CETA : “il n’est pas encore temps de dire si je voterai pour ou contre”
L'eurodéputé hollandaise Marietje Schaake avait fait partie de la fronde contre feu ACTA, dont le nouveau traité CETA est accusé de servir de cheval de Troie. Interview.
ACTA est mort, vive CETA. Ou pas. Accusé de servir de backdoor au traité anti-contrefaçon rejeté cet été par le Parlement européen, le projet d’accord de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne est dans le viseur des militants des libertés numériques et des opposants au libéralisme effréné. Le treizième round de négociations s’est ouvert ce lundi et le calendrier sera court, avec un vote du Parlement européen attendu “entre trois et six mois”, selon le porte-parole de La Quadrature du Net Jérémie Zimmermann, un des fers de lance de la lutte.
L’eurodéputé hollandaise Marietje Schaake (Groupe Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe) était de ces élus qui s’étaient élevés avec vigueur contre ACTA. Pour le moment, sa position est réservée.
Il est important de comprendre ce qu’est CETA, un accord de libre-échange complet entre le Canada et l’Union européenne. Cela signifie qu’un certain nombre de sujets sont en train d’être discutés des deux côtés, des sables bitumineux au réglement de conflits entre états et investisseurs, en passant par les visas de libre circulation pour les Européens de l’Est, etc., et il n’est pas encore temps de dire si je voterai pour ou contre.
Nous en sommes actuellement en train de faire passer le maximum de points de ce traité que nous estimons importants pour les citoyens européens, les consommateurs et les entreprises.
Cela inclut mon attention particulière sur la façon dont le droit de la propriété intellectuelle est reflété dans l’accord proposé. Je pourrai dire seulement à la fin de la procédure si je pense que cela nuira aux Européens ou leur sera bénéfique.
Jusqu’à présent, seuls des brouillons ont été fuités, ce qui n’est pas une situation idéale. Certaines personnes se réfèrent à des versions dépassées et suscitent ainsi de la confusion.
Je suis une grande partisane de la transparence mais je pense qu’il est important de comprendre qu’il peut exister des raisons légitimes de négocier sans révéler les textes en amont. Cela peut saper la négociation et dans le cadre d’un accord commercial, il est largement accepté que les enjeux économiques peuvent être si élevés qu’il est important de ne pas affecter les bourses, par exemple. Ceci dit, je pense qu’il est néfaste d’abuser de la confidentialité dans les négociations des accords de commerce. Dans le cas de l’ACTA, j’ai toujours défendu le fait que cétait une loi imposée de force et non un traité.
Mes collègues, comme moi, sommes concentrés sur de nombreux aspects de CETA, nous sommes au milieu du gué et chacun est attelé à résoudre les points problématiques. C’est une façon normale de travailler. J’ai demandé des garanties à la Commission européenne pour que des mesures similaires à ACTA ne soit pas introduites. Elle m’a assuré que ce ne serait pas le cas. Je leur laisse le bénéfice du doute.
Je sens que, parmi de nombreuses personnes à Bruxelles, la campagne anti-ACTA a soulevé de nouvelles inquiétudes. Je crois qu’il est important de travailler ensemble, société civile, monde des affaires, Parlement européen, pour élaborer des législations constructives, par exemple réformer l’application des droits sur la propriété intellectuelle en Europe. En revanche, contester ce qui est déjà sur la table n’est pas la seule solution. Il ne serait souhaitable pour personne que la peur d’une réaction des pouvoirs publics engendre des retards dans les propositions de politique publiques bénéfiques pour les citoyens européens.
Portrait de Marietje Schaake CC Flickr ALDEADLE by nc sa
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