sommes intéressés pour la première fois à la question en novembre 2010, le physicien canadien Normand Mousseau (auteur du livre « La révolution des gaz de schistes ») pointait un écart énorme qui ne s’est toujours pas comblé:

La situation dans les gaz de schiste aujourd’hui est assez comparable à celle de la bulle internet : actuellement, le gaz naturel se vend autour de 4$ [canadiens] le gigajoule((1 gigajoule correspond à un sixième de baril de pétrole)) mais coûte à peu près 6$ le gigajoule à produire.

Pour masquer ce problème, certaines sociétés ont ainsi envisagé de forer plus de puits pour masquer le manque de rentabilité de ceux déjà exploités. Prévoyant l’effondrement, un cadre de la société de service pétrolier Schlumberger formule une solution encore plus cynique : il suffit de revendre les puits pourris à des gogos, « il y a toujours un plus gros pigeon », conclut-il. Aucune hypothèse n’émerge sur l’issue de cette fuite en avant financière et industrielle, sinon celle d’un cadre de Anglo-Energy Corporation :

L’esprit de troupeau qui se manifeste face aux schistes s’achèvera peut-être comme la crise des subprimes.

Avec le SEC (l’autorité des marchés financiers américaines) sur les dents et les démocrates qui exigent désormais des comptes à l’agence de l’énergie sur ses évaluations des réserves, il se pourrait bien que cette dernière prédiction se trouve réalisée.


Article publié initialement sur OWNIschiste.

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Grand Paris, énergie, économie… PYRAMIDES DE PONZI !

Bitcoin : de la révolution monétaire au Ponzi 2.0

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Grand Paris, énergie, économie… PYRAMIDES DE PONZI ! http://owni.fr/2011/07/04/grand-paris-energie-economie-pyramides-de-ponzi/ http://owni.fr/2011/07/04/grand-paris-energie-economie-pyramides-de-ponzi/#comments Mon, 04 Jul 2011 16:11:34 +0000 Bruno Marzloff (Groupe Chronos) http://owni.fr/?p=72643 Gonflé de promesses de transports innovants et d’infrastructures mirobolantes, le Grand Paris s’appuie, comme tout le schéma d’étalement périurbain américain, sur une fiction économique dangereuse : un développement financé par une expansion urbaine infinie.

Vous avez aimé Madoff ? Vous allez apprécier les variantes de la Pyramide de Ponzi. Celle-ci figurait déjà dans la littérature sur le développement durable depuis les travaux du Club de Rome. Elle est reprise en trois volets, ici, et enfin par un groupe de travail américain « Strong Town » militant de la ville dense qui applique son modèle à la croissance urbaine. Ce bref feuilleton assoit ce raisonnement insensé au plan économique et en démonte les mécanismes.

La « corne d’abondance » de l’étalement urbain

Financièrement, le mode de vie américain, basé sur l’étalement urbain comme principe de modernité, s’analyse comme une fuite en avant qui se finance sur le pari de l’accroissement perpétuel. Dès lors, l’échec est programmé, au moins dans une économie américaine où les infrastructures de réseaux sont largement financées au niveau fédéral mais dont l’entretien revient au local. Deux faillites corroborent l’actualité de cette thèse : les « subprimes » nées dans les extrémités de l’étalement urbain et la baisse voire l’abandon de plus en plus fréquents de la maintenance d’infrastructures urbaines et périurbaines de transports (routes, ponts…). D’autres illustrations du fameux schéma se proposent avec les gaz de schiste aux Etats-Unis ou chez nous, avec la fuite en avant du Grand Paris ou les investissements du THD (très haut débit). Ce qui pose question est moins l’analyse que chacun pressent désormais que la manière de sortir du piège.

Le principe de prospérité – faire la ville en dehors de la ville – qui fonde le développement périurbain américain n’a jamais été éprouvé dans ses limites tant que la croissance prévalait. L’effondrement des marchés immobiliers domestique et commercial ont fait surgir les premières critiques. La difficulté pour les territoires à assumer les coûts de maintenance confirme l’intuition.

L’intuition ? Le développement inflationniste des infrastructures liées à l’étalement urbain développe une logique d’économie décroissante, voire à un moment négative. Ce modèle de développement est intimement lié au rêve américain et sa remise en cause n’est pas à l’ordre du jour. Quelques analystes tirent la sonnette d’alarme tandis que la grande majorité persiste à croire en la croissance des villes dès les premiers signes de reprise économique. Mais jusqu’à quand cela pourra-t-il durer ? Madoff devait aussi se poser la même question. La différence ? Certes, il pariait sur une croissance infinie, mais peu dupe il savait qu’il fabriquait une spirale. Nous, nous refusons de voir la bulle.

Les investissements – en majorité financés par le gouvernement fédéral ou par des prêts à taux d’intérêt préférentiels – représentent un coût d’entrée (ou coût fixe) faible pour les autorités locales. Le piège de cet effet d’aubaine se referme quand ces mêmes collectivités supportent l’engagement financier de long terme de ces infrastructures qui s’usent, ont des coûts de maintenance élevés et doivent finalement être remplacées. Cette vue court-termiste des collectivités se justifierait ainsi :

  • La ville mise sur le surcroît de revenu issu de la croissance urbaine pour financer la maintenance des infrastructures.
  • La ville accélère constamment sa croissance afin de générer suffisamment de trésorerie pour financer la maintenance de l’existant.

Un classique de la Pyramide dès lors que les villes ne croissent pas indéfiniment. La deuxième assertion s’écroule tandis que la première est systématiquement invalidée par l’expérience. Voila pourquoi l’étalement urbain fonctionne souvent comme une « bulle » ; la valeur constante des coûts n’est plus compensée par leur valeur d’utilité de plus en plus marginale quand les financements baissent avec la réduction de la densité urbaine. Une croissance irraisonnée de l’endettement les mène fatalement à une fin douloureuse. Y échappent les villes qui veillent à ce que le revenu de la croissance couvre les dépenses de maintenance et de remplacement des infrastructures.

Le bitume : machine à bulles pour les communes

Reprenons ici deux des démonstrations de l’article.

# Ainsi d’une route de campagne financée à 50% par la commune. Le montant estimé des taxes récoltées donne un horizon de 37 ans pour que la ville récupère les fonds investis alors que la durée de vie de la route s’élève à 20 ou 25 ans.

# Ou d’une commune dont le coût du remplacement (nécessaire) du système de traitement des eaux usées représente 27.000$ par habitant, soit l’équivalent du revenu annuel médian de la population. Le remplacement est inenvisageable sans financements extérieurs.

Dans chacun des cas étudiés, l’horizon de couverture des investissements consentis par la ville par le biais de fonds publics fédéraux, d’endettement ou de partenariats-publics privés dépasse de plusieurs décennies la durée de vie estimée des infrastructures. Chaque fois qu’une infrastructure arrive en fin de vie, le cycle d’investissement doit repartir, au passif de la collectivité. Il en va de même que l’endettement et du développement des infrastructures afin d’éviter le goulet d’étranglement de leur non-remplacement. En cas de stagnation prolongée de la croissance, l’endettement décolle.

