Mutins du travail
Un nouvel espace de coworking a récemment ouvert ses portes à Paris. Si Mutinerie propose des bureaux à la location, les fondateurs du projet souhaitent également ouvrir la réflexion autour des évolutions du travail en entreprise. Et favoriser l'émergence d'une communauté.
La vitrine est encore en friche. Au 29, rue de Meaux, dans le 19ème arrondissement de Paris, “Mutinerie” prend progressivement ses quartiers. Espace de “coworking“, le lieu permet à des travailleurs indépendants de louer leur bureau pour une journée, quelques semaines, ou plus si affinités. Rencontre avec ses fondateurs, qui ambitionnent d’apporter leur pierre à l’édifice d’une nécessaire redéfinition du travail.
Pirates au travail
Réunir dans un même espace des individus provenant d’horizons différents et exerçant leurs talents dans des secteurs variés, rien de bien révolutionnaire. Si ce n’est qu’une telle approche révèle une volonté de “faire communauté” et de recréer du lien autour de son activité professionnelle.
“Si on ne choisit pas sa famille, on peut aujourd’hui choisir ses collègues”, nous dit Antoine van den Broek, l’un des quatre gaillards à l’origine du projet. Les trois frangins van den Broek sont tous passés par une école de commerce. Après quelques expériences professionnelles en entreprise, ils ont eu envie d’autre chose que cette “logique qui te bride sur ton lieu de travail”.
Cela fait maintenant plus d’un an qu’Antoine, Éric et William, associés à leur ami Xavier, recherchent un lieu à la hauteur de leur ambition. Création d’un site pour expliciter leur démarche et commencer à réunir des individus intéressés, recherche frénétique d’un endroit pour accueillir leur projet ont rythmé leur vie… Jusqu’à découvrir l’espace idéal. Après trois mois de travaux et plusieurs prêts contractés, Mutinerie a ouvert ses portes.
“En situation de crise, les paradigmes explosent. Et le travail n’échappe pas à la règle.”, confie Antoine, “On est plus dans l’agrégation de compétences sur un projet que dans statut social”.
De son nom au discours de ses fondateurs en passant par son slogan (“Libres ensemble”), le projet se veut autre chose qu’une simple entreprise de location d’espace de travail.
“Une mutinerie, c’est quand l’équipage jette le capitaine par dessus bord et prend le contrôle”, nous explique Antoine au pied des escaliers d’une cave qui reste encore à aménager. Avant de continuer :
L’idée de Mutinerie, c’était de faire naître un mouvement.
Mouvement
Un mouvement animé par l’envie de “recréer des modes de confiance et de sociabilité”.En se passant, notamment, des relations hiérarchiques, et en insistant sur la notion de “communauté”.
C’est l’un des aspects importants du mouvement du coworking, qui trouve ses origines dans le développement du monde numérique. Les pratiques de travail en espace collaboratif y sont en effet encouragées, notamment lorsque différents corps de métiers travaillent ensemble lors de barcamps ou de hackathons.
De San Francisco à Berlin en passant par Londres ou New-York, les espaces de coworking ont essaimé. A Paris, leur développement est encore embryonnaire même si La Cantine, lieu de rencontre des acteurs du numérique de la capitale, a défriché le terrain.
Loin des grosses structures, incubateurs d’entreprises et autres friches souvent encouragées par les pouvoirs publics, Mutinerie veut faciliter les liens entre les membres de sa communauté. “Le coworking, c’est d’abord de l’humain”, explique Antoine, “on a voulu un espace très flexible pour encourager les liens entre les différentes professions“. Des métiers allant du conseil au design en passant par le management, la photographie ou encore l’architecture.
Depuis quelques semaines, les “résidents” (qui louent un bureau privatif) et les autres apprennent à se connaître dans cet espace de 400 m2 illuminé par une grande verrière. Des lieux sont aménagés afin de favoriser les interactions, comme le bar qui fait office d’accueil, ou “l’espace ramoufle”, situé dans un recoin du caveau, et qui permet de se détendre en toute tranquillité.
Les membres de Mutinerie sont en majorité des travailleurs indépendants, aux profils variés. Et, à la surprise des fondateurs, pas essentiellement masculins. “C’est bien, on évite l’ambiance caserne”, explique Antoine.
Les forfaits vont de 30 euros pour une journée à 390 euros par mois pour un espace de travail personnel. Pour le moment, les fondateurs du lieu ne se payent pas. En plus des abonnements, ils comptent sur l’organisation d’évènements, le sponsoring ou quelques missions de conseil pour parvenir à vivre de leur projet. Un business model évolutif, sur le modèle de ce que peuvent connaître les start-ups.
En attendant de trouver le modèle idéal, Mutinerie commence à tisser sa toile, de la revalorisation du tissu local à des liens avec différents espaces de coworking dans le monde.
Photographies par Ophelia Noor pour Owni /-)
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