Ordi en cours: soyons pragmatiques, n’ayons l’air de rien
Face au nombre croissant de ses étudiants utilisant un portable, Olivier Ertzscheid, enseignant en IUT, a décidé d'encadrer cette pratique. Prise de note attentive recommandée.
À l’heure de l’économie de l’attention, à l’heure où de plus en plus d’étudiants sont “équipés” de micro-ordinateurs, se pose de plus en plus la question d’autoriser ou d’interdire l’usage desdits micro-ordinateurs pendant les cours à l’université.
Enseignant principalement en IUT j’ai la chance d’effectuer la plupart de mes cours avec des promotions assez peu nombreuses (60 étudiants au maximum). Promotions dans lesquelles la proportion d’étudiants qui ouvrent leurs portables est de plus en plus grande. D’où débat avec les collègues : que faire ??
- Interdire tout le temps ? Débile quand on prétend en même temps promouvoir une littératie numérique.
- Autoriser tout le temps et sans condition ? Ingérable.
- N’autoriser que pour certains cours ? Pas cohérent.
- Mettre en place une charte ? Beurk. Je garde encore le souvenir nauséeux des chartes des salles d’informatique qui vous décourageaient de toute tentative d’approche d’ordinateurs par ailleurs en nombre notablement insuffisant et tournant à la vitesse d’une idée dans les circonvolutions cérébrales de Frédéric Lefebvre (c’est-à -dire très lentement). Et puis de toute façon, les étudiants ne lisent pas les chartes.
- Laisser chaque enseignant décider ? Pas cohérent.
- Couper l’accès WiFi ? Je suis pas fan de la castration chimique. Et puis la couverture WiFi sur les campus est quand même l’un des principaux acquis sociaux de la communauté étudiante (et accessoirement enseignante lors de conférences parfois… euh… ronflantes)
Résultat des discussions, pas grand-chose mais des débats intéressants.
De mon côté, je suis plutôt adepte d’une ouverture maximale aux NTAD (nouvelles technologies de l’attention et de la distraction) : blog du cours, présence sur les réseaux sociaux, etc.
À ma connaissance toujours, peu d’universitaires se sont publiquement exprimés sur ces questions de “pratique”, avec deux exceptions notables :
- André Gunthert : plutôt ni pour ni contre
- Jean-Michel Salaün : assez clairement contre (de nombreux liens dans son billet et à l’appui de sa réflexion, notamment les toujours éclairantes synthèses d’Hubert Guillaud sur InternetActu)
Voilà donc le contrat que j’ai décidé de passer avec mes étudiants :
L’utilisation d’un micro-ordinateur pendant mes cours est autorisée aux conditions suivantes :
- m’envoyer, à la fin du cours, un mail contenant (en fichier attaché) la prise de note du cours.
- accepter, si la prise de note est jugée correcte, qu’elle soit (anonymisée puis) versée sur le blog du cours pour pouvoir être ainsi utile à d’autres (éventuellement absents ce jour-là ou momentanément distraits – car comme le rappelait Lao-Tseu-Point-Com, “point n’est besoin d’être connecté pour être distrait”)
- accepter que l’utilisation du portable pour le prochain cours soit soumise à une autorisation préalable en fonction du résultat de la prise de note transmise lors du cours précédent.
Les avantages de ce contrat :
- je pense que le nombre d’étudiants bossant “sur ordi” va considérablement se réduire :-)
- pour celles et ceux qui joueront le jeu cela permettra d’enrichir le blog du cours et aussi de les sensibiliser “pratiquement” à une certaine idée du “collectif” / “partage” / “travail collaboratif”. Accessoirement, cela peut aussi permettre de valoriser le travail de certains.
- me permettre de “mesurer” les points du cours qui passent bien et ceux qui passent… Ã la trappe
Les inconvénients :
- ben… ça va me faire un peu de boulot en plus. Mais bon, on n’en est plus à ça près. Et pour une fois que ce sera pas du boulot administratif en plus ;-)
Les limites :
- le contrat ne vaut pour pour un nombre d’étudiants présents qui reste raisonnable. Si j’ai un cours en amphi demain avec 200 étudiants et qu’il y a 90 portables ouverts… À ce niveau-là il faudrait envisager une prise de note mais “réservée” sur un wiki commun (par exemple).
Et vous, quelles sont vos solutions ??
P.S. : le titre de ce billet est évidemment un clin d’Å“il.
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Billet initialement publié sur Affordance sous le titre “NTAD : Soyons pragmatiques, n’ayons l’air de rien”
Photo Flickr smannion
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