En voici l’illustration graphique :
Source : The Growth Ponzi Scheme, Part 3, Charles Marohn.
La courbe représente les flux de trésorerie disponibles pour la ville ou la collectivité considérée. On raisonne au niveau de la ville (donc pour plusieurs projets d’infrastructures successifs) et pour plusieurs cycles de vies des infrastructures. La première partie de la courbe représente la croissance de la trésorerie disponible lorsque les nouvelles infrastructures sont sources de rentes fiscales croissantes pour la ville. La décroissance commence lorsque les infrastructures doivent être remplacées car elles représentent un coût équivalent à leur première construction, mais n’apportent plus de surcroît de revenu fiscale.

Ce système détruit donc de la valeur au lien d’en créer. Les bénéfices modestes à court terme sont submergés par des coûts massifs à long terme. Le modèle est durable sur un cycle de vie de l’infrastructure car son remplacement peut être financé par le surcroît de taxes résultant de la croissance de la ville dans son ensemble, mais il suffit que deux infrastructures majeures doivent être remplacées à des périodes proches pour que le modèle explose. La croissance des revenus peut supporter les coûts de maintenance mais les montants de leur remplacement assèchent les ressources. Le système alors s’effondre.

Le Grand Paris : une Grosse Arnaque ?

Le gaz de schiste nous embarque-t-il dans un autre schéma de Ponzi ? Le New York Times l’affirme à l’aune de « fuites » en provenance des exploitants. Pourquoi ce thème de la bulle resurgit-il de manière aussi lancinante ? Cette lecture n’est pas réservée aux États-Unis. Elle résonne avec des observations faites de ce côté de l’Atlantique. Les notions de progrès et de service public conduisaient jusqu’il y a peu l’État à prendre ces travaux à sa charge. Son désengagement important de ces dépenses d’infrastructures est un signe ambivalent. Exercice de lucidité – ce n’est plus supportable et l’État n’investit plus qu’à la marge – ou signe de renoncement au service public ?

D’un côté, de plus en plus de territoires présentent des signes annonciateurs de faillite et de l’autre, l’Etat maintient une fiction d’investissements considérables, mais se paie de mots. Il en va ainsi des infrastructures de transport pour lesquels la puissance publique aligne des annonces de milliards d’euros. Ainsi le schéma national des infrastructures de transport annoncé par le gouvernement français en 2010 représente 170 milliards d’euros d’investissement, mais se conclut pour l’heure par quelques malheureuses aumônes en termes de millions (cf. le Transilien). Il en est de même des réseaux informatiques de très haut débit (THD) qui ne peuvent être amortis que dans des zones très denses. Mais un contre exemple amène à s’interroger. Les infrastructures de transport du Grand Paris relèvent en effet typiquement de la même analyse que celle de Strong Town.

L’urbaniste Frédéric Leonhardt (Les comptes fantastiques du Grand Paris) dresse dans le passionnant blog Métropolitique un tableau extrêmement critique de l’équilibre financier du projet. Pour lui, « tous les ingrédients d’un crash industriel public sont réunis ». Il qualifie le Grand Paris Express de « Grand Canyon financier ». À des choix techniques budgétivores (le réseau souterrain) s’ajoutent les dérives prévisibles (la Cour des compte évoque une moyenne de dérive des coûts de 92% sur ce type de projet), sans compter les coûts de fonctionnement, rejoignant par là précisément l’analyse de « Strong Town »

Il faut ajouter à cela l’exploitation du nouveau réseau ; elle a fait l’objet d’une seule véritable estimation dans le cadre du rapport du député Carrez (septembre 2009). Pour un investissement de 24 milliards d’euros (Réseau Grand Paris version Christian Blanc combiné au plan de mobilisation de la région), les besoins complémentaires de fonctionnement sur la période 2010-2025 sont de 19 milliards d’euros, qui viennent s’ajouter à la dérive continue du déficit de fonctionnement du réseau évaluée, elle, à 24 milliard d’euros.

… Et sans compter d’autres dérives, absentes des comptes actuels.

La charge actuelle du STIF, près de 8 milliards d’euros par an, sera durablement alourdie par les réseaux supplémentaires. La couverture de zones largement moins denses générant des trafics moins élevés, le prix de revient par voyageur sera moins favorable que ceux observés sur les réseaux RER et Métro existants. Combinés au coût initial augmenté des dépassements, ce constat rend le financement et la réalisation du réseau dans sa globalité largement virtuelle.

… et sans compter d’autres incidences.

Au delà de la seule question financière, les désavantages de cette stratégie du tout neuf-tout beau se cumulent : les délais de réalisation, 10 ans en moyenne, sont plus longs que ceux autorisés par un recyclage d’emprises existantes ou un passage en viaduc. De plus, une infrastructure souterraine produit une quantité de carbone élevée, un kilomètre de tunnel engendre 40.000 tonnes de CO2, soit pour la totalité du réseau une addition minimale de 6 millions de tonnes. Ces arguments sont connus, cela n’a pourtant pas effrayé les décideurs.

Le choix assumé par toutes les parties prenantes du financement s’enferme bien dans une spirale dont on ne voit pas l’issue, sauf à ce que le projet ne survive pas à un changement de majorité lors de la présidentielle de 2012 et que leurs successeurs aient plus de lucidité. Frédéric Leonhardt rappelle que d’autres dossiers se tissent des mêmes illusions.

Pourquoi cette fuite en avant ? Elle rappelle furieusement des dossiers nationaux, comme les dossiers Lignes Grandes Vitesse Normandie et Sud Ouest par exemple, qui ont la formidable double faculté de faire monter le coût des travaux à des valeurs astronomiques tout en faisant rêver les élus locaux. Ils voient arriver l’Etat avec des projets mirifiques, garantis sans nuisances, leur promettant une dynamique économique inespérée.

La charge est sévère mais terriblement lucide. Le constat reprend exactement les éléments d’analyse des Américains : effet d’aubaine (auquel Frédéric Leonhardt ajoute « l’effet d’annonce »), logique d’extension périurbaine, investissements non pertinents, valeur décroissante de l’utilité, coûts de fonctionnement insupportables, dérives inconsidérées… et dettes abyssales. Face à ces inconséquences économiques, il reste en outre à mesurer les effets induits pour les citoyens dans leur quotidien dès lors qu’on encourage, ce faisant, le processus d’étalement et qu’on étend la règle de l’écartèlement croissant entre résidence, travail et autres ressources. Le piège se referme alors sur un cercle pervers.

L’issue présumée de ces paris aveugles sur l’avenir a bien sûr beaucoup à voir avec la crise économique et le poids des dépenses sociales. Il a aussi beaucoup à voir avec les défis environnementaux et sociaux emportés, sans qu’on le dise, dans la même bourrasque. Pourtant, il existe d’autres paris sur le futur qui permettraient de s’extraire de la vrille (voir notamment notre série sur le « peak-car » automobile). Il font d’autres paris sur les « intelligences » de tous ordres au lieu et place du béton, du macadam et des rails.


Article publié initialement sur le site de Groupe Chronos sous le titre De Madoff au Grand Paris.

