Regarde les US voter

Le 7 novembre 2012

Scrutés, quantifiés, sondés... des déplacements de candidats au financement de leur campagne en passant par leurs bases électorales respectives, Barack Obama et Mitt Romney ont été datavisualisés sous toutes les coutures. Petit florilège des expérimentations les plus belles et les plus pertinentes.

Du lendemain de la défaite républicaine en 2008 à la veille du scrutin, The Guardian vous entraîne dans une graphic novel de quatre ans de vie politique américaine.

De tous les coins de France, nous avons suivi la campagne américaine comme une série télévisée. Depuis l’élection de Barack Obama jusqu’à sa confirmation pour un second mandat, cette histoire a connu des rebondissements dignes d’une fiction, étalés sur les quatre ans d’un feuilleton que The Guardian a retracé à l’encre. En scrollant sur la page, les contours des Tea Party se forment, précédent la meurtrière primaire républicaine et les derniers mois des quatre premières années de présidence Obama. Une graphic novel qui ne souffre que d’un suspense depuis éventé.

Budget

Derrière les groupes de soutien aux candidats, des hommes d'affaires dans l'attente de renvoies d'ascenseur... Les Super Pacs, étrangeté du financement des campagnes américaines décryptée par ProPublica.


Consécutive à la crise, cette campagne aura été marquée par la démesure de ses moyens, des milliards de dollars injectés en billets d’avion, convention et spot télés. Méconnud en France, les Super Pacs ont fait scandale aux États-Unis, ces structures de soutien aux candidats abondées à coup de millions par des cadres haut placés de sociétés américaines soulignant des liens préoccupants entre milieux d’affaire et pouvoir en place.

Fidèle à sa mission d’empêcheur de magouiller en rond, ProPublica a inspecté en long en large et en travers les données de la Commission fédérale aux élections publiées par The New York Times pour visualiser et analyser les donateurs et bénéficiaires de ces sommes folles. Dans le graphique ci-dessus, les dons sont représentés par des carrés dont la taille est proportionnelle au montant. Survolez l’un d’eux et vous retrouverez le donateur dans les autres Super Pacs, comme ici Bobby Jack Perry, déjà généreux donateur de Georges W. Bush.

La liste des donateurs détaillées avec leurs contributions peut également être consultée dans le dossier PacTrack sous une forme plus sommaire. Quant aux bénéficiaires, ProPublica les a également triés par montant et par payeur. Où l’on découvre que le principal sous traitants des Républicains fut la société de conseil en communication American Ramble Productions (18 millions de dollars jusqu’en mars 2012) et que le premier fournisseur des Démocrates fut AB Data (16 millions), spécialiste… en collecte de fonds !

Follow the money

Avec une navigation simple et riche et des données mêlées à des interviews vidéos en plan serré, le webdocu Moneyocracy donne un regard en profondeur et critique sur le système des Super Pacs.


Superbe hybride, fruit du travail au long court de deux journalistes français, Moneyocracy propose une approche plus vivante mais pas moins informée sur les Super Pacs. Avec une dose de serious game et de vrais extraits des pubs les plus improbables diffusées à travers les États-Unis, Gérald Hubolowicz et Jean-Nicholas Guillot (fondateurs de l’agence Chewbahat) embarquent les lecteurs dans un voyage au pays où la télévision fait et défait les votes à coup de millions de dollars.

Sur le front

Tous les médias ont parlé des “swing states” États bascules pouvant faire pencher d’un côté ou de l’autre le scrutin, sur lesquels les deux principaux candidats ont concentré leurs efforts. D’une carte en à-plat de couleurs, le site Matière Primaire fait surgir d’un survol de la souris sur la tête des candidats leurs principaux points de focales, cumulant les meetings du nominé et de son vice-président, en une véritable carte d’Etat major. S’y dessinent l’obsession de Romney pour la Floride (55 réunions publiques), la dispersion d’Obama et la compétition féroce pour le petit mais crucial État de l’Iowa.

En temps réel

Toute la journée durant, les votes des usagers de Facebook ayant décidé de partager leur choix avec leurs amis apparaissaient sur cette carte. Depuis sur une boucle des derniers bulletins adressés, l'application propose quelques statistiques sur les participants.


Durant la journée du 6 novembre, plus de neuf millions et demi d’Américains ont partagé sur Facebook leur choix via l’application Election Day Prompt, permettant à Facebook Stories de placer sur une carte chacun des bulletins glissés dans l’urne. En temps réel, n’importe qui pouvait voir exploser, ici et là, les bulles de la couleur du réseau social, depuis animées suivant le mouvement des derniers votants. Au pied de cette carte, des statistiques retracent le profil des participants : par sexe, par âge et par région. Une archive non exhaustive mais utile pour connaître cet échantillon du corps électoral qui partage numériquement sa vie citoyenne.

Vents contraires

Revirement démocrate dans le Sud-Est, poussée massive pro-Romney dans le centre... d'une cartographie dynamique, le New York Times brosse le mouvement dessiné par un vote plus serré qu'en 2008.


Pas vraiment serrée sur le plan des grands électeurs, la victoire de Barack Obama n’a pas été si large sur le plan des électeurs. Pour voir quels courants ont maintenu le candidat démocrate à la Maison blanche, The New York Times a dressé une carte de l’évolution des votes. A chaque point, un vecteur représentant l’évolution du vote, vers la gauche en bleu pour les démocrates et vers la droite en rouge pour les ralliés à Romney.

Un maëlstrom de vents contraires, qui trouve son noyau anti-Obama dans les grandes plaines, compensé par le revirement de la Floride et le soutien dans grands centres urbains de Californie et du Nord-Est. En accompagnement, quelques graphiques décryptent les soutiens clefs au président sortant : les femmes, les hispaniques (plus encore qu’en 2008) et les jeunes, qui ont fait basculer la Floride.

Bonus : nostalgie

L’équipe de Paule D’Atha vous le rappelle régulièrement : le datajournalisme ne date pas d’hier ! Entre les datavisualisation des bureaux de statistiques du XIXe siècle et les représentations naturelles de fractales, les exemples sont nombreux de la continuité d’un désir de représenter chiffres et notions abstraites de manières plus douces à l’œil que les ingrats tableaux Excel.

Dans la continuité de son traitement esthète des questions d’actualité, le magazine The Atlantic a plongé dans les archives de The New York Times pour livrer quelques cartographies anciennes des précédents scrutins présidentiels. Des blocs monochromes de 1896 aux cartes semées de chiffres des années 1970, qui précèdent de peu les analyses avec camembert du scrutin Clinton/Dole de 1996, la petite balade a le charme du papiers vieillis et un petit goût d’artisanat qui plaira aux éternels étudiants de cette nouvelle discipline journalistique que nous sommes.

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