CADA: 95% des administrations hors-la-loi?
Une enquête menée par OWNI sur 22 administrations montre que seules 5% d'entre elles respectent la loi sur l'accès aux documents administratifs. Une douche froide pour l'ouverture des données publiques.
Combien d’administrations respectent-elles la loi commission d’accès aux documents administratifs (CADA) relative à l’accès aux documents administratifs ? Mardi et 15 et mercredi 16 février, OWNI a mené l’enquête : une trentaine d’administrations ont été sélectionnées au hasard parmi les conseils généraux, les conseils régionaux, les autorités administratives, les communautés de communes et les communes. A chaque fois, nous leur avons demandé un document unique : le dernier budget réalisé au format xls ou csv.
72 heures plus tard, seule une administration nous a fait parvenir le document au format désiré, le Conseil Général du Lot. Les 21 autres avec lesquelles nous avons pu établir une communication téléphonique nous ont parfois rembarré, parfois renvoyé vers des documents pdf présents sur le site ou promis de nous envoyer le budget en question par e-mail.
La méconnaissance de la loi CADA n’est pas seule en cause. L’incapacité de certains fonctionnaires à comprendre les problématiques de l’ouverture des données publiques apparaît manifeste. Plusieurs interlocuteurs se sont montrés incapables de comprendre la nécessité d’avoir accès aux données dans leur globalité. On nous a parfois répondu :
Je vais vous envoyer le dossier de presse, vous aurez tout.
Dans plus de la moitié des cas, il nous a été répondu qu’il était impossible d’obtenir un fichier Excel ou csv. Parfois, le système informatique est seul coupable. Les solutions propriétaires achetées à prix d’or auprès des grands noms de l’informatique d’entreprise n’ont pas été conçues pour être compatibles avec le monde extérieur. Pour les collectivités concernées,  les prestataires réclament des sommes pouvant aller jusqu’à 100 000€ pour ajouter une fonctionnalité d’export en csv.
Plus grave : le niveau de compétence informatique de certains fonctionnaires mène à des situations grotesques, où des fonctionnaires justifient leur refus de respecter la loi en étalant abondamment leur ignorance.
On ne donne que du papier. Pour que vous ne puissiez pas modifier les chiffres.
Ce genre de remarques, entendues régulièrement avec sa variante « les fichiers xls sont modifiables, pas les pdf », traduit un manque de confiance des administrations envers les journalistes. Surtout, elles montrent que certains fonctionnaires ne sont pas suffisamment formés à la compréhension des enjeux informatiques. Les fichiers pdf sont tout aussi éditables que les fichiers xls, qui peuvent être également verrouillés.
Dans cette enquête, la seule administration allant mettre en place un programme d’ouverture des données publiques est aussi celle chez qui les réponses ont été les plus farfelues. En effet, Nantes a annoncé en février son intention de participer au mouvement de l’opendata. Pourtant, l’interlocuteur que nous avons eu au service financier a tout d’abord tenté de nous renvoyer sur le site de la ville, où l’on trouve une version pdf du budget 2010 primitif répartie dans une quinzaine de documents différents.
Ces documents mentionnent l’existence de fichiers sources, mais on nous a opposé un refus formel de les communiquer. Pourquoi ? « Vous comprenez, tout le monde peut en faire n’importe quoi quand c’est pas du pdf ». Effectivement.
Retrouvez le document Google Doc recensant les réactions des administrations.
Enquête réalisée avec Ophelia Noor et Stan Jourdan.
Photo: Le tribunal de Nantes, CC telomi
Mise à jour 22 février 08:45 Nantes va se doter d’un programme d’ouverture des données publiques, mais ne l’a pas encore fait. Merci @LiberTIC.
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