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Bitcoin : de la révolution monétaire au Ponzi 2.0

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Une huile de schiste en campagne pour Borloo http://owni.fr/2011/06/06/huiles-de-schiste-en-campagne-pour-borloo-2012-balkany-toreador/ http://owni.fr/2011/06/06/huiles-de-schiste-en-campagne-pour-borloo-2012-balkany-toreador/#comments Mon, 06 Jun 2011 12:12:16 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=66421 Frédéric Salat-Baroux, probable directeur de campagne de Jean-Louis Borloo pour 2012, travaille en réalité pour l’un des principaux promoteurs des hydrocarbures de schiste, la société Toréador.

Dans le cadre de la présidentielle, le nom de cet avocat de 47 ans est depuis quelques jours cité comme futur directeur de campagne de la caution écologiste de la droite, Jean-Louis Borloo. Une promotion confirmée par le JDD de ce week-end.

Marié à Claude Chirac depuis 2011, Frédéric Salat-Baroux a débuté sa carrière au Conseil d’État avant de rejoindre l’Élysée en 2002, sous la présidence de Jacques Chirac et au poste de secrétaire général.

En 2007, il embrasse la carrière d’avocat en rejoignant le prestigieux cabinet d’avocats d’affaires Weil, Gotshal & Manges. Or, dans le cadre de ses activités d’avocat, Salat-Baroux défend depuis avril 2011 les intérêts de la société administrée par Julien Balkany, Toréador, qui mène en Île-de-France une exploration de grande ampleur pour les huiles de schiste.

Comme le montre le document ci-dessous (voir page 2), Frédéric Salat-Baroux défendait ainsi Toréador devant le tribunal administratif de Melun, dans un recours pour lui permettre de poursuivre la prospection.

Dans le cas présent, Salat-Baroux attaquait une décision du Conseil général de Seine-et-Marne qui interdisait à Toréador (au nom de la protection de l’environnement et de l’eau) l’exploration pour les huiles de schiste sur son territoire. Le 16 mai, le juge des référés accordait finalement gain de cause à Toréador qui pourra continuer à perforer le plateau de la Brie contre l’avis des collectivités territoriales et des associations locales.

Comme le révélait la Lettre A du 15 avril dernier, de nombreuses sociétés impliquées dans la recherche de gaz et huiles de schiste ont commencé à affuter leur arsenal juridique contre les décisions administratives qui pourraient menacer leurs coûteuses opérations.

Avouant une proximité « idéologique et personnelle » avec le président du parti radical, Frédéric Salat-Barroux attend dans la semaine le rendu d’une deuxième ordonnance dans une affaire plaidée au nom de Toréador. « La transition écologique et énergétique est une question primordiale », lançait l’ex-ministre dans Le Parisien Dimanche du 5 mai.

Avec un défenseur des huiles de schiste comme directeur de campagne, après avoir signé lui-même les permis d’exploration pour ces ressources, Jean-Louis Borloo aura besoin de plus qu’un Grenelle pour faire passer la pilule aux électeurs écologistes.


Photo FlickR CC wiebkehere.

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OWNIschiste: alimentons le débat! http://owni.fr/2011/04/06/ownischiste-alimentons-le-debat/ http://owni.fr/2011/04/06/ownischiste-alimentons-le-debat/#comments Wed, 06 Apr 2011 14:07:06 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=55435 Retrouvez tous les documents et enquêtes d’OWNI à propos des hydrocarbures de schiste sur OWNIschiste.

Christine* a la cinquantaine, militante écolo rencontrée à la gare de Montpellier alors que j’allais assister à la réunion de Saint-Jean-de-Bruel organisée par José Bové pour informer les habitants du Larzac des projets de prospection de gaz de schiste. Depuis plusieurs mois, elle parcourt quotidiennement, parfois plusieurs heures par jour, le web et les sites officiels, à la recherche d’infos fraîches qu’elle partage par mail. Pas pour le plaisir, juste par inquiétude que sa maison du Languedoc, ou celle de sa fille à côté de Millau, ait un jour des robinets qui flambent, comme elle l’a vu dans Gasland.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Le 18 février dernier, elle m’a envoyé un curieux arrêté ministériel signé par Eric Besson : le texte autorisait le Crédit agricole à commercialiser du gaz naturel ! Quelques minutes après en avoir fait une brève, Pierre* répondait au message de Christine en y ajoutant un autre lien Legifrance : la Société générale était également autorisée à jouer aux marchands d’or gris.

Quelque part, à l’abri des regards…

Le débat sur les gaz de schiste est ainsi fait : très local, trop technique, il mobilise des citoyens désemparés dont le champ, le jardin ou la forêt sont menacés… et à qui aucune information complète n’est donnée, que ce soit par les pouvoirs publics ou la plupart des grands médias. Depuis notre premier article sur le sujet, les collectifs, groupes de discussion et simples forums se sont multipliés, faisant grossir la quantité de questions mais aussi injectant une foule de documents dans les débats. Jusqu’à l’arrivée de géologues, de techniciens ou de journalistes dans ces échanges, ces pièces du puzzle restaient blanches, muettes, ne faisaient que s’empiler sur le tas d’incompréhension ambiante.

Un tas que les gaziers et pétroliers se sont empressés de faire gonfler en y rajoutant des communiqués et des déclarations plus ou moins mensongères, parfois faussement explicatives, de temps en temps franches. Au final, disséminés et mal mis en lumière, les documents qui apportaient des réponses et auraient pu rétablir un semblant d’équilibre d’information dans le débat n’ont pour la plupart presque pas servi. Mais, heureusement, ils ont circulé.

Réunir les documents pour dissiper le flou

Certaines pièces administratives sont arrivées à OWNI « toutes cuites » dans ma boîte mail, d’autres ont nécessité d’aller fouiller dans les documents financiers, rapports déposés en Mairie… Une grande partie est totalement publique, simplement inaccessible à tous les citoyens pour lesquels ils feraient sens. A en croire l’arrêté, la carte accompagnant le permis exclusif de recherche dit de Montélimar accordé à Total est disponible à qui se présente aux services du ministère en région, à la Dreal. Sur le papier seulement car, par téléphone, les services sont formels : la carte a été « ramenée » au ministère, avait-on expliqué à un journaliste d’OWNI pendant notre enquête. Les Provençaux n’ont plus qu’à prendre rendez-vous à La Défense pour s’informer…

Tous les documents qui nous sont parvenus, que nous nous sommes procurés ou qui nous seront transmis pouvant éclairer le dossier, nous avons décidé de les publier en un lieu unique : le blog OWNIschiste.

Consultable sur le blog et téléchargeable, chaque pièce sera remise dans son contexte par une introduction et un système de mots-clés (tags) détaillant :

- sa nature (type de document) ;

- la zone géographique concernée (pays + région(s) + département(s) + commune(s), selon pertinence) ;

- les sujets abordés (santé, eau, technique, législation, finances, etc.) ;

- le ou les acteurs mentionnés (pouvoirs publics, entreprises, experts, etc.).

