Festivals en poche
Depuis trois ans maintenant, le nombre de téléchargements des applications Smartphone gratuites lancées par les grands festivals est en progression, et dynamise la consommation musicale : l’événement se vit désormais toute l’année sur le web, au-delà des pelouses et des chapiteaux. Reste à déterminer comment les professionnels investissent ce nouveau marché.
En 2012, le marché numérique de la musique est en pleine forme alors que les ventes physiques ne cessent de chuter. L’économie des festivals est elle encore florissante. Greencopper, entreprise basée à Montréal, qui propose depuis 2009 de développer, en natif, des applications Smartphone pour assurer la promotion des grands rassemblements musicaux en Europe, aux États-Unis et au Canada, avait eu le nez creux : elle a progressivement gagné la confiance du milieu et des sponsors et son catalogue compte aujourd’hui plus de 50 applications regroupant les principaux festivals de musiques actuelles de France. Un succès rapide au sein d’un marché en développement.
Miser sur l’expertise
Greencopper est constituée d’une petite équipe de 14 personnes, travaillant entre Montréal et Rennes. L’entreprise a acquis en trois ans d’existence un savoir-faire unique, reconnu par les organisateurs de festivals : en France, leur concurrence se limite désormais à quelques agences freelance, aux États-Unis, l’entreprise rivalise avec Xomo, qui développe, entre autres, l’application du festival geek et musique SXSW. Une réussite liée à l’adaptation : des concerts urbains aux énormes scènes de plein air, l’application proposée doit répondre à des attentes précises correspondant au lieu et au public. La stratégie principale de l’entreprise, présentée par Cécile Martin, directrice marketing, repose toutefois sur une logique de centralisation :
Nous mutualisons les besoins des professionnels. Nous vendons d’abord une licence de base à 3000 euros, comprenant le développement en natif et la maintenance, puis nous proposons une grille de tarifs pour l’ajout de services. Ces coûts peuvent être pris en charge par des partenaires privés. Les années suivantes, nous ne facturons que le coût de développement de nouvelles fonctionnalités ajoutées par les organisateurs, comme le push par exemple. Le but du jeu est de simplifier au maximum les démarches pour les responsables communication et de supporter toutes les contraintes techniques.
L’autre atout de Greencopper est sa connaissance du terrain. D’abord festivaliers avant de devenir prestataires de services, les différents membre de l’équipe assistent aux événements, cherchent de nouvelles idées à partir de leurs propres expériences et rencontrent directement leurs clients. Un lien de proximité très apprécié des organisateurs selon Lénaïc Jaguin, responsable communication du festival Rennais Les Tombées de la Nuit :
Greencopper anticipe en partie nos besoins et travaille directement avec les organisateurs et ses partenaires. L’entreprise prend totalement en charge un des moyens de promotion les plus importants aujourd’hui en matière de visibilité et d’interactivité, ce qui nous permet de réaliser des économies d’échelle. Chaque année nous pouvons également discuter de nouvelles fonctionnalités proposées par Greencopper qui apportent toujours une plus-value.
Après s’être imposée dans un marché émergent, Greencopper s’attache maintenant à fidéliser les utilisateurs en proposant des contenus impliquant davantage les publics. Un objectif qu’elle partage avec les organisateurs.
Le prolongement communautaire
Le taux d’équipement en Smartphone en France est sur une courbe ascendante. Les applications mobiles, déjà largement utilisées par les festivaliers pour le partage de photos et de vidéo, semblent aussi être un outil prompt à la constitution d’une communauté. Lier la navigation du public aux réseaux sociaux est par exemple une des possibilités déjà expérimentées par les festivals. Dans son application 2011, téléchargée environ 40 000 fois, Rock en Seine proposait aux spectateurs de joindre leur compte Facebook au service de géolocalisation. Fleur Richard, responsable de la communication du festival, est prête à continuer dans cette direction :
Nous aimerions également aller plus loin avec l’application. Nous avons pensé à lier les tweets des festivaliers qui utilisent l’application avec un compte officiel et diffuser cette timeline sur les écrans géants. Nous n’avons pas encore l’effectif nécessaire pour gérer et modérer ce compte pour l’instant, mais c’est une idée que nous aimerions développer, à terme.
La seconde option pour animer la communauté de festivaliers est la gamification, actuellement étudiée chez l’un des principaux partenaires de Greencopper, SFR. Sander Cisinski, directeur du sponsoring, des partenariats et du programme jeunes talents de SFR, explique :
Nous aimerions développer l’aspect ludique de ces applications en proposant des rencontres ponctuelles avec les artistes sur les sites de festival ou bien des chasses au trésor. Il s’agirait d’enrichir le volet géolocalisation, de faire participer le public, de lui donner un autre rôle pendant les concerts.
La piste privilégiée par la FNAC, autre partenaire de l’éditeur d’application, est de proposer un service de billetterie complet, au-delà de la musique live et du volet communautaire des festivals, afin d’exploiter le potentiel du M-commerce, au cas où la fréquentation s’essouffle.
Les avantages retirés de ces API par les professionnels en termes de visibilité et de communication semblent évidents mais la réception de l’offre est plus difficile à apprécier. Si l’on isole les festivaliers utilisateurs d’iOS, représentant tout de même 55 à 60 % de l’activité de Greencopper, les étoiles et commentaires de l’AppStore ne peuvent donner qu’une idée partielle du taux de satisfaction des publics. Greencopper a constaté que le taux de mise à jour moyen est d’environ 40% : les applications restent souvent sur le téléphone des usagers, en attendant le festival suivant.
Photo par thqspeaks [CC-byncsa]
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