Suite aux sources que nous livrons cette semaine, nous mettrons à disposition à un rythme régulier les documents en notre connaissance ainsi que ceux transmis par le biais de la « Privacy Box », qui permet aux internautes désireux de nous communiquer des documents en tout anonymat de nous les envoyer sans pouvoir être identifiés. Les documents les moins explicites feront l’objet de « décryptage » et l’article permanent petit lexique de bullschiste des hydrocarbures non conventionnels sera régulièrement mis à jour de nos nouvelles découvertes en matière de langue de bois.

En complément de ces données brutes, OWNIschiste publiera régulièrement des informations sur le dossier gaz et huiles de schiste et relayera les articles publiés ailleurs parmi les plus éclairant sur cette problématique.

Ouvert aux commentaires, le blog est, comme tout contenu OWNI, en Creative commons non commercial avec paternité. Vous avez donc l’autorisation de reproduire gratuitement ces contenus en en donnant la source. Et nous vous y encourageons même ! Histoire de ne pas interrompre la circulation des documents. Histoire de rétablir un peu d’équilibre dans ce débat entre les pouvoirs publics, les entreprises privées, d’un côté, et, de l’autre, les simples citoyens comme Christine ou Pierre que les autorités ont oublié de consulter.

*les prénoms ont été changés.

Photos : Sylvain Lapoix.

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Huiles de schiste : Toréador ne prend pas garde à ses contradictions http://owni.fr/2011/03/10/huiles-de-schiste-toreador-ne-prend-pas-garde-a-ses-contradictions/ http://owni.fr/2011/03/10/huiles-de-schiste-toreador-ne-prend-pas-garde-a-ses-contradictions/#comments Thu, 10 Mar 2011 17:00:33 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=50773
Billet initalement publié sur OWNIpolitics.


Contrairement aux informations diffusées aux populations, le groupe pétrolier Toréador veut prospecter des couches de schiste en Seine-et-Marne, selon un rapport de gestion que s’est procuré OWNI.

Dans le document présenté le 30 juin 2010 aux actionnaires de la société, dont Julien Balkany est administrateur indépendant, on peut lire :

Cet accord devrait se traduire par la réalisation en 2010 d’au moins deux puits pilotes pour tester le thème Liasique non conventionnel sur le permis de Château Thierry.

Or l’expression « thème Liasique » désigne en termes géologiques les fameuses couches de schiste. C’est dans ces profondeurs, au delà de 2000 mètres sous le niveau de la mer, que se forment les gaz et huiles de schiste, dits hydrocarbures « non conventionnels ».

Des ressources qui ne peuvent aujourd’hui être exploitées autrement que par la technique brutale de fracturation hydraulique, principale raison du mouvement d’opposition à ce type d’exploration minière qui s’est récemment étendu au Bassin parisien.

Des « forages classiques », disent-ils

A la veille de la manifestation qui a réuni ce samedi 5 mars 1500 à 3000 personnes dans la commune de Doue où une plate-forme est implantée, Toréador et son partenaire Hess avaient diffusé une lettre contredisant les inquiétudes des écologistes et des riverains :

Le projet de recherche de pétrole à Doue porte uniquement sur la recherche de nouveaux gisements d’huile dans la roche carbonatée. […] Dans ce but, nous devons forer un puits de recherche. Ce forage sera classique comme il en existe des centaines dans la région, selon les mêmes techniques employées depuis plus d’un demi-siècle et ce dans un cadre strict de préservation de l’environnement.

En dehors des géologues et connaisseurs des sous-sols seine-et-marnais, pas sûr que tous les habitants de Doue aient reconnu derrière le terme « roche carbonatée » le calcaire de Brie typique du plateau sur lequel est juché Doue. Le passage suivant a, en revanche, de quoi rassurer les riverains.

Ces forages « classiques », on les connaît bien : dans ce coin d’Île-de-France, la terre est persillée de vieux derricks qui crachotent quelques gouttes de bruts de temps à autres (environ 700 puits autour de Doue). Des puits qui n’ont jamais débordé sur les nappes phréatiques ou causé de problème. Rien de bien neuf.

Sauf que le rapport de gestion présenté aux actionnaires le 30 juin 2010 dit exactement le contraire :

De nouvelles demandes de permis sont également à l’étude pour accroître notre domaine minier et compléter les zones d’intérêts pour le thème « black shale » dans le centre du bassin notamment.

Ce bassin, c’est celui qui court de la Lorraine à l’Île-de-France et duquel Julien Balkany espère pouvoir tirer 4,5 millons de tonne de pétrole par an. Quant aux « black shale », ce sont les zones des couches profondes de schiste où se forme l’or noir de Toréador.

« Produire le réservoir » dans l’Aube

A quelques dizaines de kilomètres de là, un autre permis débute, dit « permis de Rigny-le-Ferron » (bourg d’une dizaine d’âme dans le pays Nogentais, à l’Ouest de l’Aube) où, encore une fois, Toréador jure à la presse locale qu’aucun projet de forage non conventionnel n’est prévu avant 2012. Là encore, dès la fin 2009, le rapport de gestion dit l’inverse :

Il est prévu en 2010 de forer un puits d’appréciation horizontal sur la structure de façon à produire le réservoir.

Plus clair, le passage omet seulement de préciser que « produire le réservoir » consiste à réaliser la procédure nécessaire à l’extraction. Autrement dit écarteler la roche par la méthode de « fracturation hydraulique ».

Partis d’autres documents mis en ligne sur les sites de la compagnie pétrolière française et de son partenaire Hess, l’ONG Greenpeace note également des contradictions édifiantes. Dans un Powerpoint présenté aux actionnaires, le schéma des couches visées par Toréador montre ainsi, à plus de 2000 mètres de profondeur, le feuilletage de schiste où se trouvent les gaz et huiles mentionnés dans les permis. D’autres allusions, dissimulées sous des références cryptiques, empêchent le moindre doute : détaillant les sites français, un « slide » 21 de la présentation compare le Bassin parisien à la « Bakken Shale » aux États-Unis. Un rapprochement qui prend tout son sel quand on sait que ces couches de schiste du bassin de Willitson sont désormais exploités par des pétroliers américains à grands coups de fracturation hydraulique.

Lost in translation

Contacté par OWNI, la communication de l’entreprise Toréador (gérée par le groupe EuroRSCG) dément avoir voulu laissé entendre qu’il ne s’agissait pas de forages profonds et donne une interprétation personnelle de la notion de puits « classiques ».

Nous avons toujours prévu des recherches au delà de 100 mètres. Quand nous parlons de puits classiques, nous voulons dire que le « rig » (ensemble des éléments composants la plate-forme de forage, NdR) est le même que celui utilisé dans les forages convetionnels à 500, 1000 ou 2000 mètres de profondeur. De même pour les tuyaux, le ciment, etc. Il s’agit des outils classiques d’exploration pétrolière.

Quant aux « roches carbonatées » où la lettre indique que les forages auront lieu, il semblerait s’agir… d’une erreur humaine !

Il a toujours été question de forer dans les couches de schiste. Un brouillon de la lettre nous est parvenu en anglais qui le précisait bien. Peut-être s’agit-il d’une erreur de traduction, Hess étant une société anglosaxone, cela pourrait se comprendre. Mais si nous avons fait une erreur, nous en sommes désolés.

Espérons que Toréador aura su trouver de bons traducteurs pour lire le code minier fraîchement réformé.

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Photos : FlickR CC s.leture / OWNI CC BY Sylvain Lapoix.

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Huiles de schiste : Toréador ne prend pas garde à ses contradictions http://owni.fr/2011/03/08/huiles-de-schiste-toreador-ne-prend-pas-garde-a-ses-contradictions-petrole-energie-balkany/ http://owni.fr/2011/03/08/huiles-de-schiste-toreador-ne-prend-pas-garde-a-ses-contradictions-petrole-energie-balkany/#comments Tue, 08 Mar 2011 17:27:27 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=38122 Contrairement aux informations diffusées aux populations, le groupe pétrolier Toréador veut prospecter des couches de schiste en Seine-et-Marne, selon un rapport de gestion que s’est procuré OWNI.

Dans le document présenté le 30 juin 2010 aux actionnaires de la société, dont Julien Balkany est administrateur indépendant, on peut lire :

Cet accord devrait se traduire par la réalisation en 2010 d’au moins deux puits pilotes pour tester le thème Liasique non conventionnel sur le permis de Château Thierry.

Or l’expression « thème Liasique » désigne en termes géologiques les fameuses couches de schiste. C’est dans ces profondeurs, au delà de 2000 mètres sous le niveau de la mer, que se forment les gaz et huiles de schiste, dits hydrocarbures « non conventionnels ».

Des ressources qui ne peuvent aujourd’hui être exploitées autrement que par la technique brutale de fracturation hydraulique, principale raison du mouvement d’opposition à ce type d’exploration minière qui s’est récemment étendu au Bassin parisien.

Des « forages classiques », disent-ils

A la veille de la manifestation qui a réuni ce samedi 5 mars 1500 à 3000 personnes dans la commune de Doue où une plate-forme est implantée, Toréador et son partenaire Hess avaient diffusé une lettre contredisant les inquiétudes des écologistes et des riverains :

Le projet de recherche de pétrole à Doue porte uniquement sur la recherche de nouveaux gisements d’huile dans la roche carbonatée. […] Dans ce but, nous devons forer un puits de recherche. Ce forage sera classique comme il en existe des centaines dans la région, selon les mêmes techniques employées depuis plus d’un demi-siècle et ce dans un cadre strict de préservation de l’environnement.

En dehors des géologues et connaisseurs des sous-sols seine-et-marnais, pas sûr que tous les habitants de Doue aient reconnu derrière le terme « roche carbonatée » le calcaire de Brie typique du plateau sur lequel est juché Doue. Le passage suivant a, en revanche, de quoi rassurer les riverains.

Ces forages « classiques », on les connaît bien : dans ce coin d’Île-de-France, la terre est persillée de vieux derricks qui crachotent quelques gouttes de bruts de temps à autres (environ 700 puits autour de Doue). Des puits qui n’ont jamais débordé sur les nappes phréatiques ou causé de problème. Rien de bien neuf.

Sauf que le rapport de gestion présenté aux actionnaires le 30 juin 2010 dit exactement le contraire :

De nouvelles demandes de permis sont également à l’étude pour accroître notre domaine minier et compléter les zones d’intérêts pour le thème « black shale » dans le centre du bassin notamment.

Ce bassin, c’est celui qui court de la Lorraine à l’Île-de-France et duquel Julien Balkany espère pouvoir tirer 4,5 millons de tonne de pétrole par an. Quant aux « black shale », ce sont les zones des couches profondes de schiste où se forme l’or noir de Toréador.

« Produire le réservoir » dans l’Aube

A quelques dizaines de kilomètres de là, un autre permis débute, dit « permis de Rigny-le-Ferron » (bourg d’une dizaine d’âme dans le pays Nogentais, à l’Ouest de l’Aube) où, encore une fois, Toréador jure à la presse locale qu’aucun projet de forage non conventionnel n’est prévu avant 2012. Là encore, dès la fin 2009, le rapport de gestion dit l’inverse :

Il est prévu en 2010 de forer un puits d’appréciation horizontal sur la structure de façon à produire le réservoir.

Plus clair, le passage omet seulement de préciser que « produire le réservoir » consiste à réaliser la procédure nécessaire à l’extraction. Autrement dit écarteler la roche par la méthode de « fracturation hydraulique ».

Partis d’autres documents mis en ligne sur les sites de la compagnie pétrolière française et de son partenaire Hess, l’ONG Greenpeace note également des contradictions édifiantes. Dans un Powerpoint présenté aux actionnaires, le schéma des couches visées par Toréador montre ainsi, à plus de 2000 mètres de profondeur, le feuilletage de schiste où se trouvent les gaz et huiles mentionnés dans les permis. D’autres allusions, dissimulées sous des références cryptiques, empêchent le moindre doute : détaillant les sites français, un « slide » 21 de la présentation compare le Bassin parisien à la « Bakken Shale » aux États-Unis. Un rapprochement qui prend tout son sel quand on sait que ces couches de schiste du bassin de Willitson sont désormais exploités par des pétroliers américains à grands coups de fracturation hydraulique.

Lost in translation

Contacté par OWNI, la communication de l’entreprise Toréador (gérée par le groupe EuroRSCG) dément avoir voulu laissé entendre qu’il ne s’agissait pas de forages profonds et donne une interprétation personnelle de la notion de puits « classiques ».

Nous avons toujours prévu des recherches au delà de 100 mètres. Quand nous parlons de puits classiques, nous voulons dire que le « rig » (ensemble des éléments composants la plate-forme de forage, NdR) est le même que celui utilisé dans les forages convetionnels à 500, 1000 ou 2000 mètres de profondeur. De même pour les tuyaux, le ciment, etc. Il s’agit des outils classiques d’exploration pétrolière.

Quant aux « roches carbonatées » où la lettre indique que les forages auront lieu, il semblerait s’agir… d’une erreur humaine !

Il a toujours été question de forer dans les couches de schiste. Un brouillon de la lettre nous est parvenu en anglais qui le précisait bien. Peut-être s’agit-il d’une erreur de traduction, Hess étant une société anglosaxone, cela pourrait se comprendre. Mais si nous avons fait une erreur, nous en sommes désolés.

Espérons que Toréador aura su trouver de bons traducteurs pour lire le code minier fraîchement réformé.

Photos : FlickR CC s.leture / OWNI CC BY Sylvain Lapoix.

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Josh Fox, réalisateur anti-gaz de schiste classé “terroriste” http://owni.fr/2011/02/27/josh-fox-realisateur-anti-gaz-de-schiste-classe-terroriste/ http://owni.fr/2011/02/27/josh-fox-realisateur-anti-gaz-de-schiste-classe-terroriste/#comments Sun, 27 Feb 2011 16:30:42 +0000 Sylvain Lapoix et Ophelia Noor http://owni.fr/?p=48481
Billet initalement publié sur OWNIpolitics.

fff

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Metteur en scène de théâtre et réalisateur de fiction, Josh Fox n’avait rien d’autre que sa caméra qui le prédestinait au documentaire. D’une simple lettre d’une compagnie gazière reçue dans sa maison familiale de Pennsylvanie, havre de paix au bord de la rivière Delaware, il s’est immergé tout entier dans le cauchemar des gaz de schistes pendant un an et demi afin de comprendre ce qui arrivait à son pays. Avec un ami monteur, il a produit Gasland, documentaire politique, écologique et expressionniste sur une Amérique prête à sacrifier air pur, eau douce et santé humaine pour quelques mètres cubes de gaz de plus… Devenu hérault de la lutte contre une industrie énergétique sans scrupules, il a présenté pour la première fois son film en Europe, en janvier dernier à Londres. En attendant l’arrivée de son film en France, Josh Fox a accepté de livrer à OWNIpolitics quelques détails sur sa mission d’intérêt général.

Comment a commencé le tournage de Gasland ?

Ca s’est passé exactement comme je le raconte dans le film : mon père a reçu une lettre qui nous proposait d’exploiter du gaz sur notre terrain. Il m’a demandé de “jeter un oeil à cette histoire” : la zone du haut Delaware n’est pas une zone d’exploitation d’hydrocarbure, c’est une magnifique région d’étangs où nous n’avions jamais rien vu de tel. Bien sûr, les compagnies de gaz nous ont promis que nous ne les remarquerions même pas, que nous allions gagner énormément d’argent… et c’est ce qu’ils nous ont offert.

La rivière Delaware, qui coule à côté de la maison de famille de Josh Fox.

Mais mes voisins sont venus m’expliquer qu’ils avaient jeté un œil au procédé, qui consistait à injecter des produits chimiques dans le sol… Bref, tout ça ressemblait à un énorme projet industriel et j’ai voulu savoir de quoi il en retournait. Je suis donc allé à Dimmick, où ce genre de forage avait déjà eu lieu. Quand je suis revenu, je savais qu’il fallait empêcher que ça se produise chez moi et enquêter là-dessus parce que ça relevait du scandale national.  Alors qu’au départ c’était juste un film pour informer mes voisins !

D’où est venu l’idée de ce titre, Gasland ?

Le titre ne nous est venu qu’à la toute fin de la réalisation : nous regardions une campagne de pub cinéma des années 1950 pour le gaz naturel en Pennsylvanie et il y avait une réplique qui nous a frappé à propos des pipelines et des puits : “et ce genre de sites et de sons, vous pouvez les voir partout dans le Gasland !” Et là, ça a été le déclic : nous nous sommes regardés avec mon coéquipier : nous avions notre titre !

Comment s’est déroulé la production du film elle-même avant sa projection en salle ?

Nous projetions le film au fur et à mesure que nous le produisions pour informer les habitants de la région du haut Delaware : nous montrions des bouts de 10 minutes, 30 minutes… Nous étions déjà en contact avec notre public, ce qui nous aidait à sélectionner les séquences, et ça nous permettait de voir un peu mieux ce que nous pourrions faire comme film.

Mais le film Gasland lui-même est né d’un travail à deux, avec le monteur, enfermés pendant un an dans une pièce où nous choisissions ce qui nous plaisait le plus en nous inspirant du cinéma expérimental et notamment d’une de nos grandes références : Jean-Luc Godard ! Plutôt que “Que ferait Jésus à notre place ?” pour nous guider, nous avions un WWGD sur notre frigidaire pour “What would Godard do ?” (“que ferait Godard à notre place ?”). Même si nous voulions en faire un projet mainstream, ça nous paraissait essentiel d’y ajouter notre fibre artistique.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Quand avez-vous commencé à sentir de la pression de la part des entreprises exploitantes ?

L’industrie gazière a surfé sur le débat lancé par notre film : ils ont lancé une énorme campagne de publicité, qui à mon avis nous a beaucoup profité car elle a fait monter le buzz. Ils ont été jusqu’à produire leur propre film, en copiant le style “caméra à l’épaule” du nôtre, ce qui est assez flatteur quand on y pense ! Mais leurs efforts se sont retournés contre eux au final : plus ils en faisaient, plus les gens se posaient des questions sur ce qui ne tournait pas rond… Plus ils attaquaient notre film et plus ils attiraient l’attention sur notre initiative, aidant les gens à réaliser que leur défense ne tenait pas debout !

Vous avez tout de même été ajouté sur la Terror Watch List du Department of Homeland Security (ministère de l’Intérieur américain) !

Tout ce truc à propos de la Terror Watch, c’est le genre de chose auquel vous finissez par vous attendre : ces sociétés ont tellement d’argent et de pouvoir, c’est effrayant ! Mais c’est bien plus effrayant de perdre le travail d’une vie : cette maison en Pennsylvanie, mon père l’a construite de ses propres mains. Alors, au pied du mur, vous n’avez pas d’autre choix que de vous battre.

Avez-vous trouvé du soutien en dehors de vos voisins et de vos amis ?

Pour commencer, des centaines de milliers de personnes se sont impliquées à travers les États-Unis, tout le monde se sent concerné, et, pour faire circuler l’information et alerter les gens, l’aide des fondations que nous avons rencontré pendant notre tournée a été cruciale. Nous avons projeté notre film au Congrès, dans tout l’État de New York à l’Environemental Protection Administration (agence de protection de l’environnement) et au ministère de la Justice. Nous avons également reçu un soutien considérable de la communauté du film documentaire qui nous a notamment fourni une aide juridictionnelle quand l’industrie gazière nous a attaqué.

Une ligne est tracée au milieu des États-Unis ceux qui acceptent d’être à la merci des sociétés exploitantes d’hydrocarbures, qui sont dans une mentalité où l’humain n’a pas d’importance, et une armée de personne qui s’inquiète de la “vraie” Amérique et qui défend l’égalité, la liberté, la justice et l’éducation. Et nous, nous sommes entre les deux.

Pouvez-vous nous dire où en est la bataille dans votre région de Pennsylvanie ?

Nous venons de remporter une grande victoire : l’État de New York a voté un moratoire sur la fracturation hydraulique du fait des preuves qui sont sorties, c’est une première ! Pour en arriver là, il a fallu que nous donnions un exemplaire de Gasland à chacun des membres de l’Assemblée de l’État, ce qui fait quelques centaines, plus une à chacun des 70 sénateurs de l’État.

Tom Corbett, nouveau gouverneur de Pennsylvanie, a reçu un million de dollars de l'industrie gazière pour mener sa campagne.

En Pennsylvanie, là où coule la Delaware River, c’est une autre affaire : l’État vient d’élire un gouverneur extrêmement favorable à l’exploitation des gaz de schistes, Tom Corbett, qui a reçu un million de dollars de l’industrie gazière pour financer sa campagne. La commission du bassin du Delaware a approuvé plusieurs puits d’exploration, trois ont été forés et nous avons déjà constaté des signes de contamination de l’eau, l’un d’eux à quelques kilomètres de chez moi. Cela ne fait que plus nous motiver pour nous battre.

Comment expliquez-vous le retard des médias dans la couverture de cette affaire ?

Aux États-Unis, l’information est restée sous la côte d’alerte pendant pas mal de temps. Les premières explosions ont eu lieu au Texas, au Colorado, au Wyoming, qui sont des États peu denses où la production de gaz et de pétrole est déjà bien installée… Pas de quoi faire la Une des médias nationaux. Mais quand l’affaire est remontée jusqu’à New York et à la Pennsylvanie, des zones hyper peuplées, avec une grosse exploitation des nappes phréatiques et sans passif d’exploitation d’hydrocarbures, l’affaire a très vite fait parler.

Vous revenez d’Australie : y alliez-vous également pour enquêter sur les gaz de schistes ?

Nous avons fait des séquences à propos de l’exploitation des couches de charbon méthanier (coalbed methane) en Australie, qui sont très proches de la problématique des schistes : la  technique est proche de la fracturation hydraulique et le gouvernement s’est aligné sur les entreprises pour littéralement exproprier les gens. Il y a les mêmes problèmes de contamination de l’eau douce, pollution aérienne, vols des terres agricoles… Comme aux États-Unis, les gens sont poussés au dehors pour faire place à de vastes projets d’exploitation de gaz. Nous avons été là-bas pour soutenir les gens et parler de la situation en Australie.

Avez-vous le projet de réaliser un Gasland 2 ?

Nous ne savons pas encore quelle suite donner à Gasland mais nous en ferons probablement une : tout bouge tellement vite en ce moment que nous n’avons pas encore eu le temps de prendre un pas de recul. Nous réalisons également un film sur les énergies renouvelables.

Vous avez obtenu du soutien de la chaîne câblée HBO : pensez-vous que la télévision soit un medium indispensable pour faire passer votre message ?

Nous avons choisi de faire les deux : une distribution cinéma à notre manière et un partenariat avec HBO. Ils nous ont autorisé à partir en tournée avec notre film avant la diffusion télé et de le passer en salle ensuite. Mais nous savions que le sujet était très grave et nous voulions que ça se sache. Or, quoiqu’on dise, diffuser le film dans 40 millions de foyers, c’est une force de frappe inégalable ! Avoir accès à la télévision, c’est rentrer directement chez les gens et ça nous a énormément aidé. Nous avons bénéficié de leur machine de relation presse qui est fantastique mais nous voulions rester en contact avec les gens, montrer le film à travers le pays et répondre aux questions qu’ils se posaient. Prendre contact avec les organisations locales était un point clé de notre mission.

Comment les gaz de schistes ont-ils changé votre vie ?

En tant que directeur de théâtre, j’ai l’habitude de donner ma vie pour mes projets. Mais ce projet est différent car il a pris une ampleur nationale et que ce que nous faisons fait évoluer le débat. C’est très excitant et ça prend un temps fou mais nous nous battons pour l’État de New York, pour la Pennsylvanie…. Nous nous battons pour tellement de personnes : tous ces gens qui nous livrent leurs histoires, c’est une expérience extraordinaire, mais ça me donne aussi une obligation morale de me battre pour eux.

Pensez-vous être plutôt un réalisateur ou un activiste ?

Je suis un trouveur, je cherche la vérité, et je considère que le fait d’avoir une éducation vous donne des responsabilité. Je suis directeur de théâtre mais j’ai du tout mettre de côté pour ce projet, à la grande déception de ma compagnie. Mais ils comprennent : je n’ai pas choisi cette bataille, c’est elle qui m’a choisi, en arrivant dans ma boîte aux lettres !

Actuellement, je fais tout ce qui est en mon pouvoir : des gens nous contactent du monde entier, chaque jour, pour nous demander de l’aide ou des conseils, de diffuser le film… C’est le genre d’aventure qui ne vous arrive qu’une fois dans une vie, j’y investis donc tout ce que j’ai car c’est un danger mortel. Ce que je veux, c’est qu’on me rende ma maison, ma vie, ce sentiment de paix et de sécurité… Et s’il faut deux ans de campagne acharnée pour que ça s’arrête, alors je la mènerai et je sais que nous gagnerons.

Illustrations CC FlickR : Nicholas T ; Pennstatelive.

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http://owni.fr/2011/02/27/josh-fox-realisateur-anti-gaz-de-schiste-classe-terroriste/feed/ 19
Huiles de schiste: voyage au pays de l’or noir, à 60kms de Paris http://owni.fr/2011/02/25/huile-de-schiste-voyage-au-pays-de-lor-noir-a-60kms-de-paris-gaz-de-schiste-balkany-petrole/ http://owni.fr/2011/02/25/huile-de-schiste-voyage-au-pays-de-lor-noir-a-60kms-de-paris-gaz-de-schiste-balkany-petrole/#comments Fri, 25 Feb 2011 15:55:41 +0000 Sylvain Lapoix (texte) et Romain Saillet (son) http://owni.fr/?p=48462 A Paris, on n’a pas de pétrole. En tout cas pas à moins de 60 kilomètres de Notre-Dame. Il faut partir à l’Est, dépasser Meaux et La-Ferté-sous-Jouarre, ignorer les hameaux emmitouflés de forêt le long de la D204, continuer après le chapelet de vieilles fermes de La Butheil en direction de Rebai et ralentir pour regarder attentivement à droite quatre talus entourés de piquets de bois.

C’est là que Toréador, société pétrolière propriété du fonds d’investissement du frère de Patrick Balkany, espère faire fortune en tirant du pétrole des couches de schiste sous le plateau de la Brie. Et, jusqu’ici, le ministère n’a rien fait pour freiner ses ambitions. Surtout pas prévenir les habitants du coin !

Pour qu’ils l’apprennent il aura fallu beaucoup de chance et un débat national lancé par la révélation de l’exploration massive dans le Sud de la France en vue de l’extraction de gaz de schiste. Depuis quelques jours cependant, les mouvements de camions se sont calmés en Seine-et-Marne : histoire de désamorcer une polémique explosive en période de campagne pour les élections cantonales, Nathalie Kosciusko-Morizet a demandé l’arrêt des opérations dans toute la France jusqu’au 15 avril. Une simple pause. A la mairie de Doue, sur le territoire de laquelle Toréador a installé une de ses trois plates-formes du département (pour celles qui sont connues), une lettre de la préfecture est parvenue à la mi-février annonçant l’arrivée de véhicules et la reprise des travaux pour le lendemain de la fin du « moratoire » décrété par la ministre. Rien d’inhabituel dans ce petit coin de Seine-et-Marne où toutes les étapes de la procédure ont été soigneusement dissimulées aux habitants et aux élus.

Les ordres « venus d’en haut »

En septembre, alors que des représentants de l’Association de défense de l’environnement et du patrimoine à Doue participaient aux débats sur le Grenelle II, Jean-Louis Borloo signait l’arrêté ministériel autorisant Toréador à prospecter : en vertu du « permis de Château Thierry », la société se voit attribuer une zone de 779 km à cheval entre Aisne, Seine-et-Marne et Marne sur avis du ministère et des préfectures. Au niveau local, ce n’est que par un courrier envoyé à la mairie de Doue début août 2010 qu’on est informé de l’arrivée des bulldozers à l’automne.

Face aux demandes d’information du maire, la préfecture fait la sourde oreille et se réclame des « ordres d’en haut ». Début septembre, un dossier parvient à la mairie : le détail des opérations qui vont débuter dans les mois à venir, signé Toréador. Seul oubli : l’annexe 3, qui décrit la technique de fracturation hydraulique, jugée non pertinente dans un dossier décrivant l’exploration. Pas si inapproprié que ça en fait puisque le code minier définit les permis exclusifs de recherche (PER-H pour « hydrocarbures ») comme autorisant l’extraction et même la commercialisation des produits extraits.

C'est en allant déjeuner dans un restaurant de Doue que deux militants apprennent l'existence d'une deuxième plate-forme de recherche pétrolière.

Réunis dans un restaurant de Doue pour préparer une réunion sur la question, Caroline Pinet et Pierre Doerler, militants associatifs proches d’Europe écologie, sont interrompus dans leur discussion par le patron : « il avait eu à déjeuner des employés de Toréador qu’il avait remarqué car ils parlaient presque tous anglais, se souvient Pierre Doerler. Celui qui parlait français lui a expliqué qu’une plate-forme était en train de se monter sur le territoire de la commune de Jouarre. Nous avons pris notre voiture pour vérifier et trouvé les engins de chantier entrain de préparer la plate-forme. »

Quand l’équipe d’OWNI s’est rendue sur la plate-forme de Jouarre jeudi 16 février, les bulldozers avaient déserté, laissant en plan un champ boueux d’un hectare entouré de talus sur trois côtés au milieu duquel trônait un piquet de bois et une tige métallique bleue. Garé le long de la route, un employé de la Direction départementale de l’équipement et un groupe de salariés de Toréador nous ont aimablement salué avant de s’en aller. « Le maire de Jouarre était venu sur le chantier demander l’arrêt des opérations, » nous explique-t-on à la mairie. Mais la vraie décision est venue « d’en haut ». « Conformément à la demande de la ministre, les travaux ont été suspendus, nous répond-on en préfecture. Nous ne nous prononçons pas sur le sujet : nous ne faisons que relayer les communiqués du ministère sur la question. »

Tout ce qu'il restait des travaux sur le site de Jouarre au moment de notre visite sur le terrain.

Et les réponses de la ministre sont parfois pleines de surprise.

Fracturation dans un château d’eau de l’Île-de-France

C’est justement en lisant une annexe au courrier de la ministre demandant l’arrêt des explorations que les militants locaux découvrent mention d’un arrêté préfectoral du 12 février 2009. L’arrêté autorise la société Vermillion, propriétaire de l’ancien puits de pétrole d’ESSO de Champotran (à une quinzaine de kilomètres au Sud de Doue), à injecter dans le sol 220 000 mètres cubes d’eau par an jusqu’en 2010 puis 145 000 mètres cubes ensuite. « Les quantités d’eau ne laissaient pas de doute possible : ils comptaient procéder à des fracturations hydrauliques dans d’anciens puits de pétrole », en a vite conclu Caroline Pinet. Les puits « classiques » n’allant pas au delà de 800 mètres de profondeur, il suffit en effet pour atteindre la couche de schiste de continuer le forage et de le couder jusqu’à la roche mère avant de la fracturer pour récupérer les hydrocarbures.

Or, la source citée n’est pas n’importe quelle nappe phréatique : courant sous le tiers de la Seine-et-Marne, la « nappe de Champigny » pourvoit, selon la régie publique Eau de Paris, aux besoins en eau potable de 10% des Parisiens et de nombreuses communes de la Petite et de la Grande couronne, soit au bas mots quelques centaines de milliers de personnes. Une lourde tâche pour une source qui, depuis plusieurs années, est perpétuellement en « seuil de crise renforcé », le plus haut niveau d’alerte sécheresse qui oblige les habitants à des limitations de pompages industriels et agricoles, des restrictions de consommation, etc. En ponctionnant dans ce réservoir, les projets de forage puisent dans une oasis au bord de la désertification, l’exposant par ailleurs du fait de la méthode de fracturation hydraulique à des fuites de polluants (antibactériens, anticorrosif, etc.) mélangés aux liquides injectés dans le sol.

Un « triangle des Bermudes » politique

Au fin fond du Languedoc ou dans les gorges de l’Ardèche, l’absence de personnalité politique d’envergure nationale en dehors de José Bové a longtemps expliqué le silence entourant le dossier. Mais dans ce bout de Seine-et-Marne, les cadres de l’UMP sont en surnombre : le patron de l’UMP, Jean-François Copé, est député-maire de Meaux (6è circonscription), tandis que son successeur à la présidence du groupe parlementaire, Christian Jacob, est représentant de la quatrième circonscription de Seine-et-Marne à l’Assemblée. Un duo complété par la présence dans la 5è circonscription de Seine-et-Marne de Franck Riester, responsable notamment de la campagne européenne du parti présidentiel. « C’est le triangle des Bermudes de la politique cet endroit », résume Marie-François Lepetit, candidate pour le Front de gauche dans le canton de Rebai où se trouve la ville de Doue.

Face à elle, Anne Chain-Larché (fille de l’ancien président du Conseil général de Seine-et-Marne, Jacques Larché) représente la majorité, avec pour principal soutien Christian Jacob. Interrogée lors du lancement de sa campagne sur l’exploration pétrolière dans le canton, la candidate a déclaré avoir appris l’affaire « dans les journaux », suivi par son collègue député. En tant que rapporteur du Grenelle de l’environnement, Christian Jacob aurait-il été tenu à l’écart des discussions du ministère avec des compagnies pétrolières ? La réponse sera probablement donnée au lendemain des élections cantonales.

En attendant, les associations guettent : surgit dans la brume, la tour de forage de la plate-forme de Doue a disparu du jour au lendemain. N’en reste qu’un tronçon de tube et un préfabriqué pour lui tenir compagnie et abriter un agent de sécurité à plein temps qui reçoit « de temps en temps » la visite des salariés de Toréador. Écartés du processus de décision, les mairies tentent d’agir, bien que privée, comme tous les élus régionaux ou généraux, du moindre pouvoir de décision sur l’avancée des prospections. « Des salariés de la préfecture se sont déjà plaints de ne pas avoir été mis dans la boucle », confie-t-on au conseil général. C’est à peine si les territoires vont en profiter, « moins de 10 centimes par baril », estime-t-on à Doue : le sol appartient à l’État et seuls les agriculteurs ayant signés des concessions toucheront des bénéfices directs de ces projets.

Pendant ce temps là, Julien Balkany étale dans la presse ses ambitions : auparavant dispersé, Toréador a recentré toutes les activités en France et se vante de « relocaliser ». Ses objectifs pour le bassin parisien ont de quoi faire rêver les pompes à essence : 4,5 millions de tonne de brut par an.

L’Arabie Saoudite, on vous dit.

Photo : Sylvain Lapoix. Iconographie : Marion Boucharlat

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